TRIBUNE. Dans ce texte inspiré par les tours de la Défense, le politologue Nicolas Matyjasik met en garde contre notre « sempiternelle quête de rentabilité ».
A l’hôpital Lariboisière, le 27 avril 2020.
(JOEL SAGET / AFP)
Il y a des mots qu’on ne veut plus entendre, des chiffres qu’on ne veut plus voir. Ils brûlent nos yeux et nos oreilles. Ils contaminent les services publics depuis trop longtemps. Ils imposent leurs réalités qui ont germé dans les open spaces des grandes tours du quartier de la Défense, dans cette forêt urbaine et son sous-bois aux odeurs de capitalisme triomphant. Des agents pollinisateurs les ont transportés dans le jardin de hauts fonctionnaires qui multiplient les allers-retours dans les entreprises privées.
Clément est consultant. Il arrive difficilement à son bureau niché au dix-huitième étage d’un immeuble turgescent. Son RER D, pris depuis la Gare du Nord, a du retard à cause d’une grève, et cela le stresse. Son temps doit toujours être optimisé, il rend des comptes sur son activité dans son time shit, une feuille de temps dématérialisée, qui observe chaque battement de ses doigts sur son clavier d’ordinateur.