par Elsa Maudet publié le 26 décembre 2023
Les corps d’une femme et de ses quatre enfants ont été découverts lundi 25 décembre dans leur domicile de Meaux, en Seine-et-Marne, sur ce que le procureur de la République a qualifié de «scène de crime d’une très grande violence». Le père de famille, arrêté dès ce mardi chez son père, à Sevran (Seine-Saint-Denis), est soupçonné d’être l’auteur de ce quintuple homicide, commis le jour de Noël. Maëlle Noir, membre de la coordination nationale du collectif #NousToutes, rappelle que les périodes de vacances, et notamment de fêtes, voient le nombre de féminicides augmenter et qu’en l’absence d’une revalorisation du budget dédié à la lutte contre les violences faites aux femmes, la situation ne pourra guère s’améliorer.
Les fêtes sont-elles une période particulièrement à risque en matière de féminicides ?
Oui, les périodes de fêtes et, plus généralement, les périodes de vacances sont considérées comme étant plus à risque. Cet été, on a vu une augmentation des féminicides et on anticipe que, pendant les fêtes, ça va être la même chose ; c’est une tendance qui se vérifie depuis longtemps. La situation à Meaux nous rappelle que 75 % des féminicides ont lieu dans la sphère conjugale et encore plus dans la sphère familiale. Or les fêtes, les vacances, c’est un moment où on se retrouve dans cette sphère familiale, souvent à huis clos.
Outre ce huis clos, qu’est-ce qui peut expliquer cette augmentation des féminicides ?
Durant les fêtes de Noël – pour ceux qui célèbrent Noël –, il y a souvent une injonction à se présenter comme une famille parfaite, ne pas faire de vagues, ne pas se disputer en public. Ça va verrouiller la parole des victimes, qui peuvent encore moins parler en période de fêtes car c’est un moment d’isolement, où on a moins de liens avec son environnement professionnel, parce qu’on prend des vacances, et avec son environnement amical, parce que les fêtes sont un moment qu’on passe en famille.
Le problème est également que les tiers pouvant aider (associations d’aide, avocats…) sont dans le même temps moins nombreux, car en congés. Existe-t-il un moyen de remédier à cela ?
Les associations d’aide aux victimes peuvent effectivement être en sous-effectif. C’est un problème structurel toute l’année, mais d’autant plus dans les périodes creuses de vacances. Les organisations sont largement sous-financées et croulent sous les demandes alors qu’elles n’ont pas suffisamment de personnels et de ressources pour pouvoir y répondre. Sans parler des dispositifs de mise à l’abri des victimes, dont les besoins sont sous-évalués toute l’année, et des places d’hébergement d’urgence, insuffisantes en France. On demande l’augmentation du budget annuel alloué à la lutte contre les violences : il est de 150 millions d’euros aujourd’hui [en réalité 184,4 millions, ndlr] alors que le dernier rapport de la Fondation des femmes chiffre les besoins à 2,6 milliards. On est extrêmement loin du compte.
Il faudrait renforcer la prévention des violences intrafamiliales au moment des fêtes, en rappelant aux victimes qu’elles peuvent appeler le 3919 et en formant les forces de l’ordre et les personnels de la justice, si certaines victimes trouvent le courage d’aller porter plainte à cette période. Les solutions sont connues, mais très difficiles à mettre en place sans budget adapté. Avec le budget actuel, c’est sûr que les violences ne vont pas diminuer.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire