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jeudi 14 novembre 2019

Loyale, précise et indépendante : comment l'information peut diminuer l'hésitation vaccinale

PAR 
COLINE GARRÉ -  
PUBLIÉ LE 14/11/2019


Crédit photo : Phanie
Abandonner une communication globalement rassurante au profit d'une information loyale et précise sur les bénéfices-risques de chaque vaccin, pourrait dissiper l'hésitation vaccinale en France, est-il ressorti de deux tables rondes organisées ce 14 novembre par l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST).
La France se distingue en effet par la prégnance de cette hésitation vaccinale – à ne pas confondre avec le rejet radical de toute vaccination que brandit une minorité de militants. Selon Santé publique France, un brusque décrochage de l'adhésion à la vaccination a eu lieu dans les années 2010 avec seulement 60 % de Français s'y déclarant favorables, contre plus de 90 % en 2000. Si elle est remontée depuis, la proportion des citoyens favorables à la vaccination peine à dépasser les 80 % en 2017. Quant aux parents, ils ne sont que 48 % en 2019 à se dire très favorables à la vaccination, 48 autres pour cent ayant une position contrastée selon les vaccins. Selon l'ONG Wellcome, 33 % des Français auraient des doutes sur la sécurité des vaccins, et 19 % sur leur efficacité. Des chiffres quasi inédits au sein d'un panel de 144 pays.

Rassurer n'est pas informer
En 2016, la concertation citoyenne sur la vaccination conduite par le Pr Alain Fischer avait déjà souligné la nécessité d'une information indépendante et transparente. Depuis ont été lancés le site vaccination-info-service.fr ainsi que des campagnes officielles d'information, pour accompagner l'extension de l'obligation vaccinale au 1er janvier 2018.
« C'est moins magique qu'on pourrait s'y attendre », prévient Coralie Chevallier, chercheuse en sciences cognitives. Diffuser des messages rassurants pourrait se révéler contre-productif, explique-t-elle, le destinataire pouvant s'interroger sur les raisons conduisant les pouvoirs publics à communiquer.
En outre, « les gens ne sont pas prêts à entendre des informations allant à l'encontre de leurs croyances », fait valoir Coralie Chevallier. De fait, de l'aveu de SPF, les 5 % de Français qui ont consulté le site officiel sur la vaccination ne sont certainement pas les plus réticents. « Mieux vaut informer des risques liés à une maladie que tenter de rassurer sur les effets secondaires d'un vaccin », conseille la spécialiste.
Loyauté et précision de l'information
Les généralistes, à travers la voix du Dr Henri Partouche, membre du conseil scientifique du Collège des médecins généralistes enseignants (CNGE), sont les premiers à souhaiter des « données fiables, claires, actualisées sur les maladies à prévention vaccinale et sur le rapport bénéfice-risque de chaque vaccin – et non sur la vaccination en général ». L'objectif : non convaincre le patient, mais décider ensemble, indique le Dr Partouche, en rappelant au passage que le CNGE s'était opposé à l'extension de l'obligation vaccinale au nom de cette approche « patient ».
Cette information précise, vaccin par vaccin, est d'autant plus nécessaire que, comme le montre le sociologue Jérémy Ward, le milieu des militants antivaccins s'est transformé. Analysant leur présence dans les médias depuis 1990, il a ainsi observé que la majorité d'entre eux prend ses distances à l'égard des antivaccins radicaux, s'attachant à ne critiquer que telle valence ou tel adjuvant, tout en se référant à des mouvements populaires (santé environnementale plus que médecine parallèle, par exemple).
Médias et école à ne pas négliger
Si les médecins restent la source d'information inspirant le plus confiance aux Français en matière de vaccination, les médias ont aussi leur rôle à jouer, a indiqué le chercheur en sciences de l'information et de la communication Cyril Drouot. Il a en effet montré, à partir de l'analyse de la communication autour du vaccin contre les papillomavirus humains (HPV) sur une cohorte de près de 20 000 étudiants, que les discours suscitant l'adhésion sont ceux qui font appel à l'émotion, tout en vulgarisant des données scientifiques. « Ce que fait le journaliste généraliste lorsqu'il met en scène des chiffres au sein d'un lexique esthétique », laissant ainsi la liberté au lecteur-patient de ses choix, a-t-il expliqué. Quant aux institutions, elles auraient tout à gagner à s'inspirer de ces stratégies pour rendre leurs discours toujours plus audibles, note-t-il.
Enfin, le Pr Alain Fischer a plaidé pour le développement de la vaccination à l'école, qui serait l'occasion de sensibiliser les plus jeunes aux notions d'ordre de grandeur, de bénéfices-risques, de causalité, concomitance, coïncidence ou corrélation, dont la confusion fait le lit de l'hésitation vaccinale. 

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