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mercredi 22 mai 2024

Expo «Faisons corps» au Maif Social Club, fables d’anatomie

par Clémentine Mercier  publié le 6 mai 2024 

Festive et discrètement politique, l’exposition du Maif Social Club sort les corps des canons esthétiques formatés.

Des corps fragmentés, bioniques voire monstrueux… C’est le drôle de défilé que propose le Maif Social Club sous une boule à facette en forme de ballon de basket, signée Laurent Perbos (Basket Disco Ball).Dans une exposition festive mais aussi discrètement politique, les représentations du corps sortent des canons esthétiques formatés. Elles s’aventurent même sous la peau, à fleur de muscles, de chairs et d’organes.

Toucher, caresser et soulever des pans

Dans ce petit carnaval inclusif, on retiendra trois pièces. Tout d’abord AnatomIA de Roxane Andrés qui ouvre «Faisons corps». La designeuse s’intéresse au corps augmenté, aux greffes, aux prothèses et aux implants. A l’aide d’une intelligence artificielle, elle a dessiné une écorchée, une femme donc, ce qui n’est pas coutume – la plupart des modèles anatomiques sont masculins. Puis, elle a fait tisser à la main ce modèle, en une tapisserie pop et multicolore. L’œuvre est sensuelle puisqu’on peut la toucher, la caresser et même soulever des pans pour voir ce qu’il y a dessous.

Plus loin, dans le parcours, on tombe sur l’alioscopie (une image en relief) d’une tête en grand format. Là encore, sur ce visage, on distingue les muscles peauciers et masticateurs, le crâne et les globes oculaires. Mais un visiteur, immobile, planté juste devant la photo, gêne le regard. Un peu goujat, il s’incruste dans notre champ de vision. Ce curieux discourtois fait partie de l’œuvre le Curieux et Human II d’Elisabeth Daynès, sculpture hyperréaliste d’un homme qui regarde la photo en relief de Toumaï, une doyenne de l’humanité, remontant à 7 millions d’années. Paléoartiste pour les musées d’histoire naturelle, Elisabeth Daynès interroge, avec cette pièce personnelle, les normes esthétiques à travers le temps. Peut-on trouver belle une femme vieille de 7 millions d’années ? Qui décide du beau ?

Terrifiantes illustrations anatomiques

Certainement pas Daisy Collingridge, artiste britannique aux 53 200 abonnés sur Instagram. Jamais elle n’ira forcer qui que ce soit à aimer ses œuvres, consciente de leur étrangeté. Lean on Me (Burt and Hillary) représente deux écorchés en tissu rose, avachis et obèses. Ce sont aussi des costumes grotesques qu’elle enfile de temps en temps pour faire des photos. L’artiste a réalisé toute une panoplie de figures de ce type.

Elevée dans une famille de médecins, Daisy Collingridge s’inspire de leur façon différente de voir le corps humain. Petite fille, elle fabriquait déjà ses nounours puis elle a étudié le stylisme pour finalement pratiquer la couture à sa façon. Elle s’inspire aussi des terrifiantes illustrations anatomiques, notamment celles du médecin du XVIe siècle Andreas Vesalius. «J’essaye d’adopter sa ligne, entre l’humoristique et l’horrifique.» Ce que pense sa famille de ses poupées musculeuses en coton ? Qu’elles sont «très très très bizarres». Mais ils font corps.

«Faisons corps» au Maif Social Club jusqu’au 4 janvier 2025.


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