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mercredi 1 février 2012


Des chercheurs français affûtent une nouvelle arme contre la maladie d'Alzheimer

LEMONDE.FR | 25.01.12
L'équipe du professeur Baulieu a étudié des coupes de cerveaux de patients décédés avec une démence, qui confirment une forte diminution de la protéine FKBP52 chez les personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer.
L'équipe du professeur Baulieu a étudié des coupes de cerveaux de patients décédés avec une démence, qui confirment une forte diminution de la protéine FKBP52 chez les personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer.Inserm
Le Monde.fr : Qu'avez-vous découvert ?
Etienne-Emile Baulieu : Nous avons découvert ce que je considère comme une arme. C'est une protéine, appelée FKBP52, qui pourra nous servir à contrôler le fonctionnement pernicieux d'une autre protéine, dite TAU, dont les pathologies sont décisives dans les processus qui causent la démence sénile et sa forme la plus courante : la maladie d'Alzheimer.
Il y a deux ans, nous avions publié, avec ma collègue Béatrice Chambraud, des résultats d'études réalisées in vitro, sur des cellules cérébrales isolées dans un tube à essai. Aujourd'hui, avec Julien Giustiniania, nous avons obtenu des résultats chez l'homme en accord avec les précédents : nous montrons que chez des personnes décédées de la maladie d'Alzheimer ou d'autres maladies neurodégénératives liées à la protéine TAU, il y a un effondrement de 75 % de la protéine FKBP52.
Nous avions cloné FKBP52 il y a vingt ans déjà, dans le cadre d'autres recherches. En l'observant plus à fond, on voit désormais qu'elle agit, selon les circonstances, comme un modulateur, un contrôleur du fonctionnement de TAU. C'est donc celle-ci qu'il nous faut "booster" à nouveau, dans le cerveau des malades, pour traiter la maladie.
Quelle est la prochaine étape ?
Nous sommes à la recherche de molécules qui nous permettront de stimuler la relation entre les protéines TAU et FKBP52. Cette dernière peut en effet être"droguée", c'est-à-dire que nous pouvons agir avec de petites molécules capables de se fixer sur des sites d'interaction présents sur FKBP52. Nous testons, nous "tripotons" une multiplicité de molécules, pour voir si l'une d'elles peut renforcer l'activité favorable de FKBP52.
Pour cela, nous travaillons avec des physiciens (l'équipe du docteur Lippens, au CNRS de Lille), qui observent les interactions entre les deux protéines, et qui mesurent, par résonance magnétique nucléaire, les modifications que nous tentons de causer.
Nous travaillons également sur des organismes vivants : des souris transgéniques et, depuis peu, des poissons-zèbres avec le docteur Marcel Tauk. Ceux-ci ont l'avantage de se développer très vite : ils passent en trois jours seulement du stade de l'œuf à l'âge quasi-adulte. Nous entravons le développement de leur système nerveux, en empêchant le FKBP52 de seformer. Ainsi, nous tentons de faire un tri parmi les molécules qui pourraient nouspermettre d'agir comme nous le souhaitons sur FKBP52.
Des poissons-zèbres dans un laboratoire scientifique à Taïwan, en 2005.
Des poissons-zèbres dans un laboratoire scientifique à Taïwan, en 2005.AP Photo/Taiwan Academia Sinica, HO
Pensez-vous pouvoir en tirer un traitement ?
Notre but, c'est d'obtenir un médicament pour guérir la maladie d'Alzheimer et les autres pathologies liées à la protéine TAU. Cela peut aller vite : j'espère que nous pourrons proposer une, deux ou trois structures de médicaments acceptables d'ici trois à cinq ans. Il faudra ensuite évaluer leurs effets sur l'homme, ce qui peut prendre un an. C'est aussi une question de chance : nous testons quantité de molécules, mais nous ne savons pas quand nous trouverons la bonne.
Nous voulons également mettre au point un test, qui permettra de mesurer le taux de protéine FKBP52 dans la période qui précède, de vingt ou trente ans, l'apparition des signes cliniques de la maladie d'Alzheimer. C'est une hypothèse : il s'agira de savoir si un taux abaissé peut indiquer un risque accru de développerla maladie.
Louis Imbert

Les Livres de Philosophie



HUMAIN - Une enquête philosophique sur ces révolutions qui changent nos vies

Monique Atlan et Roger-Paul Droit
Janvier 2012 - Flammarion
L'impossible d'hier est-il devenu le possible d'aujourd’hui? Produire des cellules artificielles, recomposer l'ADN, transformer nos cerveaux en machines artificielles, voir directement nos pensées sur un écran, réparer notre corps à l’infini grâce aux nanotechnologies jusqu’à repousser la maladie, la vieillesse, puis la mort... s’agit-il de science ou de fiction? Comment penser ces mutations scientifiques associées ò la révolution numérique, à la mondialisation, à l’écologie triomphante, à notre responsabilité planétaire? Sommes-nous face à une prospective caricaturale ou à une étape nouvelle dans l’histoire de l'humanité?

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Évolution des dépenses de santé liées à la dépression aux USA
Publié le 11/01/2012

Analysant les données du système d’assurance-maladie américain Medicaid de Floride [1] entre 1996 et 2005, une étude américaine examine l’évolution de la qualité des soins et du coût des dépenses de santé en matière de dépression. Durant cette décennie, les dépenses de santé ont grandi de 29 %, passant en moyenne de 2 802 $ par assuré à 3 610 $. Cette augmentation s’est produite malgré une diminution moyenne des dépenses d’hospitalisation de 42 %, passant en moyenne de 641 $ par participant à 373 $. Elle s’explique principalement par une amplification des dépenses liées à la pharmacothérapie (de l’ordre de 110 %) portant surtout sur l’emploi croissant des neuroleptiques (+949 %).
Les auteurs observent que cette « augmentation considérable » des dépenses de santé imputables à la dépression s’est accompagnée en parallèle d’« améliorations minimes » dans la qualité des soins et que le recours aux neuroleptiques dans une indication antidépressive a contribué de façon significative à l’augmentation des dépenses, mais en apportant seulement une « contribution modeste » à la qualité des soins. On constate une diminution importante de la proportion des patients hospitalisés pour troubles dépressifs (passant de 9,1 % à 5,1 %) et une diminution également remarquable de la part des psychothérapies dans les traitements dispensés (56,6 % à 37,5 %). Celle des neuroleptiques augmente par contre (passant de 25,9 % à 41,9 %), de même que celle des antidépresseurs (passant de 80,6 % à 86,8 %), tandis que celle des anxiolytiques reste stable (62,7 % à 64,4 %).
Les conclusions de cette enquête sont donc « mitigées » : part des psychothérapies et fréquence des suivis en baisse, dépenses de médicaments (surtout neuroleptiques) en hausse mais, en définitive, des changements modestes dans le rapport qualité/coût.
[1] Une mise en garde liminaire du site de Florida Medicaid donne le ton de l’austérité ambiante : « Nous déplorons que des mesures de restriction budgétaires nous empêchent d’actualiser ce site et de garantir l’exactitude des informations fournies. » http://healthinsuranceinfo.net/getinsured/florida/financial-assistance/medicaid/
Dr Alain Cohen
Fullerton CA et coll. : Ten-year trends in quality of care and spending for depression ; 1996 through 2005. Arch Gen Psychiatry 2011; 68(12):1218-1226.











La fécondité des Français ne connaît pas la crise

17/01/2012

Avec 2,01 enfants par femme, le taux de fécondité est resté élevé en France en 2011. Selon le dernier bilan démographique de l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE), la population française a continué de croître l’année dernière, atteignant les 65,35 millions d’habitants.
EnlarAvec 2,01 enfants par femme, le taux de fécondité est resté élevé en France en 2011. Selon le dernier bilan démographique de l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE), la population française a continué de croître l’année dernière, atteignant les 65,35 millions d’habitants.
Avec 349 000 personnes supplémentaires, la population française a poursuivi sa croissance en 2011 au même rythme que les années précédentes (+ 0,5 % contre + 0,3 % dans l’Europe des 27). Contrairement à la majorité de ses voisins européens, c’est davantage grâce à l’excédent des naissances (827 000) sur les décès (555 000) qu’au solde migratoire (77 000) que l’Hexagone et ses départements d’outre-mer réalisent cette « performance ». Avec 65,35 millions d’habitants (63,46 en métropole et 1,89 en outre-mer), la France reste la deuxième puissance démographique d’Europe derrière l’Allemagne et ses 81,8 millions d’habitants. Malgré un léger recul, la France conserve une fécondité élevée avec 2,01 enfants par femme contre 2,03 en 2010. Dans l’Europe des 27, seule l’Irlande affiche un taux de fécondité plus important (2,07 enfants par femme depuis 2008). Hors Union européenne, la France se situe notamment derrière l’Islande (2,2 enfants par femme en 2009 et 2010). Bien qu’encore très dynamique par rapport à des pays comme l’Allemagne, l’Espagne ou l’Italie (autour de 1,4 enfant par femme), le taux de fécondité français reste toutefois en deçà du seuil de renouvellement des générations (2,10 enfants). Entre 2010 et 2011, la diminution du nombre de naissances en France (- 0,7 %) résulte pour un quart d’un moindre nombre de femmes en âge de procréer et pour le reste, d’un niveau de fécondité inférieur.

L’accouchement toujours plus tard.

Après avoir franchi la barre des 30 ans, l’âge moyen de l’accouchement continue de progresser. « La part des mères qui accouchent entre 30 et 34 ans est passée de 26 % en 1991 à 33 % en 2011 et celle des mères âgées de 35 ans ou plus de 13 à 22 % », précise l’INSEE. Près de 5 % des femmes qui ont accouché en 2011 avaient 40 ans et plus (contre 2,2 % en 1991). À la naissance, les Françaises peuvent espérer vivre en moyenne jusqu’à 84,8 ans (+ 1 mois en 2011) et les Français 78,2 ans (+ 2 mois). « L’écart hommes-femmes, relativement important en France par rapport à d’autres pays européens a (...) tendance à se réduire », souligne l’INSEE. Les personnes âgées de 65 ans et plus représentaient en 2011 17,1 % de la population totale (11,2 millions) contre 16,7 % en 2010 et 16 % il y a 10 ans. Avec 16 millions d’individus, la part des moins de 20 ans reste stable (24,5 %). Du fait du vieillissement de la population, le nombre de décès continue d’augmenter mais à un niveau limité au regard de la population totale.« Mais tout cela va changer car les générations du baby-boom vont vieillir dans les années à venir, ce qui va mécaniquement augmenter le nombre de décès », explique Pascale Breuil, chef de l’unité des études démographiques de l’INSEE. Après plusieurs années de stagnation entre 2005 et 2009, le taux de mortalité infantile poursuit la baisse engagée depuis 2010, atteignant en 2011 son point le plus bas à 3,5 pour 1000 (contre 4 décès pour 1 000 naissances dans l’Europe des 27).« Cette baisse concerne aussi bien la mortalité la plus précoce (enfants décédés à moins de 7 jours) que la mortalité la plus tardive », précise l’INSEE.
› DAVID BILHAUT

Montauban. Le sport au service de la psychiatrie

centre hospitalier


Une unité d'activité physique et sportive adaptée a été crée sur le centre hospitalier depuis janvier 2011. Cette unité dirigée par le Dr Denes (psychiatre), comprend aussi un cadre de santé : Mme Lopes, une infirmière : Mme Kirchstetter et un éducateur sportif Mr Alvarez. L'activité sportive participeaux soins des patients de psychiatrie adulte, au travers de l'outil de médiation qu'est le sport. Le 5 janvier un tournoi de pétanque a été organisé au boulodrome du marché gare. Plus d'une centaine de participants venue d'autres hôpitaux de la région sud ouest se sont retrouvés pour partager un moment convivial et sportif. Ces différents hôpitaux sont adhérents de l'association « sport en tête ». Chaque hôpital organise une ou plusieurs journées autour d'une activité sportive. Ces rencontres permettent de lutter contre la ségrégation et la discrimination dont sont encore victimes, trop souvent, les malades mentaux. Sur le plan social, ces manifestations démystifient l'image inquiétante de la maladie mentale et sensibilisent la population à ces pathologies méconnues. Un grand merci au comité départemental de pétanque, à la mairie de Montauban, au conseil général et aux CH d'Agen, Auch, Figeac, Lannemezan, Marmande, Mt de Marsan, Lavaur, Pau, Toulouse;

Les Français vus par leur généraliste

C’est elle-même qui le dit. Le cabinet du généraliste, comme l’école, offre un excellent point de vue sur la société. « On en perçoit tous les dysfonctionnements ». Gilda Romeo, jeune sexagénaire toute menue et un brin réservée, mais intarissable une fois en confiance, a fait quasiment toute sa carrière à Sceaux, où elle s’est installée en 1981 pour tenter de pratiquer une « médecine humaniste et globale ». Dans son cabinet avec vue sur jardin, elle prend le temps d’écouter ses patients. Une demi-heure en moyenne, la consultation. « Ils se posent. Et ils ne parlent pas que de leurs maux physiques. Ils viennent chercher de l’aide dans un lieu de neutralité et de confiance ». Qu’a-t-elle donc remarqué des évolutions de la société française au cours de ses trois décennies de pratiques ?
Gilda Romeo, médecin généraliste à Sceaux depuis 1981. © Elodie Ratsimbazafy
Gilda Romeo, médecin généraliste à Sceaux depuis 1981. © Elodie Ratsimbazafy
L’image du médecin dans la société a changé
« En 2005, je me suis fait braquer par deux jeunes, avec un pistolet, qui voulaient de l’argent. Ils ont été attrapés, ils avaient braqué d’autres médecins avant moi. Là, je me suis dit qu’il y avait une évolution dramatique. Dans l’esprit des jeunes, le médecin brasse de l’argent. Et, bien que nous dispensions des soins à tous sans discrimination, bien que nous portions assistance, nous ne sommes plus respectés. C’est la même chose avec les pompiers… Il y a quelque chose de très transgressif dans tout cela. »
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samedi 28 janvier 2012


Avec sa loi sur la précarité, le gouvernement donne des gages aux fonctionnaires

LEMONDE | 25.01.12

Nicolas Sarkozy devrait finir son quinquennat par une réforme destinée àrasséréner les fonctionnaires et à contenter globalement les syndicats. François Sauvadet, le ministre de la fonction publique, devait présenter, mercredi 25 et jeudi 26 janvier, en première lecture au Sénat, un projet de loi visant à y résorberla précarité. Le plan, massif, concerne potentiellement 150 000 agents de l'Etat, des collectivités territoriales et du secteur hospitalier : ceux qui ne bénéficient pas du statut de fonctionnaires, voire qui enchaînent les contrats à durée déterminée (CDD).

La majorité de gauche au Sénat s'apprête à voter le texte, adopté à l'unanimité en commission des lois. Rapporteure du texte, Catherine Tasca, sénatrice (PS) des Yvelines, se félicite qu'il donne une traduction législative à un accord signé entre le gouvernement et six organisations syndicales (UNSA, CGT, FO, CFDT, CGC, CFTC, pas la FSU ni Solidaires).
Nicolas Sarkozy s'était engagé à faire cette réforme, en janvier 2010. Il l'a motivée, une nouvelle fois, le 11janvier 2012, lors de ses vœux aux fonctionnaires : "Ce n'est pas normal qu'au prétexte que vous travaillez pour l'Etat on vous renouvelle pendant six ans un contrat et on vous révèle la septième année que vous êtes un précaire." Sur ce point, la fonction publique fait en effet figure de mauvais employeur. La loi Dutreil de 2005 a rendu possibles les contrats à durée indéterminée (CDI) mais n'a pas jugulé la croissance du nombre de contractuels en situation prolongée. Or, ces derniers ne bénéficient pas du statut de fonctionnaire.
Dans l'ensemble de la fonction publique, ils sont plus de 890 000 contractuels, soit 16,8 % du total. Ils sont même 20,5% dans la fonction publique territoriale.
"TONNEAU DES DANAÏDES"
Pour combler ce que des syndicalistes appellent le "tonneau des Danaïdes" de la précarité, le gouvernement se donne deux armes: son texte instaure d'abord le basculement automatique en CDI de tous les agents ayant six ans d'ancienneté au moment de l'adoption de la loi. Ce sont 100000agents qui pourraient enbénéficier.
Le projet de loi prévoit aussi que tout contractuel en CDD avec deux ans d'ancienneté au moment du vote de la loi, ou déjà en CDI, pourra prétendre àdevenir titulaire. Jusqu'en 2016, il pourra passer des concours spécifiques qui prendront en compte son expérience. Ce sont 50000agents qui pourraient ainsiêtre titularisés.

Lors des négociations menées avec le gouvernement à l'automne 2010, les représentants des collectivités territoriales n'ont guère souhaité durcir le texte, pointent les syndicats et le ministère. "En nous montrant du doigt, le gouvernement est démago, réplique Alain Rousset, président (PS) de l'Association des régions de France. L'Etat a transféré aux régions et aux départements des centaines d'agents pour l'entretien des collèges et des lycées. Il avait pour habitude de les licencier d'année en année en juin pour lesréembaucher comme précaires en septembre. Nous les avons titularisés", souligne le président de la région Aquitaine.
Les syndicats ont bataillé, en vain, pour élargir les possibilités d'accès à une titularisation. "Le projet de loi facilite davantage le passage en CDI que la titularisation, regrette Jean-Marc Canon, (CGT fonction publique). On ne peut pas ne pas voir une volonté idéologique du gouvernement d'aller vers une extinction du statut de fonctionnaire", déplore-t-il.
Dans l'enseignement supérieur, les syndicats ont dénoncé, mardi 24 janvier, des amendements que le gouvernement a prévu de déposer lors de la discussion à l'Assemblée nationale, le 7 février. Ils viseraient selon eux à "exclure des milliers d'enseignants-chercheurs, de chercheurs et d'ingénieurs de recherche de la possibilité d'obtenir un CDI ou une titularisation""Cette question a fait l'objet de l'accord signé avec les syndicats en mars2011, mais nous sommes prêts à en reparler", répond le cabinet de M. Sauvadet. Le ministère assimile le courroux des syndicats sur ce point à une "surenchère entre eux", à la veille du vote du texte.
Béatrice Jérôme et Isabelle Rey-Lefebvre

La grande vieillesse mise en dernière demeure

ENQUÊTESeule une minorité des résidents en maison de retraite y sont arrivés de leur plein gré. Une décision qui reste difficile pour la famille et les médecins.

Par ERIC FAVEREAU


«Vous savez, ici, nous n’avons jamais de gens qui viennent en nous disant : "Je veux venir chez vous"», lâche ce jeune directeur d’un Ehpad (établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes), situé près de Paris. Terrible aveu. Ce serait donc toujours à reculons que l’on viendrait terminer sa vie en collectivité. Comme une fatalité à laquelle on ne pourrait pas échapper.

Vieillir en institution… C’est une des questions du débat qui aura lieu, cet après-midi à Paris, au Cnam (Conservatoire national des arts et métiers), organisé par le Centre d’éthique clinique de l’hôpital Cochin, en partenariat avec France Culture et Libération : quel lieu pour être vieux ? En d’autres termes, où les personnes âgées veulent-elle finir leur vie ? Certes, aujourd’hui on estime que près de 80% d’entre elles vont rester à domicile. Mais les autres, ont-elles le choix ? Qui décide ? Avec ou sans leur accord ?
Reclus.«Allez-vous en», tance ce vieux monsieur, 80 ans, ancien plombier d’origine polonaise. Ce jour-là, il est dans sa chambre, presque reclus. Il veut partir. Il vit dans une jolie maison de retraite près de Paris. Sur le mur de sa chambre, des photos de sa famille. Sa fille est à ses côtés, toute douce. On sent qu’elle s’est noyée dans cette histoire familiale. Que pouvait-elle faire ?«Je me suis beaucoup occupée de mes parents, mais depuis la mort de ma mère, mon père ne voulait aucune aide extérieure, sauf la mienne. Il voulait rester comme ça, chez lui. Il m’appelait tout le temps, il s’inquiétait tout le temps. Plus cela allait, plus cela devenait incohérent.» On la devine si fatiguée : «Trente fois par jour il m’appelait. Cela me faisait mal, de la peine, j’ai fait une dépression, il fallait que je m’occupe de tout. Je me suis rendu compte qu’il ne mangeait plus. J’ai essayé de le convaincre d’avoir une aide-ménagère. Cela s’est mal passé. Pour lui, je devais vivre avec lui, mais c’était impossible, mon appartement est tout petit. C’est le médecin traitant qui m’a expliqué qu’il ne pouvait plus rester seul. J’ai dit à mon père : "Tu ne peux plus rester seul." Il m’a répondu : "Oui, c’est vrai." J’ai repris : "Je vais te trouver une maison." Il m’a dit : "Fais ce que tu veux."» Et le voilà comme contraint dans un lieu où tout l’étage est fermé. Il peut aller dans le couloir, c’est tout. Il ne se croit pas dans une maison de retraite. Il pense être à l’hôpital, et bientôt rentrer chez lui. «Je le trouve un peu triste, dit sa fille, mais j’avoue que j’ai une relation [avec lui] nettement meilleure depuis qu’il est là.»
Cette fille avait-elle d’autres possibilités ? Une étude du Dr Dominique Somme, du service de gériatrie de l’Hôpital européen Georges-Pompidou (HEGP), publiée dans le bulletin du ministère de la Santé, a montré des chiffres impressionnants : sur 4 000 résidents dans 584 établissements pour personnes âgées, à peine 16% ont reconnu que «leur entrée est liée à une décision personnelle». Moins d’un pensionnaire sur deux a eu son mot à dire.«Les résidents ont le plus souvent vécu leur institutionnalisation comme un acte imposé par l’entourage où leur participation intervient assez rarement»,explicite le Dr Somme. Celui-ci note que le décideur principal de l’entrée en maison de retraite est d’abord la famille, suivie par le médecin, et, «dans 7% des cas, le résident n’a pas su dire qui avait participé à sa demande d’entrée en institution».
Ce sentiment de choix contraint se retrouve dans les enquêtes du Centre d’éthique clinique qui seront rendues publiques aujourd’hui. Comme l’avoue sans peine ce médecin d’Ehpad, «on n’a pas toujours l’accord de la personne. Dans la pratique, on est censé faire une réunion avec elle avant son entrée, mais à 80% elles ne donnent pas leur accord pour venir.» Un autre médecin coordonnateur : «Mais après, cela se tasse, la personne s’habitue, et on peut faire du travail avec elle.»
«Autonomie». Est-ce la bonne stratégie ? «On a fait une autre enquête, sur le bien-être des résidents en institution, raconte ainsi le Pr Olivier Saint-Jean (HEGP). Les résultats sont clairs : plus ils ont participé au choix de venir en institution, plus la qualité de leur vie sera importante et leur bien-être sensible.»
La question du consentement reste essentielle. Et complexe, car plus de deux fois sur trois, c’est la médecine qui impose son choix, évoquant une perte d’autonomie du résident, aussi bien physique que mentale, pour justifier l’institutionnalisation. Bref, il n’y aurait pas d’autres alternatives. A l’image de cette histoire, que ce vieil homme qualifie lui-même de «grand mensonge». Sa femme a 88 ans, diagnostiquée Alzheimer. Il raconte : «Ma femme, je m’en suis occupé, mais de plus en plus je ne pouvais plus. L’incontinence, c’est le plus dur. La changer, changer les draps tous les jours. A Paris, elle n’ouvrait pas la porte, elle ne répondait pas au téléphone.» Puis surgit cette accélération :«J’ai eu une blessure au genou, c’était la panique, je me demandais comment j’allais faire. J’ai dit à ma femme que j’allais me faire opérer, et qu’elle allait être placée temporairement. Je l’ai installée dans cette maison de retraite. Trois jours après, elle ne m’en a plus jamais parlé, ni de rien, ni de rentrer à la maison.»
De nouveau, il dit : «C’est mon grand mensonge, c’est un moyen pour éviter son retour à la maison.» S’y habitue-t-il ? «Après soixante ans de mariage, cela fait drôle à la maison. Il y a comme des fantômes qui restent. Avec ma femme on n’avait jamais parlé de ces choses-là. Si je me sens coupable d’avoir menti ? Non, triste.» Ce jour-là, sa femme déjeune avec les résidents ; elle est élégante, totalement absente. On ne sait quoi lui dire. «Oui, je suis bien, tout va bien, dit-elle. Ici, oui, c’est ma maison.»



«Ne jamais passer outre le consentement de la personne»

INTERVIEWJean-Marie Delarue, contrôleur des lieux de privation des libertés :

1 commentaire
Par ERIC FAVEREAU
Jean-Marie Delarue, contrôleur général des lieux de privation des libertés, s’interroge sur les conditions de placement des personnes très âgées dans les centres spécialisés.
Y a-t-il un problème de libre choix dans les maisons de retraite, aujourd’hui baptisées Ehpad (Etablissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes) ?
Oui. Je pense qu’il y a un certain nombre de personnes âgées mais aussi de personnes handicapées qui sont comme assignées à résidence. Une partie d’entre elles ont pu à un moment demander un hébergement collectif, mais cette demande ou ce souhait a pu s’effacer. Elles voudraient rentrer chez elles. Elles ne le peuvent plus. Il y a une volonté qui s’exerce ainsi contre ces personnes. Et cette volonté peut être d’origine médicale, familiale, voire administrative avec la tutelle. Et c’est un problème.
Il s’agit d’êtres en situation de grande fragilité…
Oui. Dans ces Ehpad, ce sont souvent des gens faibles, vulnérables, qui peuvent avoir de surcroît des comportements imprévisibles et hors normes. Face à eux, pour s’en occuper, nous avons parfois des personnes insuffisamment formées et en nombre trop faible. Vous avez tous les ingrédients pour que cela dérape, pour que le personnel perde patience et que les résidents payent le prix de cette impatience.
Mais comment y remédier ?
Il y a une véritable difficulté. Jusqu’à présent, pour les contrôler, il y a des inspections administratives, mais elles sont peu fréquentes, et se déroulent souvent dans des lieux où il y a des problèmes déjà pointés. Nous avons besoin de mécanismes de prévention, par exemple de personnes qui se rendent sur place et discutent pour voir si les choses se passent convenablement. Sur ce champ-là [les lieux de privation de liberté, ndlr],nous avons un savoir-faire ; nous avons des compétences, avec les inspections que l’on fait en grand nombre pendant plusieurs jours, par exemple dans les établissements pénitentiaires. Mais en principe, les gens venant volontairement dans les Ehpad, ce critère nous interdit d’y aller. Mais peut-on s’en satisfaire ?
Dans beaucoup d’Ehpad, il y a désormais un étage fermé, pour les malades dits fugueurs, comme ceux atteints de la maladie d’Alzheimer. C’est un vrai sujet. Ces malades sont souvent difficiles, les établissements sont inquiets, et ils voient leur responsabilité engagée. Et comme la vie dans le lieu collectif est difficile, le plus simple est alors de fermer les portes à clé. Cela ne diffère pas de certains lieux de psychiatrie, où des patients, hospitalisés librement, se retrouvent cependant dans des services fermés. Parce que l’on n’a pas les moyens de faire différemment. Mais il y a autre chose qui m’inquiète : aujourd’hui la tendance est de faire des Ehpad très grands, pour 120 résidents, sans personnel adapté. Le risque d’introduire des mesures sécuritaires déplacées en termes de libertés est important.
Finalement, face à la grande vieillesse, quels sont les repères pour agir ?
On ne doit jamais passer au-dessus du consentement de la personne. Il est anormal que l’on décide de la manière dont certaines personnes doivent vivre, et cela sans leur accord. Surtout que depuis la loi Kouchner, c’est un principe absolu : le consentement aux soins. L’hébergement des personnes âgées ne doit pas faire l’économie de procédures.

La maternité et le handicap parmi les premiers critères de discrimination au travail


La grossesse et la maternité, font partie des premiers critères cités par les personnes qui s’estiment victimes de discrimination au travail, selon un sondage CSA rendu public ce mercredi par le Défenseur des droits et l'Organisation internationale du travail (OIT). Du côté des embauches, le handicap et le fait d'être atteint d'une maladie chronique font partie des premiers critères de discrimination retenus pour plus de trois sondés sur 10. Le fait d'être séropositif ou atteint du sida, est aussi cité par 2 personnes sur 10 environ.
Au total, plus d'un Français sur quatre (26 % parmi les fonctionnaires publics et 28 % parmi les salariés du privé) affirme avoir été victime de discrimination au travail et plus d'un tiers en avoir été témoin, selon ce sondage réalisé auprès d’un échantillon représentatif de 1010 personnes.
A Toulouse, les enfants en deuil ont leur groupe de parole
TOULOUSE - Les enfants qui ont perdu un frère, une soeur ou un parent, doivent souvent se débrouiller face à leur douleur. Pour les aider à surmonter le deuil, des spécialistes ont créé à Toulouse des groupes de paroles où ces enfants peuvent échanger, une expérience unique en France.


L'idée, c'est de faire de la prévention, et d'éviter que ces enfants n'arrivent plus tard en psychiatrie, dit Jean-Philippe Raynaud, responsable du service universitaire de psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent au CHU de Toulouse. 



Des ateliers de paroles d'enfants sont expérimentés depuis 2006. D'abord destinés aux jeunes endeuillés dans leur fratrie, des groupes de paroles sont aussi prévus depuis 2011 pour ceux ayant perdu un parent (800.000 enfants ou jeunes de moins de 25 ans sont dans ce cas en France, ndlr).



A l'origine de cette initiative, l'équipe d'Agnès Suc, responsable du centre de soins palliatifs pédiatriques à l'hôpital des enfants de Toulouse-Purpan et animatrice du Réseau Enfant-Do en Midi-Pyrénées, dont l'objectif est de prendre en charge la douleur des enfants en fin de vie.



On avait des prises en charge dans des situations palliatives mais on se posait beaucoup de questions sur celle des frères et soeurs de ces enfants, a-t-elle expliqué mardi lors d'un point de presse aux côtés des parties prenantes à l'expérience, financée par les Fondations APICIL de lutte contre la douleur et OCIRP de protection de la famille pour un coût annuel de 20.000 EUR.



La dynamique de groupe permet aux enfants d'échanger entre eux et de mettre des mots sur la douleur psychique qu'ils partagaient jusqu'alors en silence, et ce travail facilite considérablement le processus de deuil, explique l'équipe.



Car en général, ces enfants ne manifestent pas ouvertement de signes de souffrance. Ils tentent de jouer un rôle, comprenant que comme ça va déjà mal, ils ont intérêt à se tenir à carreau et à donner le change, dit Agnès Suc. 



A la fois, ils vont bien en apparence et à la fois ils sont dans une souffrance terrible, renchérit Véronique Lutgen, médecin-psychothérapeute qui anime avec sept autres professionnels les groupes de paroles.



Les ateliers réunissent entre six et dix enfants qui ont eu une consultation préalable destinée à discerner s'ils souffrent de pathologies nécessitant un traitement particulier. Le groupe se verra quatre fois autour de supports comme le dessin ou les collages, avant de nouvelles consultations individuelles.



Les adolescents sont mélangés aux petits car ces derniers, très spontanés, disent des choses énormes en dix secondes, ce qui pousse leurs aînés plus taciturnes à parler aussi, témoigne le Dr Lutgen.



Les enfants comparent leurs expériences. On voit combien ils font d'efforts pour protéger leurs parents, ajoute-t-elle. Ils se demandent: +et toi tu fais comment pour annoncer une mauvaise note+.



Elle cite le cas d'un jumeau qui se met à raconter l'accident dans lequel il a perdu son frère, suscitant l'aveu d'une petite fille qui dit dans un souffle qu'elle aussi a vu mourir un membre de sa famille.



La confrontation des expériences permet également aux enfants de s'apercevoir qu'on ne meurt pas tous de la même façon et d'en être paradoxalement soulagés. C'est l'occasion d'aborder le sentiment de culpabilité que peuvent éprouver des enfants qui s'étaient disputés avec le défunt.



Dire les choses permet d'éviter qu'elles ne se figent, explique le Pr Raynaud. L'idée, c'est qu'ils ne soient pas persécutés de l'intérieur par un traumatisme, ajoute Michel Vignes, pédo-psychiatre.


(©AFP / 24 janvier 2012 17h27)