REPORTAGE Dans la structure parisienne de pédopsychiatrie qui se consacre au mal-être des jeunes, les consultations ont augmenté de 30 % depuis le début de la pandémie. La spécificité de cette maison des adolescents est de mêler soins médicaux et ateliers de hip-hop, de musique ou d’arts plastiques pour retrouver l’estime de soi.
La tête dans le bac à shampoing, elle savoure son massage les yeux fermés. Louise (les prénoms ont été modifiés) ne lave pas souvent ses cheveux bouclés. « C’est compliqué avec la douche, on dit qu’elle est bipolaire, s’amuse-t-elle. On ne sait jamais si on aura du chaud ou du froid ! » Les mains expertes de la coiffeuse dorlotent son cuir chevelu. D’habitude, Louise ne supporte pas qu’on la touche : « Je ne fais jamais de câlins, je n’aime pas les massages sur le corps, mais là, ça va. » Dans ce cocon ressemblant à un vrai salon de coiffure, avec ses fauteuils design et sa publicité de shampoing, Louise, 16 ans, se laisse aller : « Ça fait du bien, j’ai juste à me détendre. »
C’est la première fois qu’elle met les pieds – de gros chaussons en forme de licorne – dans l’atelier de Marie (qui préfère ne pas donner son nom), la « socio-coiffeuse » qui bichonne les ados de la Maison de Solenn. « Je fais du lissage, du massage, du bouclage, je coupe, mais je ne colore pas, déclare-t-elle d’une voix douce, que veux-tu faire ? » Lisser !« C’est joli, dit Louise, ça fait un peu princesse. »
Marie distille ses conseils (« une goutte d’huile d’olive sur tes longueurs ») et suscite les confidences. « Quand je suis venue te chercher, vous papotiez entre filles ? », demande-t-elle. « Une ado partage sa chambre avec une autre qui agit comme sa mère : “Tiens-toi bien, assieds-toi correctement”, confie la jeune fille. Elle avait besoin de réconfort. »
Louise est hospitalisée depuis un mois pour un violent mal de ventre l’empêchant de marcher. Demain, c’est le grand jour. Comme l’ont dit ses parents : « Arrivée en fauteuil roulant, notre fille repart debout. »