Dirigé par le philosophe Yves Charles Zarka, «la France en récits» rassemble les analyses d’une soixantaine de contributeurs qui postulent que l’identité d’une nation se constitue autour d’une pluralité des points de vue plutôt qu’à travers un discours univoque. Entretien.
Dans un vignoble près de Restigné (Indre-et-Loire), en 2012. Photo Cyril Chigot
Le terroir et les prix littéraires, la langue et le pouvoir aux Antilles, Napoléon, les conflits sociaux et les droits de l’homme : la France en récits met en avant les points névralgiques de l’identité de la France, les récits par lequel elle se représente elle-même. Réalisé par une soixantaine de contributeurs, philosophes, sociologues, historiens, linguistes, ce vaste panorama propose une variété de traitements, parfois affirmés et générateurs de débats. Entretien avec le philosophe, professeur émérite à l’université de Paris-Sorbonne et directeur de l’ouvrage Yves Charles Zarka, également fondateur de la revue Cités, qui fête ses 20 ans.
Pourquoi avoir voulu aborder la France par ses récits ?
Il m’est apparu que la question du récit était tout à fait centrale dans la formation d’une identité, qu’elle soit individuelle ou collective. Je ne dis pas du tout que la centralité de la question du récit n’a pas été remarquée, au contraire : d’une certaine manière, tout le monde, dans le domaine historique aussi bien que dans celui, plus large, des sciences humaines et sociales, en convient. Le paradoxe tient à ce qu’elle n’a pas été prise pour objet en tant que tel. Or c’est la spécificité de notre démarche : montrer que le récit, ou plutôt les récits, sont constitutifs de ce qu’est un peuple ou une nation, ce qui lui donne une unité (à travers la pluralité et la conflictualité des récits) et une identité (à travers la diversité des vécus).