Par Cassandre Rogeret 26 janvier 2021
10 à 15 % des mères présentent des symptômes dépressifs post-accouchement, qu'elles aient ou non des antécédents psychiques. Un cap difficile à franchir qui exige la vigilance des praticiens et nécessite un accompagnement adapté.
« Ma femme a accouché le 14 novembre et, à partir de là, tout s'est effondré... » 24 décembre 2020. Limay, Yvelines. Une femme de 31 ans poignarde à mort son neveu, âgé de 10 ans, blesse sa nièce de 4 ans et son fils d'un mois et demi. Si, dans un premier temps, elle se dit « possédée par le diable », elle explique ensuite, durant sa garde à vue, son geste par une dépression post-natale. Son époux confirme qu'elle a littéralement « pété les plombs ». Deux jours plus tard, elle est écrouée pour homicide volontaire et tentative d'homicide sur mineur. « Je n'arrive pas à y croire, déclare-t-elle aux enquêteurs, selon Le Parisien. Pourtant j'aime ma famille. Tout cela, c'est à cause du stress... » « Un drame sur lequel la justice a été saisie et déterminera toutes les responsabilités (qui) vient rappeler à chacun que le post-partum est une période de grande fragilité touchant toutes les femmes après l'accouchement », a réagi Adrien Taquet, secrétaire d'Etat en charge de l'Enfance et des familles, sur Twitter, le 27 décembre. Sans forcément engendrer des situations aussi dramatiques, c'est un cap parfois difficile à franchir qui exige une grande vigilance de la part des professionnels et surtout une prise en charge adaptée.
Baby-blues…
Pierre Thomas, psychiatre et professeur de psychiatrie, tient à faire un distinguo. Le « baby-blues » survient en général quelques jours après l'accouchement, c'est pourquoi il est aussi appelé « syndrome du troisième jour », et se manifeste par de l'irritabilité, de l'anxiété, de la vulnérabilité et des sautes d'humeur. Il s'agit d'une réaction transitoire, jusqu'à une quinzaine de jours, qui s'explique par des changements physiologiques (chute hormonale importante), une augmentation du stress et un manque de sommeil. 80 % des femmes en seraient affectées. « Auparavant, la durée d'un séjour en maternité atteignait cinq jours, aujourd'hui c'est beaucoup plus court. Pour certaines femmes, le retour à la maison peut s'avérer compliqué », explique-t-il. Mais cela devient « catastrophique », selon lui, lorsque le malaise s'installe ou même survient dans les mois qui suivent, en général vers le troisième mois après l'accouchement.
…ou dépression post-natale
On parle alors de « dépression post-natale », qui concerne 10 à 15 % des mamans en France. « Il n'est pas toujours facile de distinguer l'un de l'autre », poursuit-il. Or ces dépressions, qui sont loin d'être rares, peuvent avoir des conséquences importantes sur les interactions mère-enfant si elles ne sont pas repérées. Symptômes majeurs ? Troubles du sommeil, anxiété, inquiétude, réduction d'appétit, désintérêt, difficultés à demander de l'aide et à récupérer... Si la pression sociale exige que la maternité soit une expérience positive, ce n'est donc pas toujours le cas. Les femmes qui, un temps, ne voient pas cette nouvelle vie en rose, sont parfois submergées par un sentiment de culpabilité ou d'incompétence, pouvant engendrer une perte d'estime de soi.
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