Par Magali Cartigny Publié le 07 août 2022
« Filles de pub » (4/7). Femme au volant, danger au tournant. L’image des femmes véhiculée par les campagnes de publicité automobile a souvent été dégradante, quand elles n’étaient pas comparées pour leurs courbes à de jolies berlines.
Le vent souffle en Arizona. Thelma et Louise ont largué leur moitié le temps d’une virée en décapotable qui a sacrément mal tourné. Dans la scène finale de ce film de Ridley Scott (1991), Susan Sarandon et Geena Davis s’élancent du haut du Grand Canyon, dans un ultime et fatal élan de liberté, à bord de leur Ford Thunderbird 1966.
Cette épopée initiatique, devenue culte, marque un tournant dans l’histoire de la représentation des femmes au cinéma. En s’agrippant au volant, les deux copines de l’Arkansas reprennent leur destin en main. Une petite révolution dans l’inconscient collectif puisque pendant des années, qu’il s’agisse du septième art ou de la publicité, la conduite, la vitesse, le voyage, l’idée même d’évasion, étaient réservés aux hommes.
Belles carrosseries…
Les femmes, elles, aimaient les grosses voitures… ou du moins les hommes qui les conduisaient. Incapables de faire un créneau ou de changer une roue, elles distinguaient assez mal la différence entre la boîte de vitesses et le frein à main. Quand elles prenaient le volant (mort au tournant), elles préféraient être dénudées, histoire de ne pas froisser leurs vêtements. Telle a été l’image des femmes véhiculée par les campagnes de publicité automobile, qui les ont par ailleurs historiquement cantonnées au rôle de passagère, voire d’accessoire. Les jeunes hôtesses sexy des salons de l’auto ont ainsi longtemps servi d’appât pour pousser ces messieurs à l’achat.
Pourtant, la première femme a eu son permis en… 1898. Son nom (on s’accroche !) : Marie Adrienne Anne Victurnienne Clémentine de Rochechouart de Mortemart, duchesse d’Uzès, dont l’histoire a retenu qu’elle fut aussi la première femme à recevoir un PV pour excès de vitesse (elle roulait à 15 km/h). En 1926, elle fonda l’Automobile Club féminin de France – même si les courses leur étaient interdites. A l’époque, et pour encore longtemps, la supposée coquetterie des femmes et le caractère salissant de l’automobile paraissaient incompatibles. Dans les années 1960, dans les salons de l’auto, on pouvait ainsi faire barboter dans la mousse des filles à la place du moteur pour prouver l’étanchéité du véhicule. Femme-objet, toujours : pendant des années, les spots pour voitures premium comparent explicitement les courbes féminines et la carrosserie, la poitrine aux suspensions.