La Maison-Rouge à Paris rassemble les jouets de chiffon de mères afro-américaines fabriqués pour leurs petits et les enfants blancs dont elles avaient la charge.
« Une collection de questions. » C’est ainsi que l’Américaine Deborah Neff résume son entreprise singulière, commencée il y a vingt ans à l’occasion d’un déplacement professionnel dans le sud des Etats-Unis. Depuis, cette avocate a acquis quelque 500 « poupées noires », fabriquées entre 1840 et 1940 par des femmes d’origine africaine à une époque où bas noirs et chiffons fournissaient la matière première. Ces poupées étaient destinées à leurs propres enfants, souvent nés des viols perpétrés par leurs maîtres, mais aussi, et surtout, pour les enfants blancs dont elles avaient la charge.
Cette collection unique en son genre, qui rend sensible le rapport complexe, fait d’amour autant que de haine, engendré par l’esclavage des Afro-Américains, Deborah Neff l’a enrichie par des photos d’enfants posant avec leur poupée favorite, ainsi que par les portraits dont les familles noires décoraient leur intérieur, témoignage de leur aspiration à la dignité dans un contexte dégradant.