Pour ceux qui sont à la fois amateurs de jeux vidéo et pourfendeurs de sexisme, il y aura eu, cette année, deux bonnes surprises au pied du sapin de Noël : la sortie de Rise of the Tomb Raider (Square Enix), deuxième volet depuis la refonte de la célèbre série en 2013, dans lequel l’archéologue Lara Croft semble avoir définitivement troqué son minishort moulant et ses seins en obus contre une parka d’aventurière ; et celle de FIFA 16 (Electronic Arts), jeu de football de référence qui permet pour la première fois de faire jouer une douzaine d’équipes nationales féminines. Par ailleurs, le dernier épisode d’Assassin’s Creed (Ubisoft) propose – enfin – un personnage féminin jouable, tout comme le nouveau Call of Duty (Activision)…
Un vent d’égalitarisme soufflerait-il dans l’univers très viril du jeu vidéo ? Ce serait trop dire. Mais la brise qui se lève est suffisamment forte pour susciter la colère des antiféministes. En témoignent les violentes menaces reçues, en 2014, par la blogueuse américaine Anita Sarkeesian, qui analyse et dénonce les stéréotypes féminins en vigueur dans les jeux. Ou encore les commentaires virulents qu’a suscités la mise en ligne en 2013, par la joueuse et blogueuse française Mar_Lard, d’un article intitulé « Sexisme chez les geeks : pourquoi notre communauté est malade et comment y remédier ».
Pour Fanny Lignon, qui a dirigé le récent ouvrage Genre et jeux vidéo (Presses universitaires du Midi, 268 p., 20 €), ces débats montrent qu’il est urgent d’interroger le secteur sous l’angle du genre. « Il suffit de taper sur Internet les mots-clés “sexisme” et “jeux vidéo”, et de surfer un peu sur les forums dédiés, pour se rendre compte que le problème doit être questionné », constate cette chercheuse en études cinématographiques et audiovisuelles à l’université Lyon-I. Question d’autant plus centrale que les smartphones, les tablettes et les consoles de salon ont modifié le profil type du « gamer ». « Aujourd’hui, précise-t-elle, on joue à tout âge, et à tous types de jeux, filles ou garçons, ensemble ou séparément, en couple, entre amis ou en famille. » Et l’on compte parmi ces joueurs presque autant de femmes que d’hommes.