Dans une tribune au « Monde », le sociologue Ivan Sainsaulieu décrit les dynamiques de l’engagement du personnel soignant des hôpitaux, qui font face à l’épidémie malgré le manque de moyens, entre exigence professionnelle, ambiance de travail collective et contrainte productiviste.
Ivan Sainsaulieu Sociologue Publié le 27 mars 2020
Tribune. Malgré l’indigence des autorités, incapables de fournir à temps des lits et des masques au lieu de beaux discours ; malgré la menace de la maladie, et la fatigue accumulée antérieurement du fait d’un travail notoirement sous pression ; malgré les démissions, le turnover, le manque d’infirmiers, voire de médecins, les personnels hospitaliers font face. Avec notre soutien admiratif.
Ont-ils le choix ? Oui et non. Dans sept enquêtes sur les relations de travail à l’hôpital, j’ai pu appréhender les dynamiques de l’engagement au travail, au cours de centaines d’entretiens. D’un côté, c’est leur travail et leur devoir à la fois, puisque leur travail consiste à prendre soin d’autrui soit directement, pour les soignants, soit indirectement, au moyen des supports logistiques, administratifs et techniques. Et, d’un autre côté, ce n’est pas parce que l’on est un agent hospitalier qu’on ne peut pas avoir de faiblesses, vouloir parfois se faire tout petit et laisser passer son tour.