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vendredi 16 septembre 2022

«L’histoire incroyable du sexe» en BD : l’érotisme en long, en large et en bulles

par Katia Dansoko Touré

Dans un roman graphique fourni, l’anthropologue et sexologue Philippe Brenot et l’autrice et dessinatrice Laetitia Coryn livrent une histoire des pratiques sexuelles à travers les âges et les civilisations. Drôle et pédago.
publié le 14 septembre 2022 à 22h35

Une fresque anthropologique et culturelle qui se penche sur les histoires millénaires des us et coutumes autour de la sexualité, de l’Europe au continent africain en passant par l’Asie ou le Moyen-Orient : il ne s’agit pas là d’un essai ou d’une somme historique, mais de l’Incroyable histoire du sexe (1)un roman graphique qui détaille, au fil de ses 365 pages, positions sexuelles, pratiques, mythes et légendes. Les corps nus, les poitrines, les parties génitales s’y affichent allègrement et on sourit d’une page à l’autre. Pour ses auteurs, Philippe Brenot, anthropologue et sexologue, et Laetitia Coryn, autrice et dessinatrice de bande dessinée, il s’agissait avant tout de faire en sorte, qu’à travers ces dessins, les sexualités soient abordées sans tabou. «Raconter tout cela avec la bande dessinée plutôt qu’à travers un essai permet de rendre ces histoires plus accessibles aux ados comme aux adultes, plus intéressantes et plus ludiques, explique Philippe Brenot qui est aussi l’auteur de nombreux ouvrages sur la sexualité. Et il était important que ce soit une femme et un homme qui racontent cette histoire du sexe.»

Critères de beauté, coutumes et interdits

Dans un propos riche et pédagogique, de larges thématiques autour de la sexualité sont abordés : règles, homosexualité, virginité, impact des religions monothéistes, liens entre art, sexe et littérature, critères de beauté, coutumes et interdits. Ainsi, «si en Afrique noire, les parties génitales étaient cachées, en Chine ou en Inde, ce sont les chevilles que les femmes ne montraient pas, raconte Philippe Brenot. Les tabous autour de la nudité existent aux quatre coins du globe. Il n’existe aucun endroit où l’on dit tout du sexe. Amour et pudeur sont des inventions humaines.»

A l’origine séparés en deux tomes – le premier, paru en 2016, était consacré à l’Occident, et le deuxième, en 2020, à l’Afrique et l’Asie – les auteurs ont fait le choix de les rassembler : «On vit une époque où la sexualité est synonyme d’orientation, d’identité et de fluidité des genres pour les jeunes générations. Un phénomène qui n’a pas encore vingt ans, mais dont on doit pouvoir analyser les sources, explique Philippe Brenot. Et c’est en comprenant les pratiques et traditions passées que l’on comprend les sexualités aujourd’hui.»

Influence des films hollywoodiens

Si la BD, augmentée pour cette dernière livraison de plusieurs autres parties (l’histoire de la sexualité au sein du monde juif, de l’Océanie et des Amériques), permet un véritable tour du monde de l’érotisme, elle offre aussi la possibilité de jauger l’évolution des rapports entre hommes et femmes, de l’origine de l’homme à nos jours. Les deux auteurs labourent, dans un premier temps, le champ occidental en douze chapitres. Puis défile, en sept chapitres, le reste du monde en passant par l’Afrique, l’Inde – où a été écrit le Kamasutra au IVe siècle (il comprend 64 positions de base et 300 destinées aux initiés, l’ouvrage propose d’ailleurs au lecteur d’en essayer 18 d’entre elles), le Japon, la Chine, mais aussi le Moyen-Orient.

Philippe Brenot explique aussi, qu’aujourd’hui, les pratiques sexuelles sont similaires dans les grandes villes de Paris à New York en passant par Conakry ou Saïgon. Il faut, selon lui, y voir l’influence des films hollywoodiens des années 40 et 50 qui ont notamment porté la grande révolution qu’a été le baiser. «Au début du XXe siècle, le baiser et les pratiques oro-génitales n’existaient pas, en grande partie, pour des raisons d’hygiène», rappelle le sexologue. Sont aussi abordés la liberté sexuelle des années 70, le combat pour la contraception, ou la question des mutilations génitales tant féminines que masculines dans certaines régions du monde. La BD se penche également sur le phénomène de «globalisation de la sexualité» mais, surtout, démontre comment s’est mise en place la domination masculine dans diverses sociétés. Et Philippe Brenot de conclure : «Cette domination progressive de l’homme sur la femme au cours des siècles est, pour moi, une maladie.»

(1) Editions Les Arènes


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