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Articles, témoignages, infos sur la psychiatrie, la psychanalyse, la clinique, etc.

lundi 7 mai 2012


Les Livres de Psychanalyse

L'Unebévue N°29 : LACAN DEVANT SPINOZA, CRÉATION/DISSOLUTION

L'Unebévue 2012


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APPEL À CONTRIBUTION

Vendredi 18 mai 2012 

Patients et traitements psychiatriques à l’écran : pratiques militantes, soins et processus de subjectivation

Publié le mardi 06 mars 2012 par Loïc Le Pape
RÉSUMÉ
Le colloque transdisciplinaire « patients et traitements psychiatriques à l’écran : pratiques militantes, soins et processus de subjectivation » (5 et 6 décembre 2012) a pour objectif d'étudier l'évolution des représentations du patient psychiatrique et des traitements en santé mentale à l'écran. On analysera l'émergence de nouvelles subjectivités et récits de l'intime qui peuvent s'inscrire dans une démarche de réhabilitation de pratiques médicales institutionnelles ou bien traduisent la réappropriation de l'outil filmique par des collectifs militants.
ANNONCE

Argumentaire:

Patients et traitements psychiatriques à l’écran : pratiques militantes, soins et processus de subjectivation.

La mise en scène de l’univers asilaire

A partir des années 1960, plusieurs films mettant en scène l’internement psychiatrique reçoivent un excellent accueil de la critique et du public. De nombreux réalisateurs, s’inscrivant dans la mouvance du Nouvel Hollywood, se risquent à traiter le thème de la folie à travers une démarche visuelle et artistique non-consensuelle. Qu’ils adoptent une posture d’ethnographe, tel Frederick Wiseman pour son documentaire Titicut Follies (1967), ou optent, à l’instar de Milos Forman avecVol au-dessus d’un nid de coucou (1975), pour l’adaptation cinématographique d’un roman, ces cinéastes s’attachent à montrer et dénoncer la violence inique des traitements imposés aux patients : le lieu de soin est dépeint, dans ces œuvres, comme une institution malade. Cette production cinématographique s’inscrit dans une tradition remontant aux années 1940 qui, avec des productions appartenant à des genres différents – du fantastique de Bedlam (inspiré de l’œuvre picturale A Rake’s Progress de William Hogarth) au drame réaliste de The Snake Pit(Anatole Litvak, 1948) – retranscrivent l’expérience de l’internement à travers le regard de personnes présentées comme victimes des contraintes normatives imposées par l’institution psychiatrique et des soignants peu avenants. La portée dénonciatrice primant sur la retranscription de l’expérience individuelle subjective de la pathologie mentale, le héros principal est bien souvent un non-malade : un écrivain rêvant de gagner le prix Pulitzer en « s’infiltrant dans l’univers asilaire » pour en livrer un récit qui fera date dans Shock Corridor de Samuel Fuller (1963) ; ou bien un marginal qui pense, en se faisant interner, échapper à la prison (Vol au-dessus d’un nid de coucou).

Filmer la folie, entre fiction et documentaire

La folie à l’écran : un motif récurrent auprès de cinéastes « engagés » ? Certainement, si l’on songe à Family Life de Ken Loach (1971), violente chronique de la descente aux enfers d’une jeune schizophrène qui montre que des facteurs familiaux couplés au manque d’empathie des praticiens peuvent aggraver voire provoquer des troubles mentaux. Si la fiction cinématographique pointe directement du doigt l’institution, se faisant l’écho des écrits des représentants les plus virulents du mouvement antipsychiatrique anglo-saxon (Laing, Cooper), le documentaire vise à faire apparaître les expériences menées par des psychiatres ou éducateurs désireux d’améliorer le sort de leurs patients en leur offrant plus de liberté et d’autonomie. On pensera ainsi à Ce gamin-là de Renaud Victor (1975), qui retrace l’expérience de Fernand Deligny avec des enfants autistes, ou à Fous à délier de Marco Bellochio (1975), qui enquête sur le parcours de trois ex-patients employés à l’usine dans l’Italie de Franco Basaglia. Au cours des années 1990 d’autres réalisateurs, tels que Benoît Dervaux, Jean-Michel Carré et Nicolas Philibert, se proposent de faire le bilan de l’antipsychiatrie ou de la psychothérapie institutionnelle. La clinique de la Borde et le Coral, lieu de vie qui accueille indifféremment psychotiques et jeunes délinquants, ouvrent ainsi leurs portes aux cinéastes qui, à travers des films à la croisée du documentaire et de la fiction (comme par exemple Visiblement je vous aime, 1995), donnent la parole aux soignants et patients.

Cadrage

La folie à l’écran : trois axes de recherche

Les travaux de ce colloque multidisciplinaire, ouvert aux contributions d’historiens, sociologues, anthropologues, philosophes et cinéastes, se déclineront selon trois axes de recherche.


Il s’agira en premier lieu d’étudier les relations entre l’histoire de la folie mise à l’écran – qu’il s’agisse de la fiction cinématographique ou bien du documentaire ethnographique ou journalistique – et l’histoire des changements survenus au sein du monde psychiatrique tout au long du dernier demi-siècle. On s’interrogera à la fois sur le film et l’enquête filmée en tant que moyens « engagés » de réhabiliter une pratique ou une éthique des soins en psychiatrie (La moindre des choses, La devinière, Visiblement je vous aime, Valvert, la série italienne Il était une fois la cité des fous de Marco Turco), et sur le rôle qu’ils ont pu éventuellement jouer dans l’univers du militantisme en psychiatrie. Peut-on dès lors parler d’une réception de ces films auprès des usagers militants ? Certains films ont-ils contribué à alimenter le désir de dénonciation des traitements jugés dégradants et coercitifs ?


Le deuxième axe s'interrogera sur les usages sociaux et politiques de la folie mise à l’écran, et notamment sur les films produits par les acteurs (psychiatres, usagers, familles) du champ psychiatrique.


De quelles manières les images de la folie peuvent-elles participer à la construction des controverses morales et politiques propres au monde psy (on songera à la polémique autour du documentaire sur l’autisme, Le Mur) ? Comment sont-elles mobilisées dans une cause et ainsi appropriées par de différents acteurs, qu’il s’agisse de militer contre la « dérive » sécuritaire de la psychiatrie contemporaine, comme l’a récemment fait en France le documentaire Un monde sans fous, ou bien au contraire de dénoncer les politiques de désinstitutionalisation et de plaidoyer pour l’usage de l’électro convulsivothérapie en montrant la souffrance des familles, comme le très discuté reportage brésilien Omissão  de socorro : pacientes psiquiátricos tomam a palavra (Omission de prêter secours : des patients psychiatriques prennent la parole) ?


Le troisième axe portera enfin sur la question des processus de subjectivation. A l’heure où les usagers, réunis au sein d’associations, mettent en scène leurs parcours – souvent douloureux – de la dépendance à l’autonomie et décrivent, dans des documentaires de commande publique ou militants, leur passé de malade et leur présent d’usager ou de survivant, le fou et les soins en psychiatrie ont-ils cessé d’être fantasmes ? La valeur de preuve attenante aux témoignages rassemblés contribue-t-elle à produire de nouvelles subjectivités qui doivent composer avec les contingences des productions cinématographiques et audiovisuelles ?


Comment les éléments autobiographiques personnels sont-ils mobilisés pour traiter, non plus de la folie, mais du handicap psychique, concept porté en France par l’adoption de la nouvelle législation sur le handicap de 2005 ? La prise de parole des usagers devant la caméra modifie-t-elle leur relation à la maladie ? Et dans quelle mesure l’appropriation des moyens visuels par les associations d’usagers ne reflète-t-elle pas un retour du politique dans la sphère du privé, privant parfois ceux qui font l’expérience de la maladie mentale et des soins en psychiatrie, de la possibilité de produire des objets cinématographiques relevant réellement de l’intime ?


Dans ce contexte, un intérêt particulier sera également accordé à toute contribution portant sur les dispositifs narratifs et les moyens techniques (split screen, musique, ellipses…) par lesquels l’expérience du trouble mental peut être traduite à l’écran.

Liste de films indicative:

The Snake Pit, Anatole Litvak, 1948 ; Titicut Follies, Frederick Wiseman, 1967 ; Family Life, Ken Loach, 1971 ; Fous à délier, Marco Bellochio, 1975 ; Vol au-dessus d’un nid de coucou, Milos Forman, 1975 ;  La moindre des choses, Nicolas Philibert, 1996 ; La devinière, Benoît Dervaux, 1999 ; Julien Donkey Boy, Harmony Korine, 1999 ; The White Sound (Das Weisse Rauschen), Hans Weingartner, 2001 ; Clean, Shaven, Lodge Kerrigan, 1995 ; Visiblement je vous aime, Jean-Michel Carré, 1995 ; Valvert, Valérie Mréjen, 2009 ; La Pecora Nera, Ascanio Celestini, 2010 ;C'Era Una Volta La Citta Dei Matti, Marco Turco, 2010 ; Les Voix de ma sœur, Cécile Philippin, 2010 ; Un monde sans fous, Philippe Borrel, 2010 ; Le Mur, Sophie Robert, 2011...

Modalités:

Vos propositions de communications doivent nous parvenir sous la forme d'un résumé de 450 mots maximum envoyé en pièce-jointe aux adresses suivantes: nausica.zaballos@ehess.fr; manna@ehess.fr et coffin@pouchet.cnrs.fr.

Date limite de réception des résumés: 18 mai 2012.

dimanche 6 mai 2012


Étonnantes mystifications de la psychothérapie autoritaire

Étonnantes mystifications de la psychothérapie autoritaire


Thème: Autisme
Jean-Claude Maleval
 Avril 2012
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Psychothérapie institutionnelle d'enfants-erès-9782749231976



Psychothérapie institutionnelle d'enfants
L'expérience KaPP


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Auteur :  |

Editeur : ERÈS

Collection : EMPAN

Fruit d'un travail collectif, cet ouvrage témoigne d'une expérience de psychothérapie institutionnelle dans un hôpital de jour, le KaPP, accueillant depuis dix ans des enfants de 0 à 13 ans en grande difficulté. Qu'ils soient atteints d'autisme ou de psychose, qu'ils présentent un retard cognitif, une violence extrême ou une anorexie mentale, ou qu'ils soient victimes de maltraitance, les enfants ainsi que leurs familles bénéficient au KaPP d'une attention particulière à leur souffrance. Dans le quotidien, l'anecdotique, le fugace, les soignants croisent leurs regards pour approcher la singularité de chaque enfant. Aider l'enfant à accomplir sa tâche d'humanisation implique de lui permettre de grandir au niveau de ses émotions, son comportement, ses compétences relationnelles et cognitives, ses apprentissages.

Au KaPP, on pratique une multidisciplinarité interactive dans la prise en charge. Chacun travaille en lien avec les collègues, pas seulement lors des réunions d'équipe, mais aussi en coanimant activités et ateliers, parfois même en invitant des parents... Le projet thérapeutique est en construction permanente. Les principes en sont connus et forment la culture thérapeutique de l'équipe qui doit faire preuve de créativité pour garder le projet vivant.


«Il faut humaniser notre système de santé»

TRIBUNE Dans cette tribune, l'urgentiste Patrick Pelloux, rejoint par d'autres médecins, appelle à voter pour François Hollande dimanche, pour un renouveau du système de santé et de l’hôpital public.

Les questions de santé ont été très peu abordées lors de cette campagne pour l’élection présidentielle. Pourtant la santé est l’une des préoccupations principales des Français et elle a semblé être cantonnée à des débats de spécialistes. Or, il s’agit bien de choix politiques ultralibéraux qui nous ont conduits, en dix ans, à reculer sur les valeurs humanistes et les acquis du Conseil national de la résistance en matière de santé et de protection sociale.
La question fondamentale est de savoir si le système économique est au service du progrès de l’humanité ou si les femmes et les hommes doivent subir l’économie, en l’occurrence une marchandisation de la santé, par exemple avec la tarification à l’activité dans les établissements de santé.
Le travail doit être débuté afin d’humaniser notre système de santé. Jamais dans l’histoire de l’humanité nous n’avons eu une telle espérance de vie issue de l’œuvre civilisatrice. Mais en même temps, les inégalités se sont creusées. La santé est devenue une source de profit. L’idée d’un hôpital entreprise inclus dans la loi Hôpital, patient santé et territoire (HPST) est en contradiction totale avec l’hôpital public, élément majeur de stabilité sociale et expression de ce que la science peut faire pour améliorer la vie des femmes et des hommes. Des régressions inquiétantes montrent qu’il y a urgence à changer, comme le recul de la France de la 7e à la 20e place en Europe pour la périnatalité ou le recul de l’espérance de vie en bonne santé.
Enfin au cours de ces dix ans, le progrès social pour les personnels hospitaliers a été brutalement stoppé avec une aggravation majeure des conditions de travail. Les patients et leurs familles le constatent au quotidien: surcharge des urgences, manque de lits d’hospitalisation, difficultés d’accès aux soins (notamment en psychiatrie), difficultés pour la prise de rendez-vous dans des spécialités comme l’ophtalmologie, problèmes de prise en charge des personnes âgées ou des adultes handicapés…
Mais il n’y a pas que l’hôpital: il faut une véritable articulation des professions de santé entre ceux qui exercent en ville et dans les établissements de santé. Il est nécessaire de créer une université de la santé ouverte à toutes les professions incluant la formation continue indépendante. Il convient de développer la santé dans les écoles, au travail, dans les prisons, mais aussi de mener des politiques de prévention… Tous ces éléments ne font qu’un: celui d’un système de santé moderne et conquérant des nouveaux possibles. Cela ne peut plus continuer ainsi ! Un changement radical de la politique de santé est indispensable. Même si le programme de François Hollande est perfectible, il est porteur d’espérance pour un renouveau du système de santé et de l’hôpital public. Nous voterons donc pour François Hollande, tout en restant très vigilants devant l’urgence humaniste à porter dans notre pays.
Patrick Pelloux (urgentiste, Paris), Adrienne Reix (urgentiste Bordeaux), Jean-Luc Baudel (réanimateur médical, Paris), Dalila Serradj (urgentiste Dijon), François Danet (psychiatre, chercheur en sociologie Lyon), Christophe Prudhomme (urgentiste syndicaliste CGT, Bobigny), James Brodeur (anesthésiste réanimateur Bourges), Frederic Pain (urgentiste Parthenay), Jean-Claude Penochet (psychiatre Montpellier), Fabrice Venier (urgentiste Rouen), Carole Fink (soins palliatifs, Lons le Saunier) Jacques Trevidic (pharmacien Caudan), Séraphin Collé (médecin généraliste Toulouse), Olivier Varenne (cardiologue Paris), Karim Boudemia (urgentiste Dijon), Marcel Viallard (Anesthésiste Paris), Daniel Jannière (anesthésiste réanimateur Paris) , Julie Rivière (Gynéco-Obstétricienne Paris) Fabrice Vallée (Réanimateur Paris) Didier Menard (médecin généraliste, Seine-saint-Denis), Pierre Paresys (psychiatre de secteur, Bailleul), Dr Philippe Crova (urgentiste Bourgoin-Jallieu) Christophe Jedrecy (urgentiste, Dourdan).
Psychiatries dans l’histoire
Actes du 6e congrès de l’Association européenne pour l’histoire de la psychiatrie publiés sous la direction de Jacques Arveiller.
`Collection Symposia.
Ce volume, rassemblant des contributions au 6e congrès de l’Association européenne pour l’histoire de la psychiatrie, aborde de façon très variée comment la psychopathologie et la psychiatrie se sont incarnées et déployées dans diverses périodes de l’histoire, de l’Antiquité à la période contemporaine, et dans des zones géographiques elles aussi variées (les pays d’Europe, mais aussi ceux d’Amérique du Nord et du Sud). On y insiste sur les échanges et influences entre ces pays et ces zones, tant sur le plan des théories que sur celui des pratiques. Ces contributions se regroupent autour de grandes thématiques concernant la psychiatrie (cliniques et psychopathologies, psychiatrie de l’enfant, psychanalyse et psychiatrie, institutions psychiatriques, thérapeutiques psychiatriques, psychiatrie légale et écritures de la psychiatrie).

Consulter l’ouvrage
2008, 16 x 24, br., 478 p.
978-2-84133-331-8
F205993

La psychiatrie selon feu Félix Guattari (2)

Rev Med Suisse 2012;8:

Un livre apparaît et des souvenirs émergent (Rev Med Suisse 2012;8:870-1). C’était il y a un quart de siècle, ou presque. En France, un président de la République affiché socialiste venait d’être réélu. L’époque était encore de celles, attachantes et précieuses, où les intellectuels se piquent de psychiatrie. Effet de mode ou symptôme d’une société en quête d’identité ? Parmi eux, Félix Guattari qui, en marge de ses activités philosophiques et littéraires, aura travaillé de 1955 à 1992 au sein de la célèbre clinique privée deLa Borde située à Cour Cheverny (Loir-et-Cher). Un tout récent ouvrage[1] nous rappelle avec acuité et cet homme et cette époque.
Sans reprendre le refrain (qui finira bientôt par lasser) de l’âge d’or (et de son c’était-mieux-avant), fort est bien d’observer qu’en ces temps héroïques les croisements du journalisme et de la psychiatrie pouvaient ne pas être inféconds. Après avoir fait (avec Guattari le soignant) le chemin de La Borde financièrement étranglée, nous nous étions retrouvés peu de temps plus tard. La Borde vivait encore ; Ronald Laing venait de mourir. C’était le 23 août 1989. Guattari n’avait plus que trois ans à vivre. Il nous avait accordé un entretien qui fut publié dans Le Monde du 6 septembre 1989.
«Au début de ce mois, j’ai été interviewé (…) pour Le Monde, à l’occasion de la disparition de Ronald Laing, écrira-t-il dans un texte (intitulé Journal de Lebos et reproduit dans l’ouvrage cité). Pour la énième fois, j’ai été amené à expliquer l’impasse que connaît la psychiatrie française – malgré ses efforts de modernisation, malgré les expériences intéressantes du "secteur" extrahospitalier – par l’archaïsme de ses structures. L’esprit corporatiste de ses soignants, la passivité de l’opinion… (…). A ma grande surprise, cette interview a suscité quelques réactions et fait quelques vagues.»
Ronald Laing était mort après Franco Basaglia (1980) et David Cooper (1986). Etait-ce donc, en 1989 la disparition de l’antipsychiatrie ? Que pouvait nous dire sur ce point le psychanalyste qui avait été le principal animateur, avec les docteurs Jean Oury et François Tosquelles, de l’école française de psychothérapie institutionnelle ? Extraits :
«Avez-vous en 1989 le sentiment d’être un has been ?
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samedi 5 mai 2012

Plus d'un bébé sur dix naît prématurément dans le monde

Le Monde.fr | 

Taux de naissance prématurée dans le monde, en 2010
Taux de naissance prématurée dans le monde, en 2010 | Le Monde

Quinze millions de bébés naissent trop tôt chaque année dans le monde, selon un rapport réalisé conjointement par une cinquantaine d'associations (March of Dimes, Le Partenariat pour la santé de la mère, du nouveau-né et de l'enfant, Save the Children...) et l'Organisation mondiale de la santé (OMS) et rendu public mercredi 2 mai. Cela représente plus d'une naissance sur dix. Plus d'un million d'enfants meurent chaque année du fait des complications liées à leur naissance prématurée (à moins de trente-sept semaines de gestation), sans compter les incapacités à vie dont souffrent beaucoup de ceux qui survivent.
S'inscrivant dans le cadre de l'initiative " Chaque femme, chaque enfant "lancée par le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, le rapport, intitulé" Arrivés trop tôt ", pointe la tendance à l'augmentation du taux de naissance prématurées dans pratiquement tous les pays disposant de données fiables.
Cependant, si 60% des naissances prématurées surviennent en Afrique et en Asie du Sud, le Brésil, l'Inde, le Nigéria mais aussi les Etats-Unis figurent parmi les dix pays détenant les taux de prématurité les plus élevés. En 2010 aux Etats-Unis, près de 12 bébés sur 100 sont nés prématurément, soit une augmentation de 30% par rapport à 1981.
DES DISPARITÉS SOCIALES DÉTERMINANTES POUR LE TAUX DE SURVIE
Les causes de la prématurité sont indéterminées dans près de la moitié des cas. Parmi celles connues figurent le jeune âge et un faible poids de la mère, des intervalles courts entre les grossesses, mais aussi les grossesses multiples, en particulier liées à l'implantation de plusieurs embryons dans le cadre de l'assistance médicale à la procréation.
Les disparités sociales sont bien sûr déterminantes pour le taux de survie, souligne le rapport : " La moitié des bébés nés à la 24e semaine [quatre mois trop tôt] survivent dans les pays à revenu élevé, mais dans les milieux à faibles revenu, la moitié des bébés nés à la 32e semaine [deux mois trop tôt] continuent de mourir en raison d'un manque de soins réalisables et abordables, comme le maintien du bébé au chaud, le soutien à l'allaitement maternel et les soins de base pour traiter les infections et les problèmes respiratoires. "
Le rapport s'appuie sur des données indiquant que " les décès provenant de complications liées aux naissances prématurées peuvent être réduits de plus des trois quarts sans recourir à des soins néonataux intensifs. "Sauver un très grand nombre des bébés prématurés n'est donc pas du tout hors d'atteinte.
Aborder l'enjeu des naissances prématurées paraît indispensable pour accomplir des progrès à l'échelle mondiale en matière de survie et de santé de l'enfant d'ici 2015, année fixée pour la réalisation des Objectifs du millénaire pour le développement, insiste le rapport.

Le porno change-t-il les ados ?

LE MONDE CULTURE ET IDEES | 
Tapez "femme" sur Google. Sur la colonne centrale, on lit : "Femme Wikipédia", "Femme Evène", "Femme Actuelle". A droite, colonne des annonces : "Femmes canon en cam", "Elles couchent". Ou "Femmes célibataires" sur le site de rencontres pour célibataires Meetic. Clic sur "Elles couchent. Batifolage.com" : un couple à moitié nu. "Fellation, sodomie, amateur, partouze, gros seins, éjac faciale." C'est un site porno. Avec "Galerie vidéo", un clic, des centaines de photos défilent. A côté du X classique, beaucoup de hardcore : triple pénétration, poing dans l'anus, bouteille dans le sexe. Tapez maintenant "Amour". On lit à droite "Meilleurs films sensuels. La brocante", un clic, c'est un nouveau site porno déguisé. Asiatiques. Beurettes. Blondes. Sado maso...
Les fillettes de 11 ans qui ont surfé sur le Net pour leur rédaction sur la Saint-Valentin ont-elles regardé ? Possible. Les films X sont en accès libre sur Internet. Souvent gratuits. Les mineurs regardent massivement. En 2004, selon le CSA, 80 % des garçons et 45 % des filles de 14 à 18 ans avaient vu un film X dans l'année. Un garçon sur quatre, une fille sur cinq en avaient visionné au moins dix. Selon une enquête du docteur Claude Rozier, menée en Ile-de-France en 2004, à 11 ans, un enfant sur deux a vu un film pornographique sur le Net. En CM2 (9-10 ans), 50 % des garçons et 25 % des filles.
Comment réagissent-ils au premier visionnage, à 10-11 ans ou plus jeunes ? Une enquête américaine le précise : ils "sont surpris et ont peur", se sentent "embarrassés" ou "coupables et confus". La moitié des filles se disent "dégoûtées", un quart "choquées", un quart "surprises". Mais dès 13 ans l'attitude change : le porno "distrait" 50 % des garçons, "plaît" à 30 %, et 20 % le classent dans les "favoris".
Depuis qu'avec Internet le porno est entré dans la vie des mineurs, il ne se passe pas un jour sans qu'un colloque de psychologie, une convention scolaire, un service gouvernemental, des féministes ou des politiques en débattent. Inquiets. Parfois indignés. Souvent dépassés. Dans une enquête sur la contraception des adolescentes, le professeur Israël Nisand s'en prend violemment à l'impact de la pornographie sur les mineurs.
"PORNIFICATION"
Dans un rapport réalisé pour le gouvernement actuel, la sénatrice (UMP) Chantal Jouanno dénonce, elle, "l'hypersexualisation" des filles de 8-12 ans, parlant de "pornification" : "Nous n'avions pas conscience que les codes de la pornographie ont envahi notre quotidien. (...) S'agissant des enfants, elle renvoie à l'hyperérotisation de leurs expressions, postures ou codes vestimentaires."
La sénatrice s'est appuyée sur les travaux de nombreux pédopsychiatres, sociologues et spécialistes des médias. Que montrent-ils ? Avant la puberté, dès le CM1, beaucoup de fillettes se mettent du brillant à lèvres, portent des jeans slim, des minijupes, des culottes qui laissent les fesses apparentes - des tenues hypersexuées. Elles s'inspirent de stars adolescentes au sex-appeal débridé - Britney Spears, Rihanna, Alizée, Christina Aguilera, Lady Gaga, sans oublier les Girlicious.
Selon la sémiologue canadienne Mariette Julien, cette "girl culture" emprunte ses codes au cinéma érotique et à la pornographie : kilt, tenue moulante, hauts talons, soutien-gorge "push up", décolleté, bas résille. Elle serait encouragée par les grandes marques de vêtements et de cosmétiques. Le coeur de cible avoué : les "tweens" ou "enfados", les 8-14 ans. Un marché colossal (260 milliards de dollars aux Etats-Unis) exploité par les études marketing et la presse mode : MilkDoolittleLa Petite magazine, autant de magazines dans lesquels des modèles dévoilent leur nombril, arborent trousses de maquillage et strings. Pendant l'été 2011, Vogue proposait une série de mode avec Thylane, 10 ans, en jupe fendue, talons aiguilles, sur des coussins léopard.
Corinne Destal, maître de conférences à l'université Bordeaux-III, a étudié les représentations sexuées à destination des fillettes. Dès 8-10 ans, elles lisent la presse ado - GirlsStar ClubMuteen... Dans cette presse qui"met le corps sur un trônel'hypersexualisation passe par une éducation précoce à la séduction, des codes sexy, des clips à l'érotisation démonstrative", explique l'universitaire.
Dans le rapport Jouanno, ce sont les psychologues et les pédopsychiatres qui se disent les plus inquiets. Selon eux, les enfants connaissent entre 8 et 12 ans, avant l'arrivée de la puberté, une "période de latence" pendant laquelle ils se préoccupent moins de la sexualité, se rapprochent de leurs parents, s'intéressent à la scolarité et aux sujets "sérieux". C'est une étape importante dans leur construction cognitive et la formation de leur personnalité.
HYPERACTIVITÉ, PERTE D'ESTIME DE SOI...
L'intrusion de la pornographie à cet âge bouleverserait cette période d'apprentissage. D'après le pédopsychiatre Michel Botbol, l'hypersexualisation les conduit à rencontrer des difficultés dans l'acquisition de savoirs, mais aussi des problèmes d'hyperactivité ou de perte d'estime de soi. "La publicité, les films, les magazines envoient en permanence des messages crus, explique Didier Lauru, psychiatre et directeur de la revue Enfances & psyOn retrouve ce même excès en famille où, souvent, les adultes manquent de discernement et de pudeur. Résultat : les enfants sont continuellement excités, au sens sexuel du terme."
La psychanalyste Sophie Marinopoulos, experte auprès des juges pour enfants, s'inquiète, elle, du rôle trouble et actif des parents dans cette érotisation. "Ce sont eux qui leur achètent des habits coûteux et sexy, les exhibent, les déguisent dès qu'ils ont 3 ou 4 ans, affirme-t-elle. Ce sont les mêmes qui présentent des gamines aux concours de petites Miss." Selon Sophie Marinopoulos, l'enfant devient un faire-valoir et les garçons sont transformés en "lolitos", comme les filles. "Il y a une ambiance pédophilique nouvelle, poursuit-elle. L'enfant n'a plus de valeur par lui-même, il doit ressembler au rêve de ses parents. On le prend dans des fantasmes qui ne sont pas les siens. On lui vole son enfance."
Le sociologue Michel Fize, qui travaille sur l'adolescence depuis vingt ans, est beaucoup plus mesuré sur cette "hypersexualisation" : "Qu'entend-on par fillette, lolita ? Parlons de jeunes adolescentes ! Pour les filles, se mettre en valeur dès 10 ans, plaire, est une manière d'entrer dans la féminité avant la puberté. Tout est question de culture, de mode de vie, de réseau. C'est une nouvelle jeunesse. Ils veulent devenir indépendants plus tôt. Il y a de la séduction, mais aucune sexualité réelle." Que pense-t-il de la période de latence ? "On veut faire croire qu'il existe un temps d'enfance immuable et innocente, sans séduction ni désir. Ce sont des discours psy archaïques." Peut-on vraiment parler de nymphettes décérébrées par les marques ? "Les intéressées ne se vivent pas comme une chose sexuelle. Pour les ados, féminité et féminisme, séduction et respect marchent ensemble. Chantal Jouanno les fait rire quand elle propose de rétablir l'uniforme dans les collèges !"
L'impact des films pornos sur les très jeunes - les 8-10 ans - inquiète cependant Michel Fize. "Tomber à cet âge sur un film hardcore n'est jamais anodin. On y voit de telles violences que cela peut choquer."Depuis quelques années, une pornographie violente se développe. Tentant leur chance sur Internet, des petites productions réalisent des films aux budgets de misère, pratiquant la surenchère dans la brutalité. La série "Xanadu", d'Arte, qui raconte l'histoire d'un producteur porno ruiné par Internet, décrit bien cette évolution : à son fils qui propose :"Aujourd'hui, une seule solution, le "gonzo" : un canapé, trois pétasses, une caméra", le père répond : "Ici, c'est le haut de gamme du X, pas de la charcuterie". L'ancienne actrice de X Raffaëla Anderson a raconté cette "charcuterie" dans Hard (Grasset, 2000).
CHANGEMENT DU VOCABULAIRE SEXUEL
Que se passe-t-il dans la tête d'une fille de 8 ou 10 ans quand elle visionne sur Internet Tournante dans un dépotoir ? Le pédopsychiatre Jean-Yves Hayez, qui parle souvent du porno avec des mineurs, résume le malaise : "Ils peuvent en ressentir une angoisse soudaine, intense et durable : peur d'une possible agression contre eux, peur de ces masses de corps qui partouzent, de leurs transformations et de ce qui en sort, et ce jusqu'à la peur que leurs propres parents et leur entourage deviennent monstrueux eux aussi, des animaux sauvages, quand ils sont tout nus."
Cependant, dès que les garçons flirtent, à 13-14 ans, visionner du porno devient pour certains un moment d'"éclate sexuelle" qu'ils veulent retrouver, partager avec leurs copains. Parfois, une pratique autoérotique devient addictive, comme chez le Kid, héros triste du dernier roman de Russell Banks, Lointain souvenir de la peau (Actes Sud, 444 p., 24,20 €)."La majorité des enfants ne s'attachent pas à ce qu'ils ont vu, et n'y reviennent qu'occasionnellement", poursuit Jean-Yves Hayez, qui parle d'une forme de déniaisement : "Le réalisme de l'enfant augmente, et il ne faut plus trop lui raconter de salades sur ce que sont les autres et sur la sexualité - c'est aussi la "baise". Disons qu'il en sort un peu vieilli, un rien cynique, lucide, matérialiste, bien plus vite que ce que voudraient beaucoup de parents."
Avec le porno, le vocabulaire sexuel des jeunes a changé. Selon l'association scolaire Sésame, dirigée par Denise Stagnara, une dame de 92 ans, les mots du X représentent désormais 20 % des expressions sexuelles. Si, en 1980, les 10-11 ans parlaient de graines et de sentiments, ils connaissent aujourd'hui les termes homo, fellation ou sodomie. D'autres effets, plus insidieux ou anxiogènes, ont été repérés. Le docteur Ronald Virag, andrologue, reçoit de plus en plus de garçons de 16-18 ans qui veulent se faire agrandir le pénis car l'outil imposant des "hardeurs" les traumatise, le fait qu'ils bandent tout le temps les complexe. Le porno développe chez eux une angoisse de la performance.
Pour Michel Fize, les pratiques sexuelles peuvent en outre être"désinhibées" par le porno. "On sous-estime toujours le désir féminin. Des choses qu'un jeune couple faisait après s'être apprivoisé l'un l'autre, sur la durée, deviennent aujourd'hui courantes dès les premiers rapports sexuels." L'espace d'accueil pour 13-25 ans CyberCrips, à Paris, a enquêté auprès de 10 000 ados : dès 14 ans, des garçons demandent ainsi une fellation. "Certaines adolescentes croient devoir se soumettre aux clichés du porno - par exemple se faire épiler le pubis - pour plaire aux garçons, explique Philippe Brenot, psychiatre et sexologue, qui vient de publier une enquête sur le plaisir féminin, menée auprès de 3 000 femmes. De nouvelles moeurs s'installent. Des normes aussi. Un terrorisme de l'orgasme vaginal, des coïts interminables, une obligation de jouissance. Souvent, la technique l'emporte sur la découverte de sa propre envie. Nous revoyons ces femmes en consultation, adultes, avec une plainte liée à l'absence de plaisir et à la disparition du désir."
Le gynécologue Israël Nisand, qui a fondé le site info-ado pour répondre aux questions sur la sexualité, se montre très alarmiste. "La pornographie est devenue la principale forme d'éducation sexuelle. Je trouve grave qu'un collégien de 10 ans demande : "Est-ce que maman fait l'amour avec des chiens ?" Ce sont des questions qu'on entend ! Je ne trouve pas normal que des lycéennes de 14 ans fassent des fellations à plusieurs garçons, pour faire comme au cinéma."
Outre le contenu des actes sexuels pratiqués dans les films porno, la représentation du couple homme-femme - le premier, quasiment toujours dominant, la deuxième, dominée, voire asservie - induit un modèle de relation qui peut marquer les enfants et les adolescents. Israël Nisand dénonce la vision "avilissante" de l'amour et des femmes propagée par la pornographie, qui perpétue "des stéréotypes sexuels agressifs, une pensée machiste et des relations de pouvoir" qui marquent les adolescents. Il reprend les arguments des féministes prohibitionnistes - Women Against Pornography aux Etats-Unis ou les Chiennes de garde en France - qui voient dans la pornographie un discours présentant les femmes comme toujours disponibles, ravies d'être violentées et humiliées - sans en voir la dimension fantasmatique.
S'appuyant sur les travaux du sociologue canadien et croisé antiporno Richard Poulin, Israël Nisand associe l'intrusion de la pornographie dans le monde de l'enfance à la violence grandissante des mineurs. Il rappelle qu'en France le nombre de jeunes adolescents condamnés pour violence sexuelle ne cesse d'augmenter, dans des proportions inquiétantes : 983 en 2002, 1 392 en 2006 et 3 169 en 2008. Pour lui, la pornographie encouragerait la confusion entre le virtuel et le réel, et donc le passage à l'acte. Selon le rapport Meese, réalisé aux Etats-Unis en 1986, pendant le boom des DVD pornos, 21 délinquants sexuels récidivistes sur 25 en visionnaient régulièrement. Un violeur sur deux déclarait en avoir vu avant d'agir.
FAITS DIVERS
Israël Nisand cite encore plusieurs faits divers en France, où des lycéens imposent des fellations à des filles, les filmant avec leur portable. "Ces derniers mois, nous avons eu deux histoires de gamine poussée à faire des fellations, confirme un lieutenant de la brigade des mineurs de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur. Un garçon de 16 ans, exclu de plusieurs lycées, a entraîné une fille dans un tunnel désaffecté avec deux copains de 14 et 15 ans." L'autre affaire concerne quatre jeunes de 12 et 13 ans. L'un des garçons a filmé une fille de 13 ans lui faisant une fellation et l'a ensuite obligée à le faire à ses copains sous peine de diffuser la vidéo. Le rôle du porno ? "Dans une affaire, un des jeunes en regardait avec son oncle."
Ces faits divers adolescents - mauvais garçons et filles fragiles - n'ont-ils pas toujours existé ? "Ils sont de plus en plus nombreux, répond le lieutenant. On sent l'influence du porno dans le fait qu'il y a moins de respect des filles, moins de romantisme. Ce n'est plus comme avant : sortir, aller au cinéma, etc. C'est beaucoup plus direct."
Les sociologues de l'Institut national de la jeunesse et de l'éducation populaire (Injep), au ministère de l'éducation nationale, ne partagent pas l'inquiétude d'Israël Nisand et des policiers. Ils viennent de publier plusieurs enquêtes qui contredisent le rapport du gynécologue. "Les adolescents regardent finalement assez peu de porno, affirme Yaëlle Amsellem-Mainguy, qui a dirigé ces recherches pour l'Observatoire de la jeunesse. La grosse consommation vient avec l'âge adulte, chez les 25-34 ans et plus. Le porno, c'est pour les vieux."
Sur la liaison porno-violence, la sociologue pense que policiers et praticiens ont une vision déformée de la jeunesse : "Ils ne voient que les jeunes à problème. Ce n'est pas représentatif. Le porno n'est pas la principale source d'éducation sexuelle des jeunes. Pour les choses sérieuses (le sida, la grossesse), ils se renseignent auprès des proches ou vont sur Internet, pour consulter Doctissimo, des chats ou les sites féminins."
Pour les sociologues de l'Injep, l'inquiétude des parents devant les films pornos est à rapprocher d'une question plus vaste : la crainte de perdre tout contrôle sur l'éducation de ses enfants. Les adultes étaient déjà effrayés lors de l'apparition d'une culture "teenager", souvent rebelle, dans les années 1950, puis de la contraception ou de la multiplication d'aventures avant le mariage. Ces craintes auraient redoublé avec l'arrivée de mouvements musicaux comme le rock'n'roll - l'effroi devant Elvis "the pelvis" en jean moulant - puis la pop, sans oublier les mouvements hippies et punk prônant la liberté sexuelle. Aujourd'hui, nous assisterions aux mêmes réactions inquiètes face à une sexualité indépendante, à Internet, aux jeux vidéo, aux réseaux sociaux. Et au porno.
Cette angoisse irait de pair avec l'obsolescence rapide des métiers et des savoir-faire, une accélération qui atteint jusqu'à certaines valeurs. Tout cela mène les parents à s'interroger sur ce qu'ils doivent et peuvent encore transmettre - sur leur rôle. "Les adultes ne devraient pas tant s'alarmer, répond Yaëlle Amsellem-Mainguy. Les jeunes se protègent à 90 % quand ils rencontrent quelqu'un. Sexuellement, les adolescents se prennent en main. C'est peut-être cela qui inquiète ?"