De nombreux schizophrènes demeurent non traités. Ce constat vaut particulièrement pour les régions rurales de la Chine, moins concernées par les progrès de la prise en charge moderne, selon les standards de la « psychiatrie communautaire »[1] en Occident.
Pour approfondir ce thème, une enquête épidémiologique a été réalisée dans le secteur rural de Chengdu (Chine) sur plus de 120 000 sujets (âgés de 15 ans et plus) parmi lesquels 510 ont été diagnostiqués schizophrènes. Les auteurs ont comparé pendant 14 ans (de 1994 à 2008) l’évolution des patients traités par des médicaments neuroleptiques à celle de ceux demeurant sans traitement.
Ils observent qu’une part importante de patients ne reçoit aucun traitement antipsychotique. Mais cette proportion diminue progressivement au cours du temps : 30,6 % en 1994, 25 % en 2004 et 20,4 % en 2008. Comparativement aux patients traités, ceux n’ayant jamais reçu de traitement neuroleptique étaient (en 2008) de façon significative plus âgés, célibataires, vivaient seuls ou dans des familles plus réduites, se trouvaient plus souvent sans domicile fixe, exposés à une surmortalité pour d’autres raisons, et n’étaient pris en charge par aucune structure de soins.
Une amélioration spontanée dans près d’un tiers des cas, tout de même
La fréquence des rémissions partielles ou complètes se révèle plus importante chez les patients traités (57,3 %) que chez ceux jamais traités (29,8 %), population où une amélioration spontanée concerne toutefois, ainsi, près d’un tiers des intéressés. Sans surprise, les facteurs susceptibles de prédire une absence de traitement en 2008 incluent « une absence de traitement, une absence de prise en charge et un mauvais état de santé mentale », quatorze ans plus tôt.
Cette étude confirme que, dans les zones rurales de Chine (et probablement dans d’autres parties du monde), de nombreux patients atteints de schizophrénie ne reçoivent toujours aucune prescription médicamenteuse avec, de façon évidente a priori, une aggravation concomitante de leur état au fil des ans. Comme leurs confrères occidentaux, les auteurs estiment donc que « la disponibilité de structures spécialisées, l’intervention des proches et l’existence d’une couverture d’assurance-maladie » constituent des facteurs essentiels pour un diagnostic plus précoce, un traitement effectif, et une meilleure réinsertion sociale des malades.
Dr Alain Cohen
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