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Articles, témoignages, infos sur la psychiatrie, la psychanalyse, la clinique, etc.

mercredi 1 décembre 2010

Séminaire Psychologie, psychiatrie et psychanalyse : histoires croisées

  
* Jacqueline Carroy, directrice d’études à l’EHESS (TH)
* Jean-Christophe Coffin, maître de conférences à l’Université Paris-V/Descartes
* Annick Ohayon, maître de conférences à l’Université Paris-VIII/Vincennes-Saint-Denis
* Régine Plas

Psychologie, psychiatrie et psychanalyse ont contribué et contribuent à constituer le champ des savoirs et des pratiques sur l’homme. Il nous semble important de développer à leur endroit une approche historienne. Ce séminaire a pour propos de confronter les histoires de la psychologie, de la psychiatrie et de la psychanalyse, et d’explorer les territoires dévolus à l’homme moral, physique et social dans la période allant du XVIIIe au XXe siècle. Nous souhaitons privilégier la confrontation des approches et des points de vue afin de mettre en œuvre une histoire intellectuelle, culturelle et sociale du domaine « psy ». Soutenu par la Société d’Histoire des Savoirs sur le Psychisme (SHSP), ce séminaire est ouvert aux chercheurs et aux étudiants en histoire et en histoire des sciences, aux praticiens et aux chercheurs en psychologie, psychiatrie et psychanalyse et plus généralement en sciences humaines, ainsi qu’à toute personne intéressée.

Pour accéder au programme, cliquer ici

dimanche 28 novembre 2010

Le Conseil constitutionnel censure la loi sur les internements psychiatriques
26.11.10

Le Conseil constitutionnel a censuré, vendredi 26 novembre, la loi de 1990 sur les hospitalisations sous contrainte, en imposant le contrôle d'un juge dans les quinze jours après un internement en psychiatrie.

Saisi dans le cadre d'une question prioritaire de constitutionnalité (QPC), le Conseil a considéré que l'hospitalisation sans consentement d'une personne atteinte de troubles psychiques à la demande d'un tiers ne peut être prolongée au-delà de quinze jours sans l'intervention d'un juge.

GARANTIES INSUFFISANTES


Il a en conséquence déclaré contraire à la Constitution l'article L337 du code de la santé publique, qui permet la prolongation d'une telle hospitalisation sur la seule foi d'un certificat médical circonstancié pour une durée maximale d'un mois, renouvelable par périodes successives.

Régie par la loi du 27 juin 1990, l'hospitalisation sous contrainte peut se faire soit à la demande d'un tiers, soit sur décision administrative du préfet ou du maire, motivée par la sécurité des personnes et de l'ordre public.

Le Conseil considère que les garanties prévues par la loi de 1990 sont insuffisantes. Il indique que "la liberté individuelle ne peut être tenue pour sauvegardée que si le juge intervient dans le plus court délai possible".

Or, relève-t-il, les contrôles et recours juridictionnels actuellement prévus par la loi sont insuffisants. "Ni l'obligation faite à certains magistrats de l'autorité judiciaire de visiter périodiquement les établissements accueillant des personnes soignées pour des troubles mentaux, ni les recours juridictionnels dont disposent ces personnes pour faire annuler la mesure d'hospitalisation ou y mettre fin", ne satisfont aux exigences de l'article 66 de la Constitution qui donne à l'autorité judiciaire la protection de la liberté individuelle.

DÉLAI DE QUINZE JOURS

Le Conseil souligne en outre que le droit reconnu aux personnes internées de saisir un juge est particulièrement difficile à mettre en œuvre, car une telle demande revient à manifester de la "défiance", envers ceux qui les soignent.

"Il est paradoxal que ceux dont les facultés sont altérées (…) soient en France les seules personnes pour qui la privation de liberté n'est pas soumise à un contrôle systématique de l'autorité judiciaire", soulignent les juges constitutionnels.

Le Conseil fixe à quinze jours le délai au-delà duquel l'intervention d'une "juridiction de l'ordre judiciaire" est obligatoire. Il n'a pas imposé qu'aucun internement ne soit décidé sans avis judiciaire. Les juges ont ainsi rappelé que la Constitution n'impose pas l'intervention d'un juge préalablement à toute mesure de privation de liberté.

Le Parlement dispose de huit mois pour proposer et voter une nouvelle loi, le Conseil ayant reporté l'entrée en application de sa décision au 1er août 2011.

Un impact sur la réforme en préparation
26.11.10

Imposée par le Conseil constitutionnel vendredi 26 novembre, l'obligation pour un juge de viser sous quinze jours les hospitalisations sous contrainte aura nécessairement un impact sur le projet de réforme de la loi de 1990, en attente d'examen par les parlementaires. Ce projet de loi "relatif aux droits et à la protection des personnes faisant l'objet de soins psychiatriques", présenté en conseil des ministres en mai, élargit la possibilité de soins sous contrainte en dehors de l'hôpital.

Le texte prévoit la mise en place, à l'arrivée d'un malade à l'hôpital psychiatrique, d'une période d'observation de 72 heures maximum. Sera alors décidé s'il peut rentrer chez lui, s'il sort avec l'obligation de se soigner, ou s'il est hospitalisé, avec ou sans consentement.

Le projet de loi répond à une demande des familles, soucieuses de voir améliorer le suivi des malades. C'est après le drame de Grenoble, où un malade ayant fugué de l'hôpital avait poignardé un étudiant, que le président de la République avait demandé, fin 2008, une réforme des règles de l'hospitalisation.

Le texte fait l'objet de nombreuses critiques de psychiatres, d'associations et de la gauche. Ses opposants pointent l'absence de contrôle judiciaire : "Il maintient l'exception française en Europe d'une loi spécifique pour le traitement sous contrainte en psychiatrie, sans qu'un juge intervienne dans l'autorisation de cette privation de liberté. En posant le principe d'un soin sous contrainte imposable tant à l'hôpital qu'au domicile du patient, il y ajoute l'atteinte à la vie privée", indique ainsi un appel intitulé "Mais c'est un homme", signé notamment par la Ligue des droits de l'homme et le Syndicat de la magistrature.

Les psychiatres s'inquiètent en outre de voir imposer, pour des raisons sécuritaires, des soins sans consentement sur longue période par les préfets, qui suivent les sorties. Plus globalement, ils redoutent que les traitements médicamenteux l'emportent sur le suivi thérapeutique.
Laetitia Clavreul


Quand la machine "judiciaire" prend le pas sur l'évaluation psychiatrique...
 Par MARIE THERESE FERRISI
27 Novembre 2010

Une plaignante, Danielle S, a fait valoir auprès du Conseil constitutionnel que ses droits de liberté (téléphoner, recevoir du courrier, refuser un traitement) au vu de la loi du 27 juin 1990 relative aux droits et à la protection des personnes hospitalisées en raison de troubles mentaux et à leurs conditions d’hospitalisation, ces droits n’ont pas été respectés.
« Les sages » saisis par le Conseil d’Etat ont décidé hier soir la suppression de l’article L.337 inscrit au Code de la Santé Publique selon lequel :
- « Dans les trois jours précédant l'expiration des quinze premiers jours de l'hospitalisation, le malade est examiné par un psychiatre de l'établissement d'accueil.
« Ce dernier établit un certificat médical circonstancié précisant notamment la nature et l'évolution des troubles et indiquant clairement si les conditions de l'hospitalisation sont ou non toujours réunies. Au vu de ce certificat, l'hospitalisation peut être maintenue pour une durée maximale d'un mois.
« Au-delà de cette durée, l'hospitalisation peut être maintenue pour des périodes maximales d'un mois, renouvelables selon les mêmes modalités.
« Le certificat médical est adressé aux autorités visées au deuxième alinéa de l'article L. 338 ainsi qu'à la commission mentionnée à l'article L. 332-3 et selon les modalités prévues à ce même alinéa.
« Faute de production du certificat susvisé, la levée de l'hospitalisation est acquise »   

 A partir du 1er août 2011,  les malades mentaux hospitalisés à la demande d’un tiers (HSDT) feront l’objet au terme du quinzième jour d’hospitalisation non plus du seul certificat médical circonstancié qui affirme ou infirme la nécessité de poursuivre ce mode d’hospitalisation sous contrainte parce que leurs troubles ne leur permettent pas d’accepter les soins, mais ce sera au juge d’en décider.

La réforme de la loi de 1990 en attente d’examen (évènements tragiques de Pau, Grenoble) les parlementaires  devront d’ici là choisir soit un JLD (juge de la liberté et de la détention) ou une juridiction ad hoc qui fera le contrôle de l’HSDT.

Aujourd’hui, ce même contrôle est appliqué pour les gardes à vue et la rétention des étrangers. Il ne manquait que les personnes hospitalisées sans leur consentement.

L’avocate Corinne Vaillant a donné comme argument de défense de la plaignante que le simple fait de demander un stylo pour écrire à un juge était parfois considéré comme un motif suffisant pour prolonger l’internement.

D’abord le mot « internement » fait référence à la psychiatrie asilaire d’avant François Tosquelles précurseur de la psychiatrie institutionnelle. Ensuite, j’essaie d’imaginer le contexte où le patient qui est ou  n’est pas conscient de ses troubles et  au vu de ses droits qui lui ont été énoncés à son admission demande un stylo pour écrire à l’autorité judiciaire.

 Les soignants  (médecins, infirmiers) sont formés pour établir la différence clinique entre le délire procédurier de la personne paranoïaque et le discours névrotique de celle qui demande une écoute disponible et bienveillante. Dans les deux cas, un entretien s’ensuit.

La tournure judiciaire de ceci m’inquiète car ce qui pourrait être perçu par les soigants comme étant un signal clinique sur le chemin de la guérison par une prise de conscience des troubles ou l’acceptation du traitement serait disqualifié par le simple fait que nous répondrons au malade : « C’est le juge qui décidera si vous continuer le traitement et/ou si vous sortez demain » car c’est de cela qu’il va s’agir plus que la demande du coup de fil à passer ou du courrier à envoyer en toute urgence.

Nous savons par expérience que « la relation thérapeutique » est difficile à mettre en place avec une personne qui n’en a pas fait la demande parce que déni des troubles.

La CDHP (commission départementale des hospitalisations psychiatriques) a vocation consultative pour ce mode d’hospitalisation sous contrainte et peut être saisie par le patient. A-t-elle appliqué ses missions ? Est-ce que cette affaire n’est pas un prétexte politique d’un amenuisement du pouvoir médical transféré au ministère de la justice comme pour les affaires de "l’intérieur" ?

LE MONDE DES LIVRES
25.11.10

"Tomates", de Nathalie Quintane, "Les Ailes de plomb", d'Adriano Sofri et "Il vous faudra nous tuer", de Natacha Boussaa : écritures insurgées

Quand la révolution semblait aller de soi, en 1789, en 1917 ou même en 1968, elle était indissociablement action et poésie, insurrection sociale et dissidence langagière. Mais, depuis qu'elle paraît improbable dans les rues, c'est dans les textes que son esprit a trouvé refuge. Et c'est à la littérature qu'il revient d'accueillir l'espérance radicale en ses élans comme en ses fourvoiements.

Or, pour l'écrivain contemporain, penser la révolution c'est méditer une transmission bloquée, ainsi qu'en témoignent trois récits parus récemment : Tomates, de Nathalie Quintane, Les Ailes de plomb, d'Adriano Sofri, et Il vous faudra nous tuer, de Natacha Boussaa. Chacun à sa manière, ces livres tournent autour d'une seule interrogation : comment hériter des mots brûlants, de ces mots de passe qui soulevaient naguère les foules, comment les relancer aujourd'hui sans avoir l'air de prendre la pose, de bégayer lamentablement ?

Pour répondre à cette question, ces trois textes opèrent un va-et-vient, explicite ou souterrain, entre la mémoire militante des années 1970 et les enjeux de la période actuelle : les émeutes de banlieue, en 2005 ; les manifestations hostiles au contrat première embauche (CPE), en 2006 ; l'affaire dite de "Tarnac", du nom de ce village corrézien où s'étaient installés Julien Coupat et ses amis, avant d'être accusés d'avoir voulu faire dérailler des TGV.

"Jeune homme à idées"

C'est Nathalie Quintane qui met en avant ce dernier exemple : "Le fait est que nous avions été affectés par l'emprisonnement, arbitraire, d'un jeune homme à idées", écrit-elle. Au début de Tomates, elle confie que, pour elle, cette indignation devant le sort infligé à Julien Coupat a coïncidé avec la redécouverte des textes d'Auguste Blanqui (1805-1881), ce révolutionnaire qui passa trente-six ans au fond d'une cellule, et qu'on surnomma "l'Enfermé".

Dans L'Éternité par les astres, un essai écrit durant sa captivité au fort du Taureau, en Bretagne, le vieux socialiste notait : "Il n'y a pas de progrès, hélas ! Non, ce sont des rééditions vulgaires, des redites. Tels sont les exemplaires des mondes passés, tels ceux des mondes futurs. Seul le chapitre des bifurcations reste ouvert à l'espérance." Afin d'ouvrir un chapitre de ce genre, Nathalie Quintane expérimente à son tour la possibilité d'une nouvelle écriture insurgée.

Pour cela, l'auteur accomplit un double geste. Elle commence par reconnaître la césure qui sépare les paroles d'hier de celles d'aujourd'hui. Voilà pourquoi elle cite plusieurs documents d'époque. Une lettre de Jean-Marc Rouillan, par exemple, dans laquelle l'ancien militant d'Action directe dresse le bilan de sa génération : "Finalement, nous n'avons rien imaginé. Nous avons seulement recyclé d'une manière dilettante le syndicalisme rêvé, l'en-dehors des copains du début du siècle, le démocratisme..." Ou encore un article qu'Umberto Eco signa dans La Repubblica lors de l'enlèvement d'Aldo Moro par les Brigades rouges, pour ironiser sur ce "roman-feuilleton digne du XIXe siècle, fait de vengeurs et de justiciers habiles et efficaces comme le comte de Montecristo".

A chaque fois, Quintane interroge la place de la prose littéraire dans notre imaginaire politique : "Peut-on envisager (préparer, faire) la révolution (ou une insurrection) à partir d'autre chose que de la littérature (aussi bien la littérature "scientifique" ou philosophique que la littérature tout court) ?" Mais Nathalie Quintane ne s'en tient pas là. Une fois cette césure marquée, elle affirme qu'il ne s'agit pas de ressasser les formules du passé. S'il faut retrouver celles-ci, c'est pour être mieux à même d'en dresser l'inventaire, sans arrogance, en toute lucidité. "Il y avait si longtemps que tous ces mots n'avaient pas été prononcés et repris. Si longtemps que nous en étions coupés, que la jonction devait d'abord s'opérer avec eux, en les récrivant, en les re-disant, bien ronds en bouche, comme Luchini retourné garçon coiffeur mais acteur. Si longtemps que la transmission avait été coupée qu'il faudrait d'abord une période de décalque", note-t-elle dans ce texte qui se lit comme un poème en prose.

Style insurrectionnel

Cette période n'est pas close. Ainsi, lorsque Le Monde publia, en mai 2009, un texte de Julien Coupat, alors derrière les verrous, on découvrit, sous sa plume, une prose classique, à la fois noble et familière, directement issue de la tradition révolutionnaire et de ce que Guy Debord nommait le style insurrectionnel : "A quelques exceptions près, confie Nathalie Quintane, nous adhérâmes tous à ce qu'on peut formuler en manière d'épitaphe : il pensait mal mais il écrivait bien (i.e. qu'il se contente de bâtir sa Commune dans Le Monde). La France qui lit soupirait, soulagée : on apprenait encore dans les écoles (...), les Humanités n'étaient pas mortes, la banlieue n'avait pas tout pourri."

Décidément, pour briser le cercle infernal de la répétition, cette "période de décalque" était nécessaire. Elle visait à renouer le fil de la continuité, à engager un dialogue, même difficile, entre les générations. On se souvient de Tigre en papier (Seuil, 2002), le roman où Olivier Rolin met en scène un ancien militant "mao" qui, au volant d'une DS en orbite sur le périphérique parisien, conte son épopée à la fille d'un camarade disparu. Aujourd'hui, c'est Adriano Sofri qui adopte un dispositif similaire, entre silence et transmission.

Dans Les Ailes de plomb, l'ancien chef du groupe d'extrême gauche Lotta continua s'adresse à une jeune femme et lui raconte le destin du cheminot anarchiste Giuseppe Pinelli. Surtout, il pose à son tour la question de la langue insurgée, de cette "grammaire de la violence" qui peut changer le monde mais aussi l'ensanglanter. Tout en revendiquant son inscription dans une lignée qui remonte à la Révolution française, Sofri montre que cette rhétorique a fini par se vitrifier : "En cette fameuse période de 68, nous avions de nouveaux mots à notre disposition, et notre faute - une faiblesse de la pensée, une ignorance et une crainte - a été de céder aux anciens mots, tout en se sentant refluer loin de la terre promise", confie Sofri à son interlocutrice.

Cette jeune femme aurait pu s'appeler Natacha Boussaa. La comédienne de 36 ans signe un premier roman intitulé Il vous faudra nous tuer. Lena, la narratrice, travaille comme hôtesse d'accueil dans un building de verre. Elle se cache pour lire Théophile Gautier et Antonin Artaud. Révoltée par le chômage, la précarité, la misère, elle s'engage dans les manifestations contre le CPE et sent percer en elle la tentation du passage à l'acte : "J'ai accepté d'étouffer la violence qui, en réponse, sourdait en moi. J'ai accepté de lire. Lire jusqu'à plus soif, parce que les mots étaient la seule substance capable, en moi, de tuer la rage. J'ai lu pour faire le gros dos et pour m'étourdir. Je me suis saoulée de lecture, comme d'autres de vin, pour me tenir debout." A l'horizon d'un tel récit, il y a le refus d'un avenir bouché, d'une langue asphyxiée. Il y a donc, là encore, le désir obstiné d'offrir une autre forme à la rébellion, l'effort pour inventer une écriture en révolution permanente, propre à ouvrir l'univers des possibles.

TOMATES de Nathalie Quintane. P.O.L, 144 p., 12,50 €.



LES AILES DE PLOMB. MILAN, 15 DÉCEMBRE 1969 d'Adriano Sofri. Traduit de l'italien par Philippe Audegean et Jean-Claude Zancarini. Verdier, 252 p., 19 €.

IL VOUS FAUDRA NOUS TUER de Natacha Boussaa. Denoël, 176 p., 16 €.
Jean Birnbaum

Des consultations chez le médecin à prix variables ?26/11/2010

C'est ce que préconise l’ex-ministre de la Santé, Élisabeth Hubert, dans un rapport remis vendredi à l’Elysée et qui vise à relancer la médecine libérale.

L’ex-ministre de la Santé, Élisabeth Hubert, prône notamment des consultations à prix variable chez le généraliste, allant jusqu’à 70 euros, dans un rapport remis vendredi à l’Elysée et qui vise à relancer la médecine libérale et à enrayer la désertification médicale.

Chargée, en avril, par Nicolas Sarkozy d’une mission sur la médecine de proximité, Élisabeth Hubert, qui préside la Fédération nationale des établissements d’hospitalisation à domicile (Fnehad), préconise une série de mesures conjoncturelles et structurelles pour combattre la crise que connaît la médecine libérale.

Pour la grille de tarification qui est proposée, en remplacement du prix unique de la consultation - qui passera de 22 à 23 euros le 1er janvier prochain -, «le critère de valorisation doit être la difficulté à établir un diagnostic», suggère le rapport.

Les prix pourraient s’échelonner de la moitié du tarif actuel pour un rendez-vous de simple formalité à 70 euros pour «une consultation longue et difficile». «Moins d’actes mieux payés est le rêve de tout médecin. Moins d’actes médicaux inutiles est le rêve de tout organisme payeur. Un autre référentiel des tarifications des médecins peut permettre de concilier ces aspirations apparemment divergentes», écrit Élisabeth Hubert.

A propos du surcoût potentiel pour l’Assurance maladie, déjà en fort déficit, elle fait valoir que les caisses de Sécurité sociale disposent déjà des «profils des médecins et des caractéristiques de leurs pratiques» et peuvent ainsi repérer ceux qui réclameraient des tarifs élevés non justifiés.

Adapter la médecine française à Internet

Parmi les mesures «temporaires» pour les zones rurales désertées par les médecins, le rapport propose d’installer des jeunes médecins sortis de l’internat dans des locaux mis à la disposition de collectivités locales et de mettre à la disposition des populations «des moyens de transport pour se rendre chez le médecin le plus proche».

D’autres mesures de moyen et long terme, dont les effets ne se feront sentir qu’à une échéance de 8 à 10 ans, concernent la réforme des études médicales, jugée trop axée sur l’hôpital.

Une autre proposition forte est d’adapter la médecine française à l’internet en développant les systèmes d’information (partage des données médicales sur les patients entre praticiens) et la télémédecine. Prenant acte des préférences des jeunes médecins pour un travail en groupe plutôt qu’en solitaire, le rapport estime que les «regroupements pluriprofessionnels doivent davantage être favorisés», mais tout en veillant à «ne pas laisser faire n’importe quoi, n’importe où, n’importe comment».
(Source AFP)


samedi 27 novembre 2010

Neuf cents accidents médicaux par jour dans les hôpitaux français
26.11.10

Neuf cents accidents médicaux, en moyenne, surviennent chaque jour dans les hôpitaux et cliniques français, révèle la deuxième enquête nationale sur les événements indésirables graves liés aux soins (Eneis), publiée par le ministère du travail et de la santé. Sur ce total, quatre cents seraient "évitables" estime le rapport. Ce résultat élevé est proche de celui de 2004.

Chaque année, ce sont donc entre 275 000 et 395 000 "événements indésirables graves" (EIG) qui surviendraient dans les établissements hospitaliers français, estime l'étude. "Globalement, ça n'est pas brillant", convient Philippe Michel, directeur du Comité de coordination de l'évaluation clinique et de la qualité en Aquitaine (CCECQA), coauteur de l'étude réalisée avec la Drees (évaluation et statistique). "Mais cela ne doit pas masquer les progrès qui ont été faits, par exemple en anesthésie-réanimation ou contre les infections nosocomiales, c'est-à-dire contractées à l'hôpital", tempère-t-il.

Les EIG évitables (de 160 000 à 290 000 par an) sont ceux "qui n'auraient pas eu lieu si les soins avaient été conformes à la prise en charge considérée comme satisfaisante au moment de leur survenue". "Vingt pour cent des EIG évitables survenus à l'hôpital ou en clinique sont associés à des médicaments (...). Ils sont en cause dans quasiment la moitié des cas d'EIG ayant entraîné une hospitalisation", ajoute Philippe Michel.

DES ACCIDENTS EN LIEN AVEC DES CONDITIONS DE TRAVAIL DÉGRADÉES

Il évoque le problème des traitements anticoagulants, où l'on n'enregistre guère de progrès, avec des traitements compliqués qui peuvent être difficiles à gérer par des patients âgés. Autre tendance, "une augmentation des hospitalisations pour infection du site opératoire, qui peut être liée à l'identification au domicile d'une infection contractée dans un établissement de santé. Mais cela peut être aussi la conséquence d'une mauvaise prise en charge des plaies opératoires en ambulatoire [hors de l'hôpital]", dit-il. Comme en 2004, l'étude pointe des "défaillances humaines des professionnels", moins souvent en lien avec des défauts de connaissances qu'avec des conditions de travail dégradées, "une supervision insuffisante des collaborateurs" ou encore une "mauvaise organisation" ou un "déficit de communication entre professionnels", note le Dr Michel.

Cependant, tous les événements indésirables liés aux soins ne sont pas considérés comme évitables. Ils peuvent aussi résulter de risques auxquels est exposé le patient dans le cadre de soins optimaux, souligne l'étude. Ils touchent plus fréquemment des patients fragiles, âgés, souvent déjà dans un mauvais état de santé.

Le plus souvent, l'événement indésirable entraîne un prolongement d'hospitalisation, mais le pronostic vital ou une incapacité à la sortie de l'hôpital peuvent être en jeu, voire, plus rarement, la mort.

"L'accident médical est lié à un système d'organisation des soins inefficient"

Neuf cents accidents médicaux, en moyenne, surviennent chaque jour dans les hôpitaux et cliniques français, dont quatre cents seraient évitables, selon une nouvelle étude du ministère de la santé. Ces "événements indésirables graves" (EIG) ont des causes multiples, sur lesquelles revient Nicolas Gombault, directeur de la mutuelle d'assurance du corps de santé français Sou médical et membre de l'association La Prévention médicale.

Le chiffre de 900 accidents médicaux par jour vous paraît-il élevé ?


Nicolas Gombault : Cette étude conforte les données dont nous disposons. Il faut noter que le nombre de sinistres déclarés est beaucoup plus faible : de 12 à 15 000 accidents chez les médecins praticiens et en hôpitaux et cliniques donnent lieu à des réclamations par an. Cette étude-ci est fondée sur les cas avérés d'EIG signalés par les professionnels de santé. Le nombre d'EIG reste en fait faible par rapport au volume des actes médicaux, estimé à environ 500 millions d'actes médicaux remboursés par les caisses d'assurance maladie par an. Mais il reste toujours trop important, notamment si l'on considère que 40 à 50 % d'EIG sont évitables. Pour le reste, il faut savoir que toute prescription médicamenteuse ou tout acte médical peut comporter des risques. Et, si l'on est alcoolique, diabétique ou hypertendu, on a plus de risques de contracter des maladies nosocomiales.

A qui la faute ?


Les EIG sont très variés et peuvent aller de la chute d'un patient dans un couloir à une faute évidente du personnel médical comme laisser sortir le patient opéré sans anticoagulants, ou se tromper de patient ou de côté à opérer. Les causes sont multiples et plurisectorielles : défaut ou erreur de médicamentation, erreurs et défaillances humaines, infections nosocomiales ou mauvaise coordination entre professionnels de santé et entre établissements de santé.

Ces derniers problèmes dits "systémiques" sont les plus fréquents. Chaque professionnel de santé est très bon dans son domaine mais il y a un problème dans la prise en charge globale du patient. C'est toute l'organisation du système de soins qui peut être remise en cause. La multiplicité des tâches du personnel de santé et le manque de personnel jouent notamment sur cette organisation, mais il est difficile de dire qu'il y a une dégradation sur ce point ces dernières années. Ce sont davantage les pratiques qui sont en cause et le manque de prise en considération des risques.

Prenons le cas d'une opération de prothèse globale de la hanche gauche où le patient se retrouve finalement opéré de la hanche droite. La première réaction est de dire que la faute incombe au chirurgien et in fine, s'il y a plainte, le juge établira la responsabilité du chirurgien. Mais, quand on creuse, on remarque souvent que l'accident est lié à un système d'organisation des soins qui n'est pas efficient, où aucune procédure n'a été mise en place pour empêcher l'accident, comme par exemple la check-list utilisée aux Etats-Unis. Cette dernière, qui consiste à vérifier tous les paramètres avant l'opération, n'est obligatoire que depuis peu. En obligeant le chirurgien à apposer ses initiales sur la hanche à opérer, on limite les risques d'erreur.

Quelles mesures doivent être prises pour réduire le nombre des EIG ?


Outre l'introduction de procédures de vérification comme la check-list, le passage, il y a quelques jours, du décret d'application obligeant chaque établissement de santé à déclarer tout EIG va dans le bon sens : cette déclaration permettra de mieux connaître les causes des EIG pour éviter les erreurs. Elle va changer en profondeur les pratiques et instaurer une culture de la sécurité et de la qualité qui n'est actuellement pas une priorité. En matière de prévention des risques, il est nécessaire de passer d'une culture défensive à une "culture de l'erreur". Il faut repenser l'organisation des établissements de santé en ce sens.

Sur quoi portent les réclamations en matière d'accidents médicaux ?


Elles varient d'une spécialité à l'autre. Il y a plus de généralistes que de spécialistes mais l'on estime que seul un généraliste sur cent est visé chaque année par une réclamation, contre un chirurgien sur deux. Pour les généralistes, ce sont en majorité des erreurs de diagnostic. La plupart du temps, le médecin est passé à côté de la maladie. Pourquoi ? L'exemple typique est la méningite, où le patient a été vu dans le cadre d'une routine d'épidémie de grippe, entre 36 patients atteints de grippe. Le médecin n'a pas cherché un autre diagnostic. Il faut mettre en place une méthodologie.

La communication avec le praticien est un facteur déterminant. Certains médecins, quand l'événement est survenu, ne savent pas communiquer et ne savent pas reconnaître qu'il y a eu un incident. C'est une cause significative des réclamations. On reproche également beaucoup au médecin des manquements au devoir d'information.

Le nombre de réclamations est-il en augmentation ?


Globalement, les réclamations sont en nette augmentation. La jurisprudence évolue vers davantage de mise en cause de la responsabilité des médecins et une plus grande sévérité des magistrats : 68 % des dossiers jugés sur le fond se terminent par une condamnation et le coût moyen des indemnités augmente. C'est une très grande source d'inquiétude pour ceux qui sont les plus exposés au risque : les chirurgiens et obstétriciens. Ces derniers peuvent être condamnés à titre personnel à des indemnités importantes, ce à quoi il faut trouver une solution. Car, à échéance, on va vers la suppression des obstétriciens en clinique.
Propos recueillis par Hélène Sallon

Scène thérapie
26/11/2010

Face au public, des schizophrènes, des trisomiques. Le temps d’une pièce, «Bleu de mes rêves», ils ont pris la parole. Une création rare emmenée par Gérard Gallego.
Par DIDIER ARNAUD Envoyé spécial à Morsang-sur-Orge (Essonne)

Sur la scène du théâtre, le plateau est jonché de journaux déchirés, des quotidiens gratuits à piétiner, et on entend clairement le bruit de feuilles mortes écrasées par une semelle humaine. La petite Lætitia, dont on ne sait pas bien si c’est une femme ou une enfant, jupette, collants blancs, avance avec un gros cochon rose dans les bras. Quand elle dispose des chaises en rang d’oignon, le petit mouvement du bassin qu’elle produit est un instant de grâce. Puis vient Frédéric, bouille ronde, voix ferme. Il interpelle le public : «Vous êtes les spectateurs, nous sommes les comédiens», d’une voix de stentor. Ces deux présences antagonistes - force impassible, fragilité intense - font frissonner l’échine. La suite est faite de danses, d’interpellations, de coups de gueule. On ne sait pas très bien où on se trouve : l’histoire n’est pas de celles qui se racontent, mais, là où on est, il y a de l’émotion. Bleu de mes rêves, qui s’est donné les 19 et 20 novembre à l’Arlequin théâtre ouvert, à Morsang-sur-Orge (Essonne), est un spectacle rare. Il est joué par des hommes et des femmes de tous âges (de 18 ans à 50 ans), qui souffrent de troubles psychiques d’origine diverse. Certains sont schizophrènes, d’autres trisomiques.

Au théâtre : ces comédiens-là, on les appelle «les résidents». Sous traitement, ou non, avec bien souvent des trajectoires familiales lourdes, ils fréquententun centre, les Amis de l’atelier, qui se trouve à deux cents mètres du théâtre, pensionnaires où à l’accueil de jour. Les résidents n’ont pas de mémoire. Les résidents ont du mal à se concentrer. Ils se fatiguent très vite, mais ils se donnent à fond.
Alors, comme ils ne peuvent apprendre un texte, leur production se transforme à chaque fois en prouesse. Chacune de leurs répétitions se mue en improvisation sur un cadre imposé. La seule chose immuable, c’est la bande-son.


«J’te jure, la mort, j’ai peur»

Lorsqu’elle défile dans le noir de la salle de théâtre, ils parlent et c’est une surprise pour le public de les entendre, eux qui n’ont jamais la parole. Christine : «J’ai les pieds qui sont de travers, mes parents m’ont faite à l’envers, je suis née les pieds devant, j’ai quand même une grande gueule.»
Eric détaille ainsi les trois âges de la vie : «Un adulte, c’est majeur ; un enfant, c’est mineur ; un petit vieux, c’est à la maison de retraite.» Souvent, ils sont drôles. Christine lance : «Rire jaune, ça veut dire que tu ris cocu.» Sandrine rit : «Envoyer sur les roses, ça veut dire qu’on balance les gens dans les épines.» Frédéric : «Le bonheur, c’est d’être avec ma copine, faire des sorties. Être libre, c’est d’avoir plus mes parents sur le dos, faire ce que j’ai envie de faire.» Ils y livrent parfois des secrets, comme pour qui leur cœur bat : «Elle s’appelle Christelle, son nom de famille, je me rappelle plus.» Ils sont lucides sur leur situation, mais peinent à dire en quoi ils nous sont différents : «On sait ce qu’on fait dans la vie… rien. Mais on sait faire des choses, moi je sais faire à manger, un petit peu repasser, c’est tout, la différence [avec les autres gens, ndlr], c’est quoi, moi je sais pas.» L’avenir ? Aude  : «Avoir un enfant, j’aurais pas le droit… Si ça l’intéresse de faire l’amour avec moi, je ne veux pas le brusquer. J’aimerais bien faire notre vie ensemble.» Christine : «Si jamais demain, mon cœur s’arrête, je vais faire une dépression, j’te jure, la mort, j’ai peur.» L’ensemble dégage une urgence, dessine une vie, au jour le jour, avec ses heurs, malheurs, et instants de douceur. Cela se voit lorsque Emilie chante d’une voix fluette la Vie en rose.

A quoi sert ce théâtre-là ? D’abord, à faire progresser les résidents, pour qui ce projet a des vertus thérapeutiques. «Cela a bougé chez eux», explique Sandy Escribano, aide-médico psychologique. Le travail sur le corps, l’espace, la voix leur a permis de faire reculer certaines de leurs inhibitions. La première fois que Lætitia a vu Gérard Gallego, le metteur en scène, elle a eu très peur, et a fichu le camp à l’autre bout de la pièce. Mathieu, lui, ne bougeait pas, ne disait rien. Aujourd’hui, il aligne quelques mots, mais a toujours du mal à se tourner vers les spectateurs. Un autre résident avait tout le temps le visage baissé. Peu à peu, il a levé les yeux. Cette femme, toujours en fugue, s’est «stabilisée» le temps du spectacle.

Sandy Escribano l’avoue, son regard a changé. Elle n’y croyait pas vraiment, ne les pensait pas capables. «Le metteur en scène leur a fait confiance, alors que nous, les éducateurs, ne laissions pas facilement la magie de la spontanéité prendre place», explique-t-elle. Plus tard, la soignante raconte comment les plus empotés sur scène n’ont pas été ceux qu’on pensait. «On a pu inverser les rôles, ce sont les résidents qui m’ont accompagnée, cette fois», conclut-elle.

La directrice du foyer, Caroline Hazémard, psychologue de formation, estime que le spectacle s’inscrit parfaitement dans le cadre de la loi du 11 février 2005 qui encourage les établissements à travailler sur la «citoyenneté», pour que les handicapés participent à la vie de la société. «Faire rire, ne pas être montré du doigt, tout cela les a mis dans une dynamique de valorisation, et de responsabilité», raconte-t-elle. Ce projet leur a permis de prendre la parole mais aussi de se faire une place. Le jour du spectacle, certains étaient en costume dès 6 heures du matin, tandis que la représentation avait lieu à 16 heures. Cécile Bertrand, psychologue clinicienne, souligne que les résidents à cette occasion ont pu être «entendus de leur famille, mais aussi de l’équipe. Là, c’est sur scène, et puis c’est dit», tranche-t-elle.

Les comédiens professionnels, chargés de «cadrer» les répliques, y ont, eux aussi, trouvé leur compte. On voit ainsi Thierry peiner à «ramener Fred dans la trame», et à jouer sur son improvisation. Malvina, autre comédienne, trouve ses interlocuteurs «très fins, parfois à leur insu». Tous deux ont progressé dans leur appréhension de la scène.

Au début, Gérard Gallego voulait faire un spectacle autour de la question «quelle différence ?» A 48 ans, la voix forte et remuante, Gérard Gallego vient de la banlieue. Ce qu’il monte a souvent des accents engagés. Avant les résidents, il a joué une pièce avec des mineurs délinquants, des prisonniers à la maison d’arrêt de Fresnes. Il s’est également intéressé à la condition des femmes étrangères et des RMistes à Vincennes, un terrain qu’il continue de labourer près de Tours durant le mois de décembre 2010 (1). Un théâtre social, donc, qui s’attache autant à montrer les facettes méconnues de ces «exclus» qu’à les aider à avoir confiance en eux. Il compte faire tourner ce spectacle pour qu’il serve de référence aux écoles d’éducateurs qui souhaiteraient se lancer dans ce type de projets (2).

«Ils deviennent normaux»


Gérard Gallego n’aime pas parler de lui, mais il tente de redonner à tous ceux qui lui ressemblent un peu, ce dont, un jour, il a bénéficié lui-même. Adolescent, il s’est lui-même retrouvé face à deux alternatives pour se sortir de l’impasse dans laquelle il se trouvait : le jeu de dames et le judo. Il a pris les deux à bras-le-corps, est devenu un crack sur le damier et ceinture noire en kimono. Sur le tatami, un policier éducateur l’a pris sous son aile, lui permettant de sortir de l’ornière.

Au théâtre de Morsang, des lycéens d’une classe de design du lycée technique du Gué à Tresmes, établissement situé près de Meaux, sont venus assister aux répétitions de Bleu de mes rêves. Gérard Gallego leur a demandé d’écrire ce que le spectacle a laissé comme impressions chez eux. «Il n’y a pas eu de mots qui puissent exprimer cette émotion, si forte, si prenante que j’en ai lâché (sic) d’écrire des notes dans mon carnet», a rapporté l’un. Un autre : «Le spectacle enlève la barrière de la maladie, ils deviennent normaux». Camille a noté : «Leurs angoisses sont identiques aux nôtres.» Nikita : «Notre société classe, ordonne, pense au futur, en tout cas, ici, j’ai une ouverture d’esprit.» Inés a conclu joliment : «De toute la pièce, je n’ai pas quitté mon sourire.» Ces mots-là devraient faire plaisir à Jean-Louis Sagot-Duvauroux, le philosophe également directeur de ce théâtre de Morsang où les places sont moins chères qu’au cinéma. «Quelle que soit sa position sociale, on produit des occasions où la communauté se retrouve et éprouve sa commune humanité», dit-il. Ce spectacle en est une.

(1) Représentation le 18 décembre, à la salle des fêtes du Sanitas, Tours (37). (2) GerardGallego.org


Les handicapés ont-ils droit à une vie sexuelle ?
VÉRONIQUE DUBARRY adjointe verte au maire de Paris en charge des personnes en situation de handicap
25/11/2010

Comme si. Comme s’ils ne voulaient pas d’enfant, comme s’ils n’avaient pas de désir, comme s’ils n’avaient pas de peau, de cœur… Comme si les personnes en situation de handicap n’étaient que de purs esprits sans corps. Bien qu’on les réduise la plupart du temps à ce corps dit contraint. Au fond qu’est ce qui coince ? Notre propre angoisse face au flou de la frontière entre le «normal» et le «pathologique» ? Quel que soit le type de handicap, «ces gens-là» ne peuvent prétendre à une vie affective et sexuelle. Ils sont «fous» donc ne pourraient pas être conscients de leur corps et leurs pulsions seraient forcément contre-nature ; leur corps n’est pas dans la norme donc leur sexualité ne peut être «normale».

La question de la sexualité des personnes handicapées fait encore frémir, elle fait peur. Peut-être parce que notre passé collectif en la matière est effrayant : avortements forcés, périodes d’eugénisme, viols dans les institutions… Tout cela rend difficile un discours posé et serein. Sujet tabou, «effrayant», passionné… et complexe. Complexe parce que chaque situation est particulière : en fonction de chaque personne, du type de handicap, de l’âge, de la vie en établissement, à domicile… Et certaines réalités fort dérangeantes : ces aides-soignants confrontés aux pulsions de leurs malades, ces éducateurs qui racontent qu’ils sont «bien obligés d’emmener leurs pensionnaires aux putes», ou bien cette femme d’une soixantaine d’années demandant que quelque chose soit mis en place pour qu’elle n’ait plus, tous les matins, à masturber son fils handicapé mental, sous la douche…

Alors que faire ? Évidemment en parler. Parler de sexualité, d’amour, de pilule, de préservatifs. Informer, sensibiliser, décomplexer la parole. Pour tous : grand public, personnes «normales», «handicapées», parents, enfants, professionnels, que le sujet puisse être abordé dans toute sa complexité. Favoriser les rencontres. En rendant les lieux de sorties accessibles. En utilisant les sites de rencontres. Et aussi en considérant la question au sein des établissements.

Souvent créés par des parents d’enfants handicapés, les établissements ont longtemps passé sous silence la question de la sexualité puisque, comme chacun le sait, les enfants n’ont pas de sexe - même à 40 ou 50 ans. Pourtant, progressivement, on voit fleurir ici et là des initiatives : une chambre double, des cours d’éducation sexuelle, des possibilités de retrouver une intimité, à deux ou seul.

Et puis, dans certains pays européens (Belgique, Suisse…) a été mis en place un service d’assistants érotiques. Ces professionnels, spécifiquement formés, proposent des services sexuels aux personnes qui en font la demande via des associations - services pouvant être remboursés.

Oui, il peut y avoir acte sexuel mais, comme le montrent les photos de Frédérique Jouval (1), il y a surtout regards, tendresse, câlins, contact de corps à corps : parce que l’autre en me touchant me fait reprendre conscience de mon corps et de mon existence comme personne. Que l’on ait, ou pas, deux bras, deux jambes et «toute sa tête».

(1) Dans le cadre du colloque «Handicap : affectivité, sexualité et dignité», le 26 novembre à l’hôtel de ville de Paris, en partenariat avec l’association CQFD.


La « folie douce » : une thérapie burlesque !
par Brigitte Axelrad
SPS n° 291
juillet 2010


« Un médecin consciencieux doit mourir avec le malade s’ils ne peuvent pas guérir ensemble. Le commandant d’un bateau périt avec le bateau, dans les vagues. Il ne lui survit pas. ».
Ionesco, La cantatrice chauve

Cette phrase de Ionesco stigmatise la nouvelle tendance de certains médecins à élaborer des théories de la maladie à partir de leur cas personnel, et à vouloir emporter la confiance de leurs patients en prétendant s’appliquer leurs traitements à eux-mêmes. Pour se rendre crédibles, ils utilisent aussi toutes sortes de métaphores ancrées dans la sagesse populaire, telles que celle du commandant et de son équipage.

Dans le domaine des thérapies fleurissent les dérives les plus diverses. On trouve, par exemple, celles des médecines psychédéliques, telles que prônées par des psychiatres comme Olivier Chambon (La médecine psychédélique, 2009, Éditions Les Arènes), « psychiatre spirituel », qui prétend soigner par les plantes hallucinogènes ; les dérives de la médecine dite « nouvelle » ou biologie totale, initiée par Ryke Geerd Hamer, qui prône l’inutilité de tout recours aux médicaments, toute maladie étant interprétée comme le résultat d’un choc psychique, perçu par l’individu comme aigu et dramatique, que le malade doit apprendre à « décoder » [1] ; les dérives des médecines dites globales, comme la pratique collective du rire de Christian Tal Schaller (La folie douce, 2003, Vivez Soleil), « médecin holistique », qui paraît d’emblée beaucoup plus inoffensive. Et la liste n’est pas close.

Points communs entre ces thérapies : elles sont proposées par des médecins diplômés, généralistes, psychiatres ; toutes les maladies, des plus bénignes aux plus graves (cancer, sida, etc.), sont considérées comme des maladies de l’esprit ; les médications ou procédés thérapeutiques sont présentés comme des « médicaments de l’âme » ; la manipulation mentale souvent reprochée à ces thérapeutes est le secret de leur succès auprès des patients, et, redisons-le, ce qui les rassure, c’est que le médecin confie utiliser pour lui-même le médicament, ou le procédé, pour en évaluer l’efficacité ; ces thérapies coûtent très cher et créent une dépendance ; elles risquent d’aggraver les symptômes ; enfin, elles font perdre de vue au malade la gravité de sa maladie et risquent de le détourner des soins sérieux. Quand il s’en rend compte, il est parfois trop tard.

C’est ainsi que la médecine psychédélique d’Olivier Chambon propose la thérapie par l’ayahuasca, plante utilisée pour soigner des toxicomanes, que les professionnels, tels que le professeur Jean Dugarin, psychiatre à l’Hôpital Fernand Widal de Paris, classent parmi les stupéfiants ; la biologie totale de Ryke Geerd Hamer s’oppose, elle, systématiquement à tous les traitements médicaux, tels que chimiothérapie, ablation de la tumeur dans le cas du cancer, anti-douleurs. Un exemple de cette théorie « nouvelle » de la maladie : le cancer du poumon ne serait pas dû à la cigarette, mais à la peur de la mort, induite par l’image négative de la cigarette. Pour guérir, il faudrait donc décoder ses peurs. Enfin, la médecine holistique de Christian Schaller propose la thérapie par le rire, sous le vocable de « folie douce ». Mais n’est-elle pas aussi dangereuse, en fin de compte, dans sa manière de banaliser maladies et traitements ?

La « folie douce » comme méthode thérapeutique

« Par la folie douce, depuis plus de 30 ans, je guéris les malades mentaux », déclare sans hésitation Christian Tal Schaller, qui explique que la thérapie des chamanes, pratiquée dans des « hôpitaux spirituels » au Brésil, a même permis de guérir des pédophiles et des pervers sexuels par des massages, par l’écoute, la tendresse et l’éducation… Vaste programme !

Il se présente : « Je suis médecin en Suisse depuis 35 ans. Généraliste, puis orienté vers les médecines douces, l’homéopathie, l’acupuncture… J’ai découvert le chamanisme et la communication spirituelle avec les êtres de lumière, en canalisant. Je montre comment devenir son propre médecin, l’artisan de sa santé, accéder aux mondes non matériels par le voyage intérieur, rencontrer ses guides spirituels ». Schaller, apôtre de la « santé globale », est l’auteur d’une trentaine d’« ouvrages de santé », dont Éloge de la folie douce, dans lequel il prétend que la maladie mentale résulte du blocage des émotions, et que les médicaments chimiques empoisonnent l’esprit.

Avec son épouse Johanne Razanamahay, ils enseignent la « folie douce » à Genève et à Pierrelatte. Ils expliquent aux malades mentaux comment gérer leur folie, accepter leurs émotions, ne plus avoir peur de la violence en soi, mais l’exorciser par des gestes et des sons. La folie vient de la méconnaissance des « sous personnalités psycho actives », (SPPA), qui coexistent chez le malade mental, et de la difficulté à les harmoniser. C’est à cela que doivent conduire les exercices : « Imaginez ces exercices de “folie douce”, quand on les fait en groupe, tout le monde jouant à faire les fous ! On rit beaucoup dans ce travail. Lâchez vos émotions, allez voir vous-mêmes ce qui se passe, faites des voyages intérieurs. »

Qu’est-ce que la « folie douce » ? C’est celle, dit-il, de l’enfant ou du sage qui s’amusent et expriment toutes leurs émotions sans agressivité. C’est une folie contrôlée et consciente. « Elle fait du bien sans faire de mal. » L’apprentissage se fait par des exercices, tels que « tordre son visage dans tous les sens, loucher, tirer la langue, faire des sons bizarres, avoir l’air le plus idiot possible, ressembler à un monstre ou à un tigre rugissant, faire les mimiques et les “miaou” du chat, les aboiements du chien, les “yeux ronds” du poisson », grimaces qui expriment l’« enfant intérieur », thème cher au New Age, selon lequel l’enfant, que nous étions dès notre naissance, survit en nous comme un guide infaillible de notre conduite (Internal Self Helper). Schaller dit avoir été marqué par sa très stricte éducation protestante, qui lui a permis de découvrir que l’éducation judéo-chrétienne entraîne une hyperactivité du cerveau gauche, cerveau de la logique et du raisonnable, et la mise en tutelle du cerveau droit, cerveau de la spontanéité et de la créativité. Il faut donc apprendre à laisser ses émotions circuler à travers son corps. C’est l’objectif des stages de libération corporelle. C’est lors d’un tel stage, donné par « une ravissante thérapeute » qu’il a épousée par la suite, que Schaller confie avoir découvert la nature de la maladie mentale. Depuis, il apprend aux malades mentaux qu’ils sont « possédés » par des énergies étrangères, et que leur guérison viendra de la libération de leur cerveau droit, clé de leur épanouissement.

Efficacité proclamée contre la « médecine officielle »

Pour « preuves » de l’efficacité de sa méthode, il évoque, avec aplomb, les « centaines » de malades épileptiques et de schizophrènes qui sont guéris grâce à elle, et qui deviennent à leur tour thérapeutes, ainsi que son succès aux États-Unis. À son grand regret, mais à notre grand soulagement, il ajoute : « Les thérapies de régression dans les vies antérieures sont déjà enseignées dans beaucoup d’universités américaines, alors qu’elles n’ont pas encore droit de cité en France ». Plus surprenant encore de la part d’un médecin, Schaller affirme que la maladie d’Alzheimer est la conséquence de l’aluminium des vaccins, et des additifs alimentaires, qui empoisonnent l’organisme, ainsi que du manque d’ouverture du cerveau droit. Aussi, affirme-t-il, un chamane, dont le cerveau droit est « ouvert », ne peut pas souffrir d’Alzheimer !

Selon lui, la psychiatrie est dans une impasse. Il dénonce l’industrie pharmaceutique qui soumet la psychiatrie, les facultés de médecine, les hôpitaux, au dogme du « il n’y a que les médicaments qui marchent ». Il regrette que la France et la Suisse soient encore dominées par ce dogme, alors que, dit-il, ça change en Italie, et qu’au Brésil, à cause de la pauvreté de la population, des hôpitaux soignent par la seule force spirituelle ! Et parce que le rire est le meilleur médicament de l’âme, Schaller dit avoir participé avec son épouse au Rassemblement international des rieurs organisé par l’École du rire de Corinne Cosseron, à Frontignan, du 30 avril au 3 mai 2009, « avec notamment la distribution de “câlins gratuits” sur la place du marché… »

Christian Tal Schaller et la vaccination


Christian Tal Schaller est également très en pointe dans les campagnes des ligues anti-vaccinales. Sur son site Internet, un texte rejette la vaccination comme dangereuse, les vaccins eux-mêmes étant présentés comme composés d’un cocktail de produits toxiques, de « microbes artificiels » mélangés à un « liquide composé de celules animales (poulet, souris, mouton, singe, vache) et humaines (sang, embryons avortés), souvent elles-mêmes contaminées » et autres agents de conservation, « véritables poisons » qui tuent le vivant.

Auteur de plusieurs livres sur le sujet, l’un d’entre eux, Vaccins : l’avis d’un médecin holistique est présenté ainsi par l’éditeur : « Les vaccins sont toxiques ! Ils empoisonnent les organismes de milions de gens ignorants de leurs effets négatifs sur la santé. Sont-ils aussi efficaces qu’on le prétend ? Certaines épidémies se sont bien arrêtées sans vaccins ? Alors… Et si on s’était trompé ? Et si les épidémies s’étaient arrêtées pour d’autres facteurs que les vaccins ? Et si les virus et les bactéries n’étaient pas des ennemis, mais au contraire des amis, lors qu’ils sont bien gérés par un système immunitaire en bon état ? Les recherches de la science moderne dans le domaine de l’immunité permettent de comprendre les graves erreurs de la “vaccinologie” qui ne subsiste que parce qu’elle génère des profits financiers pharamineux. Ne restez pas dans l’ignorance et l’inconscience mais prenez la responsabilité de votre santé ! »

Certes, l’éloge du rire n’est pas en lui-même critiquable. Le rire, un bon moral, un environnement serein, renforcent la résistance à la maladie, mais ils ne suffisent pas pour en guérir vraiment. C’est pourtant ce qu’affirme froidement ce médecin diplômé, figure d’autorité auprès de malades, lors de conférences ou dans des livres.

Dans son autre livre, Artisans de leur miracle, une des grandes aventures du troisième millénaire ou les miracles sont naturels, (2001, Vivez Soleil), Schaller prétend, entre autres aberrations, que la conception du cancer par « la plus grande partie de la médecine moderne » est fausse « parce qu’elle veut ignorer les travaux qui montrent qu’une cellule cancéreuse peut redevenir normale si son environnement se corrige. Tout cela parce que les milliards de francs (suisses ?) que rapporte la chimiothérapie du cancer bloquent toute pensée qui ose sortir des dogmes en vigueur ». Il critique la médecine en faisant de l’évolution de ses conceptions de simples modes changeantes, alors que, dit-il, l’homéopathie ne change pas, ce qui en prouverait la valeur : « voilà une médecine expérimentale qui s’appuie sur des lois fondamentales qui ne varient pas avec le temps. Les écrits de son fondateur, le docteur allemand Samuel Hahnemann, n’ont pas pris une seule ride en plus d’un siècle et l’homéopathie fonctionnera tout aussi bien au vingt-et-unième siècle qu’au vingt-deuxième ou au vingt-cinquième siècles ! » Il en est de même pour les grands principes de la médecine hippocratique, de la phytothérapie, de la médecine chinoise et de l’acupuncture.

Guérir par la douceur, même les maladies les plus graves

Paradoxalement, l’immuabilité des dogmes des médecines douces serait la caution indéniable de leur vérité, et de leur efficacité, alors que les progrès des connaissances et des techniques médicales seraient la preuve de leur incapacité. En fin de compte, l’affirmation péremptoire de ses croyances les plus farfelues suffit à Schaller. Aux malades du sida, il fait croire à leur guérison par la médecine naturelle, contre les statistiques elles-mêmes : « le sida est une maladie qui ne tue pas tous ceux qui en sont frappés. Il y a des « long term survivors », des « survivants longue durée », comme on les appelle aujourd’hui. Définitivement sortis de la peur, ils se sont guéris et sont devenus des gestionnaires avisés de leur propre santé. Ils sont des milliers à avoir fait cette expérience. Leur point commun est de ne plus croire que la guérison vient de l’absorption de médicaments ou de la soumission au pouvoir médical mais de l’adoption d’un mode de vie “ immunitairement positif”. De très intéressants travaux scientifiques apportent la preuve de l’efficacité de cette démarche. » Lesquels ? On ne sait pas !

Malheureusement, Schaller n’est pas seul à propager ce délire concernant l’efficacité des médecines naturelles sur les maladies les plus graves, qui détournent certains malades des traitements médicaux nécessaires à leur guérison. Ce discours illuminé est au contraire très à la mode, et beaucoup s’en servent, parvenant ainsi à manipuler et à séduire des gens, en bonne santé ou malades, disposés à croire sans preuves les discours les plus extravagants.

Une âme invulnérable contre un corps faillible

Pour mieux vendre ses idées et ses méthodes, le site Internet de Schaller est très complet. On y trouve la longue liste des activités de la « santé globale » : la règle des 3 V de l’alimentation (Végétale, Vivante et Variée), le jeûne, l’Amaroli (thérapie par l’urine), les lavements intestinaux, le rêve éveillé, les deux sortes de massages (« multidimensionnel », axé sur l’exorcisme, et « androgyne », pour réconcilier en soi l’homme et la femme), la gestion des émotions et des passions, l’éducation à la santé globale, le chamanisme, le channelling ou communication spirituelle (qui consiste à se brancher sur les mondes de lumière), la connaissance des SPPA, les accompagnements des vivants et des morts, et enfin pour couronner le tout, la formation d’holothérapeutes, avec stages (250 € par jour), une quinzaine de CD à 15 €, et deux vidéos à 28 €. Le programme des manifestations s’avère chargé, depuis la rentrée de septembre 2009.

Enfin, tout ça s’appuie sur une philosophie somme toute assez banale. Selon Schaller, notre âme invulnérable, immortelle, éternelle et universelle, s’est incarnée dans un corps, qui nous a fait perdre la conscience de notre nature divine. Nous devons nous voir comme des « apprentis de la vie ». C’est en libérant nos émotions que nous pourrons guérir des « blessures du cœur » que sont la folie, l’épilepsie, la schizophrénie, l’Alzheimer et bien d’autres troubles graves. Nous redeviendrons alors ce que nous sommes : « des êtres de lumière, immortels, éternels, magnifiques, souverains, venus sur la terre pour y créer tous ensemble une société planétaire de paix et de coopération consciente ».

Si la solution de tous nos maux était si naturelle et si simple, pourquoi ne pas y avoir pensé plus tôt, au lieu de gaspiller notre énergie dans des recherches médicales interminables et coûteuses ? Rions, faisons des grimaces, libérons nos émotions, vénérons la nature, et nous ne serons plus jamais malades !

Vers le nouvel âge d’or de la santé

L’avènement de ce nouvel âge d’or de la santé ne se fera pas, selon Schaller, sans que disparaissent pour toujours les symboles de notre aliénation à la médecine : « Il faudra un jour aller déboulonner la statue de Louis Pasteur qui a entraîné la société moderne dans une direction funeste, celle de vouloir combattre la maladie par des mesures médicales au lieu d’enseigner à tous les lois de la santé ! »

Petite remarque très matérialiste : à côté des stages et autres babioles, ce thérapeute pratique un prix unique de 100 € pour chaque prestation d’une heure, que ce soit une consultation, un channelling, un massage… sauf le massage androgyne, qui lui est à 160 €. Avec de tels tarifs, ce bon docteur ne doit pas craindre la crise ! Quant à ceux dont le porte-monnaie est dégarni, ils devront peut-être se contenter de rires, de câlins… et d’urine, pour être gagnés par la grâce.

Schaller fait feu de tout bois. Dans son approche « globale », il agrège l’homéopathie, la médecine chinoise et l’acupuncture, la phytothérapie, les thérapies par la lumière, le Yoga du rire, etc. En qualifiant ces pseudosciences de « holistiques », il tente de cautionner leur efficacité sur le cancer, le sida, la maladie mentale, l’Alzheimer, la dépression, l’aérophagie, l’asthme, la constipation. Si ce n’était pas aussi grave pour ceux qui en sont les victimes, nous pourrions en rire.

Les thérapies miraculeuses n’existent pas. Gardons à l’esprit cette sage parole de Cicéron dans le De Divinatione : « Ce qui ne peut pas se produire ne s’est jamais produit, et ce qui peut se produire n’est pas un miracle. »

[1] Pour un exposé plus complet de la « médecine nouvelle », de Hamer, voir entre autres l’article de Nadine de Vos « La biologie totale » dans SPS n° 274, octobre 2006

Le corps des femmes n'est pas en libre-service
Point de vue
24.11.10

Le corps des femmes est-il en libre service ? Il semblerait que beaucoup d'hommes, en France, considèrent que c'est le cas, puisque, chaque année, plus de 198 000 femmes sont victimes de viol ou de tentative de viol, selon l'Observatoire national de la délinquance.

Selon les représentations courantes, le viol est le fait de psychopathes qui s'attaquent à des inconnues dans des endroits isolés. En fait, dans la plupart des cas, les femmes violées connaissent leur agresseur : mari ou compagnon, collègue, voisin… Les violeurs sont des hommes ordinaires. Cela n'a rien de surprenant, puisque la croyance qu'il existerait des "pulsions sexuelles irrépressibles" des hommes – mais pas des femmes – reste extrêmement répandue ; le viol serait en partie excusable, quand, soi-disant, "on ne peut pas se retenir".

En réalité, le viol n'a rien à voir avec la biologie : il est inscrit dans une conception culturelle et construite de la sexualité hétérosexuelle. Malgré l'émancipation des femmes durant ces quarante dernières années (notamment grâce à la contraception et à l'avortement), la sexualité hétérosexuelle continue à être imaginée et vécue de manière profondément inégalitaire : elle est censée tourner autour du désir et du plaisir masculins, et le désir et le plaisir féminins ne sont que secondaires – la cerise sur le gâteau en quelque sorte. Ainsi, un rapport sexuel sans pénétration ne sera souvent pas considéré comme un véritable rapport sexuel, mais un rapport sexuel sans orgasme féminin, si.

Toutes nos représentations collectives véhiculent l'idée qu'un homme doit "conquérir" sa partenaire ; il est le chasseur et elle est la proie. Combien de films, de livres, mettent en scène cette répartition traditionnelle des rôles : dès le plus jeune âge, on donne pour modèle du couple La Belle au bois dormant – la princesse attend passivement, tandis que le prince pourfend, combat, enfonce la porte. Qui n'a en mémoire des scènes de films où le héros force l'héroïne à l'embrasser, voire plus – et finalement elle est ravie. Sans parler de la publicité et de ses stéréotypes…

Le désir et la parole des femmes doivent avoir la même place, la même valeur que ceux des hommes. "Quand je dis non, c'est non" : un principe tout simple qui doit enfin être respecté !

Pour que la honte ne pèse plus sur les victimes mais bien sur les violeurs, pour que chacune et chacun prenne conscience que le viol est un comportement criminel qui s'ancre dans la domination masculine persistante de nos sociétés, Mix-Cité, Osez le féminisme et le Collectif féministe contre le viol lancent une pétition. Tous et toutes, nous pouvons décider de choisir un autre type de relations femmes-hommes.

Béatrice Gamba, Mix-Cité, Caroline De Haas, Osez le féminisme !, Emmanuelle Piet, Collectif féministe contre le viol

La métamorphose du pétard
24 novembre 2010
par Benjamin Campion

Cette note dévoile quelques aspects de l’intrigue de Nurse Jackie, de Rubicon, de Weeds et de Breaking Bad.

Assis sur le banc d’un parc, Walter Bishop s’allume tranquillement un petit “splif”, il tire une taffe et le tend à Nina Sharp. En souvenir de leurs jeunes années, où ces deux-là ont fumé (du moins on le suppose) de l’herbe qui fait rire. Etranges images de Fringe. Il n’y a pas d’âge pour consommer des substances illicites et la scène peut prêter à sourire. Elle peut également indigner, ce qui est compréhensible, mais je ne trancherai pas ce débat. Admettons que si la dépendance aux drogues (celles qui poussent dans les champs et celles qu’on trouve dans l’armoire à pharmacie) peut être considérée comme un fléau, elle est avant tout une bénédiction pour les scénaristes.

Les substances prohibées se sont largement généralisées dans les séries télévisées, suivant en cela une tendance visible dans la société. L’accès au cannabis, par exemple, est devenu une banalité au cours des 20 dernières années, il n’y a donc rien d’étonnant à ce que la toxicomanie et la drogue s’imposent comme axes de fictions aussi différentes que The Wire, Weeds, House, Nurse Jackie, Breaking Bad… mais aussi, concernant l’alcool, Boardwalk Empire (sur la Prohibition) et Mad Men.

Que les séries parlent de ces comportements “addictifs” n’est pas gênant en soi. C’est plutôt la manière dont elles en parlent qui peut interroger. Force est de constater que Matthew Weiner a parfaitement assimilé l’élégance de la fumée s’échappant d’une cigarette et le bruit des glaçons s’entrechoquant au fond d’un verre de Martini. Cela lui permet de rendre un vibrant hommage à la Nouvelle Vague, au cinéma hollywoodien d’après-guerre et au néoréalisme italien. Paradoxalement, le réalisme dans ce cas n’est pas de mise. Beaucoup repose sur l’esthétique. Difficile d’imaginer Don Draper bedonnant et le souffle court, mourir d’une crise cardiaque d’ici une dizaine d’années. En attendant, le bougre conserve un corps d’athlète, son pouvoir de séduction auprès des femmes (même si Peggy Olson le rappelle à l’ordre) et réussit l’exploit de gravir tous les étages de la tour Sterling-Cooper sans défaillir, pendant que ce bon vieux grisonnant de Roger crache ses poumons.

Poudre aux yeux


Dans Nurse Jackie, il ne faut pas moins de deux saisons à Kevin Peyton pour comprendre que son épouse n’est pas seulement une infirmière avisée et une maman affectueuse, mais aussi une accro à quelques substances prescrites uniquement sur ordonnance et au Vicodin (un mal qu’elle partage avec l’un de ces médecins qu’elle trouve si arrogants: Gregory House). Si bien qu’on en vient plus à se préoccuper de ses adultères et des troubles sociaux de sa fille aînée que des risques pour sa propre santé. L’effet est même garanti lorsque Jackie déclare d’entrée de jeu, avec une pointe de provocation qui suffit à piquer la curiosité: “Seize granules. Ni plus ni moins. Un petit coup de fouet et ça repart“. Comme si elle avalait un Mars ou une canette de Red Bull. Rien de bien méchant, en somme ! “Quand on se fout de la morale, le moral est meilleur“, déclarait à ce titre le poète et chansonnier Albert Willemetz.

Tanya MacGaffin se remet, pour sa part, drôlement bien de ses passages répétés aux toilettes dans Rubicon (”Détendez-vous, je ne vais pas me mettre à sniffer des rails de coke sur la table“, rassure-t-elle ses collègues à son retour au bureau). De même Charlie Pace, surpris à se poudrer le nez dans les toilettes du vol Oceanic 815, ne doit pas ses pires convulsions à une violente rechute entraînée par la découverte inopinée de statuettes de la Vierge Marie contenant des sachets d’héroïne dans Lost. Quant à Tommy Gavin (Rescue Me), Jeremy Darling (Dirty Sexy Money), Hank Moody (Californication), les compères de Bored To Death ou la bande de potes d’Entourage, l’absorption inconsidérée de tout ce qui leur passe sous le nez ne semble pas tant constituer un objet de souffrance qu’une aide salutaire dans leur course frénétique vers l’avant.

Côté dealers, qu’ils s’appellent Nancy Botwin (Weeds) ou Walter White (Breaking Bad), ils ont d’autres chats à fouetter que de s’inquiéter des effets dévastateurs de leurs substances sur la clientèle. L’effet de la weed, devenue le logo emblématique de la série de Jenji Kohan, est d’ailleurs minimisé par la consommation comique qu’en font Doug Wilson, Andy Botwin ou son cousin ado Silas. Walter White peut lui se targuer de produire la méthamphétamine la plus pure du pays, un gage de qualité qu’on imagine destiné à rassurer les clients sur la violence des effets secondaires… Il est d’ailleurs assez symptomatique de constater que Jane, la petite amie de Jesse Pinkman, s’étouffe dans son vomi après une injection d’héroïne et non après avoir consommé de la meth fabriquée par Walter dont on ne voit que rarement les effets négatifs.

Bref, se droguer c’est dangereux. Les séries n’occultent pas ce constat (Lou Ashby meurt d’une surdose dans la saison 2 de Californication), mais les ravages liés à la toxicomanie sont le plus souvent édulcorés, voire présentés comme ne pouvant s’exprimer qu’à moyen terme, dans un avenir indéterminé et d’une manière relativement floue. On est donc très loin de la réalité sordide des dealers que voulait montrer The Wire ou de celle des drogués errant au coin de la rue dans The Corner. Et à des années-lumière des junkies de Requiem for a Dream, de Las Vegas Parano ou de 99 francs finissant avec un bras en moins ou la cervelle en bouillie.


Rejoignant le constat fait depuis longtemps par David Simon, un excellent article paru dans Le Monde daté du 24 novembre montrait comment le trafic de stupéfiants est devenu “partie intégrante de l’économie d’une partie des quartiers défavorisés“.

L’eau ferrugineuse

Prenant exemple sur la levée de la Prohibition par le président Roosevelt en 1933, certains font valoir que la légalisation des drogues dites douces pourrait constituer une solution, en réduisant l’intérêt du trafic. Une motion en ce sens a été rejetée par 56% des électeurs californiens lors des élections de mi-mandat au début du mois, malgré un puissant lobbying (quoique tardif) et un usage déjà autorisé dans le cadre médical. Cela témoigne des interrogations qui entourent la toxicomanie et de la difficulté de trouver un terrain d’entente sur un sujet qui demeure particulièrement sensible.

Concernant les drogues dites dures, l’injection supervisée dans des “salles de shoot” reste à l’état de simple réflexion de ce côté de l’Atlantique, malgré l’aval de l’ex-ministre de la Santé Roselyne Bachelot et la présentation récente des conclusions d’un an d’étude réalisée par l’association des élus pour la santé publique et le territoire. L’objectif de cette initiative, en termes de santé publique, est de réduire les surdoses et les infections par le VIH ou l’hépatite, tout en offrant une véritable passerelle vers le soin médicalisé.

Comme le déclarait récemment le professeur David Nutt, ancien conseiller du gouvernement britannique sur les drogues, ce serait d’ailleurs l’alcool le mauvais élève, car “plus nocif que certaines drogues illégales comme l’héroïne ou le crack, si l’on tient compte de ses effets autant sur les individus que sur l’ensemble de la société“. Si le petit joint qu’on s’allume histoire de se détendre bénéficie toujours d’une représensation assez “cool”, c’est paradoxalement l’alcool qui traîne la plus sale réputation du paysage audiovisuel américain. Malgré tous les efforts esthétiques de Matthew Weiner pour l’habiller d’une robe plus distinguée, il demeure le plus souvent associé à la notion de déchéance.

Jack Shephard (Lost) devient une épave après s’être évadé de l’île des disparus en traînant le boulet de ses remords derrière lui. Abby Lockhart (E.R.) peine à prendre des distances définitives avec le goulot, tiraillée qu’elle est entre sa mère bipolaire, ses patients déprimants et ses amours contrariées. Bree Van De Kamp (Desperate Housewives) noie le chagrin de la perte de son époux et le tracas causé par les déboires de ses enfants indisciplinés dans une bouteille de blanc… par jour. Quant au clan Gavin de Rescue Me, la bouteille leur sert de tuteur et ses membres obéissent au vieux diction du “hair of the dog“.

Un verre, c’est trop. Trois verres, ce n’est pas assez


Les héros de séries télévisées ont souvent l’alcool mauvais, et rares sont les fictions à oser encore jouer la carte des vertus euphorisantes et désinhibantes d’un bon tord-boyaux, si ce n’est dans le pur registre comique comme l’illustre Raj (The Big Bang Theory) à qui il suffit de croquer dans un baba au rhum pour perdre toute gêne vis-à-vis de la gente féminine. Faut-il voir dans cette timidité générale une perte de l’innocence de l’alcool, accusé numéro un des accidents de la route, pointé du doigt par des campagnes publicitaires à vous donner froid dans le dos (”Tu t’es vu quand t’as bu ?“). L’abus d’alcool est dangereux pour la santé, vous prévient-on en vous vantant hypocritement les mérites d’une bière. C’est en premier lieu un problème sociétal pris en charge par de multiples associations telles que les Alcooliques anonymes, dont les fameuses réunions en cercle ont été déclinées sous toutes les formes possibles et imaginables à la télévision.

Il n’en fallait pas plus pour susciter la parodie, à commencer par celle proposée par True Blood dont le lancement s’accompagna en 2008 de fausses publicités vantant les mérites d’une boisson à base de sang synthétique inventée par des scientifiques japonais: le Tru Blood. La boisson comme palliatif aux pulsions les plus irrépressibles de l’être humain (”Real blood is for suckers“), voilà un concept audacieux… et l’on peut dire que la vaste campagne de marketing virale organisée autour de la nouvelle série d’Alan Ball sur HBO aura largement atteint son but ! Ce sont les producteurs de houblon qui ont dû se frotter les mains.

Lancée début 2007 sur la chaîne britannique E4, Skins faisait, elle, le pari du réalisme en montrant les comportements de certains adolescents à l’égard de l’alcool et de la drogue. Pour justifier les abus commis, les créateurs Jamie Brittain et Brian Elsley présentaient des jeunes de Bristol qui cherchaient à oublier leur situation familiale difficile en se réfugiant dans le binge drinking (la cuite immédiate), pratique importée de Grande-Bretagne. La série fut, paraît-il, à l’origine d’un phénomène dans les soirées de jeunes. Admettons. Mais il semble que ceux-ci n’aient pas attendu la diffusion de celle-là pour expérimenter la beuverie. Malgré tout, le sujet est désormais considéré de santé publique par le Royaume-Uni et l’Irlande, et pris très au sérieux par la législation française confrontée à une recrudescence des open bars et des soirées étudiantes se terminant mal.

Tous recalés au contrôle anti-dopage

Pour justifier sa toxicomanie, chacun y va d’ailleurs de son excuse qui tente de ménager sa mauvaise conscience: John Cooper (Southland), Gregory House et Jackie Peyton ont des douleurs chroniques les orientant naturellement vers la prise d’analgésiques. John Carter (E.R.) devient accro aux antidouleurs après avoir été poignardé dans le dos par un patient schizophrène. Quant à Walter White (Breaking Bad) et Nancy Botwin (Weeds), pèsent sur leurs épaules des difficultés personnelles les poussant à se couper de leurs proches et à se débrouiller par eux-mêmes: un cancer du poumon en phase terminale, un fils handicapé et une femme enceinte pour l’un, un mari décédé et deux enfants adolescents à charge pour l’autre. Autant de problèmes qui viennent se greffer à une crise financière sans précédent, rendant d’autant plus forte l’attraction de valises remplies d’argent sans avoir à braquer une banque ou à s’accoquiner avec une riche héritière d’une grande marque de cosmétique.

Weeds n’hésite pas à pousser l’hypocrisie de son héroïne (d’accord, elle était facile…) jusqu’au paroxysme lorsque l’ingénue Nancy s’insurge de découvrir des armes à feu, de la cocaïne et des filles transiter par le tunnel caché dans la remise de la boutique de prêt-à-porter pour femmes enceintes dont elle assure la couverture. Du shit ? “Bien…” De la coke ? “Pas bien !“. Il y aurait donc une gradation dans l’acceptable, alors qu’au risque de passer pour un rabat-joie on pourrait faire valoir que tout produit modifiant la perception et la conscience de l’homme n’est pas libérateur mais aliénant. Là encore, le débat est ouvert et les arguments qu’offraient Charles Baudelaire dans les Paradis artificiels ou encore Henri Michaux dans Connaissances par les gouffres sont recevables.
Le Monde des Séries


La députée de Nogent revient au gouvernement

Marie-Anne Montchamp, porte-parole de République solidaire, le mouvement de M. de Villepin, a été nommée hier soir secrétaire d’État auprès de la ministre des Solidarités et de la Cohésion sociale.
LAURE PARNY ET DENIS COURTINE

C’est la deuxième fois qu’elle entre au gouvernement. Hier soir, Marie-Anne Montchamp a été nommée secrétaire d’État auprès de la ministre des Solidarités et de la Cohésion sociale, Roselyne Bachelot. A 53 ans, la députée UMP de la 7e circonscription (Nogent, Joinville, Saint-Maur-Ouest, Champigny-Ouest), qui va laisser son siège au maire de Joinville (voir encadré), retrouve ainsi l’un de ses domaines de prédilection.

A l’Assemblée nationale, elle appartenait à la commission des Finances et avait été nommée rapporteuse sur le budget de la Sécurité sociale. Un temps pressentie pour occuper les fonctions de ministre de la Santé, Marie-Anne Montchamp redevient finalement secrétaire d’Etat et devait définir hier le périmètre de ses fonctions.
Elle avait déjà été secrétaire d’État aux Personnes handicapées, dans le gouvernement Raffarin, en 2004 et 2005. « Cette mission s’inscrit dans la continuité de mon engagement constant au service des plus fragiles et de ceux qui peinent à trouver leur place dans notre société, commentait hier soir la nouvelle secrétaire d’Etat dans un communiqué. C’est donc avec conviction et émotion que je mènerai, avec Roselyne Bachelot-Narquin, ce chantier majeur pour créer et promouvoir de nouvelles formes de solidarités. »

La porte-parole de République solidaire, le mouvement politique fondé, avec elle, par Dominique de Villepin, le 19 juin, signe ainsi son retour dans les petits papiers de l’UMP. Un coup dur pour l’ancien Premier ministre. Marie-Anne Montchamp aurait d’ailleurs pris ses distances avec lui lors de la polémique qu’il avait provoquée la semaine dernière sur Nicolas Sarkozy. « Elle marche sur des œufs depuis quelque temps, n’ose plus par exemple prendre position contre Jacques JP Martin », commente Michel Gilles (Nouveau Centre), à ses côtés sur la liste qu’elle avait menée lors des dernières municipales contre le maire UMP de Nogent.

Lui, en tout cas, la déteste toujours autant. « Ceux qui ont pris la décision de la nommer ont fait une grave erreur, estimait hier soir Jacques JP Martin. Je les avais pourtant prévenus. Ils pensent peut-être qu’ils font une prise de guerre à Dominique de Villepin. Mais on ne peut pas récompenser une attitude qui relève de la traîtrise. Je connais cette femme depuis longtemps. Elle n’est pas fiable. Encore moins dans un gouvernement. Ceux qui l’ont nommée se sont fait bluffer. Je leur souhaite bon courage pour gérer une telle recrue. » Marie-Anne Montchamp n’a pas souhaité répondre hier soir aux propos du maire de Nogent.



mercredi 24 novembre 2010

Témoignages
Il y avait eu des blagues pas toujours drôles avant, quelques gestes un peu déplacés, les autres étudiants ont fait semblant de ne rien voir, c’était mon prof…

La honte doit changer de camp !


CHAQUE ANNÉE EN FRANCE, PLUS DE 198 000 FEMMES SONT VICTIMES DE VIOL OU DE TENTATIVE DE VIOL.
75 000 SONT VIOLÉES.
JE SUIS L’UNE D’ELLES, JE PEUX ÊTRE L’UNE D’ELLES


Chaque acte sexuel forcé est un instrument de déshumanisation. Il est une négation de notre volonté, le mépris de notre consentement. Les hommes ne sont pas plus que les femmes régis par des « pulsions sexuelles irrépressibles ». Le viol n’a rien à voir avec un désir soi-disant incontrôlable.
Il est une humiliation, une appropriation, une domination des hommes sur le corps et le sexe des femmes et des filles. Plus de 75 000 femmes violées par an : il ne s’agit pas seulement d’une somme de crimes isolés, à classer dans les faits divers, mais une marque que notre société reste profondément inégalitaire dans les relations femmes-hommes.
Sous l’effet de la peur, de la pression de notre entourage, de la volonté d’oublier, une majorité d’entre nous n’a pas porté plainte. Nous dénonçons la tolérance de notre société vis-à-vis du viol. En France, on estime que seulement 2% des violeurs sont condamnés.
Nous dénonçons la stigmatisation des victimes de viol qui doivent trop souvent affronter dénégations, accusations et rejet. Nous refusons de nous laisser culpabiliser sur notre tenue, notre comportement, nos fréquentations. Aucune honte ne doit peser sur nous. Nous devons être entendues sur ce que nous avons subi. Le viol est un crime. Les agresseurs doivent être jugés et condamnés.
Une femme sur 10 a été violée ou le sera au cours de sa vie. Dans 8 cas sur 10, l’agresseur est connu de la victime. Le viol n’est pas une fatalité. Il est le signe d’une société profondément sexiste.
Cette réalité peut changer. Cette réalité doit changer !
Nous refusons que la peur du viol imprègne notre quotidien et nos comportements. Nous voulons être pleinement libres dans l’espace privé et dans l’espace public.

SIGNEZ LA PÉTITION !


Nous exigeons :

Des moyens financiers supplémentaires des pouvoirs publics pour la prise en charge des victimes ainsi que pour soutenir les associations qui luttent au quotidien contre les violences faites aux femmes.
Une prise en charge des soins à 100 % pour les victimes lorsqu’elles sont majeures et la gratuité des soins pour les mineures, aujourd’hui insuffisamment appliquée.
Une formation des professionnels des secteurs social, judiciaire, médical, éducatif à la prise en compte des violences sexuelles et sexistes : dépister, prendre en charge, réprimer, prévenir.
Des campagnes d’information et de prévention des violences sexuelles en direction du grand public notamment à l’école, dès le plus jeune âge.
Un jugement des crimes sexuels exclusivement en cour d’assises.
Une enquête systématique à la suite des plaintes pour crimes ou délits contre la personne.

Vous avez été victime ?
Pour être aidée, tout en gardant l'anonymat, vous pouvez appeler la permanence téléphonique : Viols Femmes Informations
0 800 05 95 95
du lundi au vendredi de 10 à 19 heures, appel gratuit pour toute la France, y compris les DOM/TOM.

Vous avez été victime de viol, ne restez pas seule, ne gardez pas le silence. Silence et secret ne profitent qu'aux agresseurs.
Cherchez de l'aide et faites valoir vos droits en contactant :
  • La police au 17
  • Viols-Femmes-Informations 0 800 05 95 95
  • Du lundi au vendredi de 10 à 19 h
  • Numéro d'appel gratuit France et Outre-Mer
Si une femme vous confie avoir été violée, vous pouvez lui dire :
  • Je crois ce que vous me dites vous êtes très courageuse de m'avoir parlé
  • L'agresseur n'avait pas le droit de vous contraindre.
  • Le viol est un crime et son auteur est seul responsable de cet acte, vous n’y êtes pour rien.
  • Vous avez raison de faire valoir vos droits, je vais vous aider à trouver de l'aide.