« Adolescentes invisibles, développement impossible » – le titre du colloque organisé cette semaine à la Mairie de Paris par l’association « Équilibres et populations » illustre bien une triste réalité : au-delà d’une élémentaire justice, le développement durable ne peut se faire dans des sociétés qui, de mariages forcés en grossesses précoces, réduisent les filles à l’état de simples génitrices.
Le témoignage émouvant de Fati, parle de lui-même ; mariée de force à 14 ans à un homme déjà marié, qu’elle ne connaissait pas, elle est violée, a un enfant, travaille sans repos dans la famille… Elle a eu le courage de fuir du Niger au Nigeria et, avec l’aide de son oncle, a pu récupérer son fils et elle a repris sa scolarité, avec succès. À 18 ans, elle vient de terminer sa 4e.
1 fille sur 9 mariée avant l’âge de 15 ans
Dans les pays en développement, 1 fille sur 9 est mariée avant l’âge de 15 ans, 34 % avant 18 ans et 20 à 50 % deviennent mères avant cet âge. Ceci allant avec cela, en Afrique subsaharienne, 1 fille sur 4 ne va jamais à l’école, et 1 sur 2 ne fréquente pas l’école scolaire. Les conséquences sanitaires sont encore plus dramatiques : les complications obstétricales sont la principale cause de décès chez les adolescentes dans ces pays, 1 décès sur 7 est lié à l’avortement en Afrique…
Mais arrêtons l’énumération de chiffres, qui sont d’ailleurs parcellaires, tant il est vrai que ces millions de vies écourtées et/ou brisées sont rendues « invisibles » dans des sociétés qui tolèrent, et donc encouragent, ces discriminations. Les programmes de développement laissent presque toujours les adolescentes de côté.
Les adolescentes visibles dans les objectifs 2030 de l’ONU
Cela doit changer, dès septembre 2015, quand les Nations unies définiront les objectifs de développement durable jusqu’en 2030. Les adolescentes doivent figurer à tous les niveaux des politiques de développement, avec des indicateurs spécifiques.
Tel est l’objectif des ONG réunies à Paris et en particulier d’« Équilibres et populations ». Notamment pour prolonger l’action remarquable du Fonds des Nations unies pour la population (UNFPA), qui se bat sur le terrain pour que chaque grossesse soit désirée et sans risque.
Plusieurs initiatives vont dans ce sens : la « Girl Declaration » que les citoyens du monde entier sont invités à découvrir et à signer. Jusqu’à des séries télévisées, comme celle réalisée par l’ONG « RAES », diffusée en Afrique de l’Ouest. En effet, l’accès des adolescentes à l’éducation, à la santé et, in fine, à la citoyenneté impose le changement de mentalités.
Enfin, les représentants de l’ANI (Afrique et Nouvelles Interdépendances) et du Conseil parisien de la jeunesse ont rappelé que ce combat devait concerner tous les Français, car ces discriminations peuvent s’observer quotidiennement sur notre territoire. Et pas seulement dans les cités. Même si elles se manifestent de façon plus insidieuse.
Dr Alain Marié
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