L'accueil d'urgence en péril
12.07.11
Monsieur le Maire de Paris, vous n'ignorez pas la situation alarmante du SAMU social. Les budgets dévolus à l'accueil des personnes à la rue connaissent des diminutions drastiques : les centres d'hébergement d'urgence ferment leurs portes, et les nuits d'hôtel destinées à pallier les 13 000 places manquantes dans les centres d'Ile-de-France se font de plus en plus rares.
Le budget destiné aux familles baisse à lui seul de 24 %, jetant sur le trottoir un nombre considérable d'enfants, de femmes et d'hommes livrés à des vies impossibles. Plusieurs médecins hospitaliers ont raconté comment ils voyaient arriver dans leurs services des familles démunies, demandant à dormir dans un renfoncement de couloir pour fuir la violence du trottoir. A défaut de pouvoir leur proposer une solution d'hébergement, le personnel du SAMU social leur avait conseillé cette ultime solution de misère digne du Moyen Age : demander la charité dans un hôpital.
Le 30 juin, le SAMU a fermé le centre d'hébergement d'urgence Yves-Garel situé dans le 11e arrondissement de Paris, qui accueillait 57 hommes et 38 femmes. Un bâtiment a été trouvé pour accueillir les hommes, en revanche pour ce qui concerne les femmes, aucune solution de rechange n'a été mise en oeuvre.
Ces quelques 38 places du centre Yves-Garel étaient les seules places que le SAMU social de Paris proposait aux femmes en situation d'hébergement d'urgence.
DISCRIMINATION MEURTRIÈRE
Le manque de places était déjà très préoccupant mais, depuis le 1er juillet, plus aucune femme ne peut compter sur les centres d'urgence gérés par le SAMU social pour échapper à la rue. Inébranlable, le gouvernement refuse tout compromis, assumant avec cynisme une discrimination meurtrière envers une population vulnérable, négligée depuis des années et abandonnée.
Vous-même avez dénoncé publiquement, il y a quelques jours, ce désengagement effrayant du gouvernement, qui porte atteinte à ce droit social fondamental qu'est l'accueil inconditionnel des personnes à la rue. Vous avez témoigné de votre inquiétude et de l'importance à vos yeux d'un engagement solidaire.
Si la Ville de Paris ne peut pas se substituer à un financement qui devrait venir de l'Etat, face à l'incurie du gouvernement en matière de politique sociale, la Mairie de Paris ne serait-elle pas en position de trouver un lieu pour ces femmes à la rue ? La question se pose d'autant plus que les bâtiments du centre Yves-Garel étaient prêtés par la Ville, et qu'ils vont être démolis sans qu'un nouveau lieu ait été proposé en remplacement. La Ville ne dispose-t-elle pas d'un local qu'elle pourrait prêter d'urgence pour compenser cette destruction ?
Nous savons bien que la Ville contribue au fonctionnement de plusieurs associations d'accueil des plus démunis, mais une institution comme le SAMU social est une institution nationale et internationale. En tant que mandataire officiel de l'Etat, le SAMU apporte la garantie visible et capitale d'un droit social. Monsieur le Maire, ce droit à l'accueil d'urgence est en péril. Trouver un bâtiment pour accueillir ne serait-ce que quarante femmes ferait rempart contre cette démolition annoncée.
Julia Peker, agrégée de philosophe, bénévole au SAMU social de Paris
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