Drame de la vie:les missions de la cellule psychologique
La journée d’hier a été une journée noire. Au total, quatre personnes, dont une adolescente et deux enfants âgés de 18 mois et 3 ans ont péri dans des circonstances tragiques. Pour les familles endeuillées, un long et pénible travail de deuil commence. La cellule d’aide psychologique doit permettre aux proches, aux personnes qui ont été témoins de ces scènes effroyables de se reconstruire. Interrogée pour Antenne Réunion, le Docteur Visnelda-Douzain décrit les missions de cette cellule d’urgence. Entre 8h et 9h, l’émission "C’est vous qui faites l’info" abordera le thème des accidents domestiques et de la prévention.
Deux drames, deux familles endeuillées et une douleur insoutenable. A Saint-André, les habitants de la Zac Fayard sont sous le choc, après la disparition brutale de la jeune Sarah, une collégienne de 14 ans, morte écrasée par un bus alors qu’elle sortait des cours. Dans la commune proche de Sainte-Suzanne, des parents pleurent le décès de leurs deux marmailles âgés de 18 mois et 3 ans. Les jeunes enfants qui se trouvaient seuls avec leur frère aîné de dix ans ont péri dans l’incendie de leur maison. Un jeu avec les allumettes serait à l’origine du drame.
Ces événements tragiques marqueront à jamais les proches des victimes. Pour les aider à faire face à cette dure réalité, des professionnels sont mobilisés. Le Docteur Christine Visnelda Douzain est Responsable de la Cellule d’Urgence Médico-Psychologique départementale et régionale. Interrogée pour Antenne Réunion, la psychiatre a accepté de décrire son travail au quotidien et les dispositifs mis en place pour prendre en charge les personnes affectées par ces drames de la vie.
Les cellules de soutien psychologique ont vu le jour suite aux attentats du Métro Saint-Michel. Cela fait donc plus de quinze ans qu’un tel dispositif est employé pour gérer des situations de crise et prendre en charge les personnes affectées par un drame, qu’il s’agisse d’un incendie, d’un grave accident de la route, d’une noyade ou encore d’une attaque terroriste.
Comme l’explique le Docteur Visnelda-Douzain, la mission première de la cellule d’urgence consiste à prévenir ce qu’on a coutume d’appeler dans le jargon médical "les troubles psychosomatiques", qui peuvent survenir après les événements cités plus haut. Les conséquences à moyen terme peuvent être assez importantes en terme de souffrance psychologique.
Dans ce contexte, plus la prise en charge, le diagnostic, est précoce, plus on a des chances d’obtenir des résultats probants en termes d’évitement de la pathologie. Il faut toutefois dissocier les troubles psychiques liés à ces événements douloureux, du travail de deuil que les personnes doivent effectuer lorsqu’elles ont perdu un être cher dans des circonstances dramatiques.
Dans le cas de l’incendie qui a fait deux jeunes victimes à Sainte Suzanne hier, deux marmailles âgés de 18 mois et 3 ans, la Responsable de la Cellule d’Urgence rappelle que " les parents n’ont pas assisté au drame, et quelque part heureusement pour eux". La professionnelle indique que "cela limitera au moins quelques risques de souffrance sur-aigüs". Et d’ajouter que la règle de base dans ces situations reste l’humanité, l’entraide, la solidarité qui s’organise autour des personnes directement affectées par ces morts brutales.
L’humanité, la présence et le temps peuvent en effet suffire dans bien des cas. Selon le Docteur Visnelda-Douzain, la psychiatrie n’est en effet pas nécessaire dans la mesure où le travail de deuil qui demande du temps, est facilité par la famille, par la société.
La psychiatre et les membres de son équipe interviennent sur demande du Samu, lorsque la douleur des proches, des témoins est jugée trop violente ou qu’elle génère des troubles psychiques importants. La prise en charge est différente en fonction des rapports qu’entretenaient les personnes avec la ou les victimes. Que l’on s’adresse aux personnels de secours ou aux parents d’un enfant décédé, l’approche est différente. "Nous devons respecter un protocole, une marche à suivre spécifique à chacun" précise le Docteur Visnelda-Douzain.
L’idée est d’aller au plus près de l’événement pour assister les personnes qui ont été témoins d’une scène effroyable. Le processus de reconstruction peut prendre du temps parfois, parfois non. Ses années d’expérience ont montré au Docteur Visnelda-Douzain que "Cela dépend des personnes, de leur histoire, de leurs ressources internes. Certains drames sont plus difficiles à surmonter. On remarque ainsi que la mort de petits enfants est particulièrement dure à accepter. De la même façon, les incendies meurtriers génèrent d’importants traumatismes dans la mesure où il s’agit d’une mort douloureuse".
Si les personnes touchées par un accident de la route mortel sont en général bien suivies sur le plan psychologique et psychiatrique, la prise en charge est moindre à la suite d’incendies mortels. Ce constat, le Docteur Visnelda-Douzain le déplore. Elle parle "d’un oubli étrange" et insiste sur le fait que ces événements sont eux aussi très traumatogènes.