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Articles, témoignages, infos sur la psychiatrie, la psychanalyse, la clinique, etc.

mercredi 8 décembre 2010

Justice et psychiatrie, de la Seconde Guerre mondiale à nos jours

Séminaire de recherche proposé par le groupe « Corpus justice » du centre d’histoire de Sciences Po dans le cadre du programme de recherche "Sciencepeine" (financement ANR). Ouvert aux étudiants de masters (Sciences Po, EHESS) et à toute personne intéressée.

Responsables : Hélène Bellanger (Centre d’histoire de Sciences Po) et Marc Renneville (Centre d’histoire de Sciences Po, centre A. Koyré. Histoire des sciences et des techniques)

Lieu : centre d’histoire de Sciences Po, 56 rue Jacob 75006 Paris ; Horaire : jeudi, 14h -17h
L’expertise psychiatrique, l’irresponsabilité pénale des malades mentaux, la prise en charge des détenus souffrant de troubles psychiques, l’articulation du soin et de la peine, la possibilité d’une criminologie sont autant de questions mises en débat dans notre société. Elles sont aujourd’hui au cœur des politiques pénales occidentales et fortement médiatisées. Alors que la genèse de cette configuration médico-judiciaire au 19e fait l’objet d’une historiographie fournie, il existe encore peu de travaux sur la période récente. Ce séminaire entend contribuer à combler cette lacune en croisant l’apport de nouvelles recherches avec les pratiques et les mémoires des acteurs de cette histoire. Il s’inscrit dans le cadre du projet de recherche collectif ANR « Sciences, savoirs et exécutions des peines 1911-2011 »

1. jeudi 18 novembre 2010 : Psychiatrie et prison, une histoire de longue durée.

2. jeudi 9 décembre 2010 : De l’aliéné-criminel au malade difficile. La genèse oubliée des unités pour malades difficiles (1870-1910) Intervenante : Véronique-Fau-Vincenti (ANR Sciencepeine)

3. jeudi 20 janvier 2011 : Hôpitaux psychiatriques et prisons pendant la seconde guerre mondiale Intervenantes : Isabelle von Bueltzingsloewen (Université de Lyon 2) et (sous réserve) Corinne Jaladieu (Musée virtuel de la Résistance)

4. jeudi 10 février 2011 : La psychiatrie en réformes : la psychothérapie institutionnelle et la sectorisation Intervenant : Nicolas Henckes (Centre M. Halbwachs, CNRS) http://www.criminocorpus.cnrs.fr/article692.html




COME 4 NEWS

La maladie mentale aux États Unis
30 Nov 2010
                      
Aux États Unis, des institutions nationales américaines, opérant dans le domaine de la santé, estiment que près de 20 pour cent des américains ont souffert d’une maladie mentale en 2009.
En effet, selon un rapport  publié par l’Institut National de la Santé Mentale (NIMH), l’Institut National des Abus de Drogues (NIDA) et l’Administration des Soins Mentaux et de la Toxicomanie (SAMHSA) ainsi que par d’autres départements gouvernementaux de santé, ces faits sont essentiellement dus à la persistance du chômage et à l’abus de substances.

Les jeunes adultes, âgés de 18 à 25, représentent la plus grande fourchette des malades mentaux - à peu près 30 pour cent – tandis que les personnes âgées de50 ans et plus, ne représentent que 14 pour cent.
"Un grand nombre d'Américains ne reçoivent pas l'aide dont ils ont besoin et on perd, de plus en plus, les possibilités d’intervenir pour les prévenir au moment opportun», déclare, dans un communiqué, l’administratrice de SAMHSA Pamela Hyde. "Les conséquences pour les individus, les familles et les communautés peuvent être dévastatrices. Si elle n'est pas traitée à temps, la maladie mentale peut entraîner un handicap et conduire à la toxicomanie, au suicide, à la baisse de la productivité, et à la discorde familiale.", ajoute la responsable américaine.

2009 était une année caractérisée par l'effondrement de l'économie américaine. En 2010 aussi, le taux de chômage à l’échelle nationale était juste à un peu moins de 10 pour cent.
Selon SAMHSA, Les conditions économiques et les mauvaises perspectives de l’emploi ont également poussé 6,1 millions de malades mentaux adultes à délaisser le traitement, en raison de leur constante peur de ne pas pouvoir acheter, régulièrement, les médicaments appropriés.

Aux États Unis, cette maladie n’est pas récente. Selon un rapport publié plus tôt cette année par le « Centre pour l’Avancement de la Santé » (CFAH), l'utilisation généralisée des tranquillisants durant les années 80, a suscité de vives critiques. Dans les années 90, la dépression est devenue la maladie la plus répandue et a traitée, souvent, par la fameuse  «pilule du bonheur », le Prozac.

La dépression demeure la principale cause de la maladie mentale aux Etats Unis. En 2009, 15 millions d'américains ont connu la  dépression majeure, selon le rapport du NIMH. Le chômage est considéré aussi comme un facteur important  puisque 10 pour cent des chômeurs souffrent déjà de dépression sévère.

Sources :

1-SAMHSA
http://www.samhsa.gov/newsroom/advisories/1011180411.aspx
http://oas.samhsa.gov/NSDUH/2k9NSDUH/MH/2K9MHResults.pdf
2-psychcentral.com
http://psychcentral.com/news/2010/03/29/diagnostic-trends-in-mental-health/12411.html


L'étonnant parcours de Quentin, schizophrène, qui peut travailler « comme tout le monde »
19.11.2010

Jusqu'à mardi se tient la semaine pour l'emploi des personnes handicapées. L'occasion pour l'ESAT de Lomme de faire découvrir son programme qui a vu le jour en début d'année : « l'ESAT Hors-les-murs ». L'établissement accompagne les personnes handicapées psychiques. Sa particularité est de mettre ses bénéficiaires à disposition des entreprises. Parmi eux, Quentin, 29 ans, que la schizophrénie n'a pas empêché de se tourner vers l'avenir.
PAR CÉCILE DEBACHY

Lorsque l'on discute avec Quentin, ses grands yeux bleus-verts, son sourire et sa détermination nous interpellent. On a beau chercher un signe, le petit quelque chose, on ne trouve pas. D'ailleurs, nous ne sommes pas les seuls. « Quelques semaines après son arrivée dans l'entreprise, on s'est posé la question de savoir de quoi il pouvait bien souffrir. Encore maintenant, on ne se rend compte de rien ! », explique Nathalie Schaefer, assistante chef de produit chez Cyrillus et tutrice de Quentin.

Première victoire pour le jeune homme. D'ailleurs, hasard de la rencontre, ce n'est qu'en notre présence que ce dernier révèle à ses collègues sa maladie. « En fait, j'entends des voix », raconte t-il très simplement. Plus précisément, Quentin est atteint de schizophrénie. Une maladie psychique qui s'est manifestée alors qu'il n'avait que 20 ans. « Un coup dur » pour le jeune homme, alors en DEUG de psychologie, ce qui ne l'empêche pas de décrocher son diplôme.

La suite : « C'est une série de phases parfois très dures, des passages à vide, des dépressions. » Mais il s'accroche car il ne veut pas faire « de cet accident de la vie », un frein pour son avenir. Alors, il enchaîne les petits boulots, même si parfois la maladie reprend le dessus et le contraint à alterner les séjours en hôpital. « La plupart du temps, c'était pire. Moi ce que j'ai besoin, c'est de mener une vie normale, de me sentir utile. » Une fois son état stabilisé, grâce aux différents traitements, il intègre, en septembre dernier, l'ESAT Hors-les-murs de Lomme. Un des neuf établissements nationaux de ce type dont le but est de permettre aux personnes souffrant de handicap psychique de se réinsérer dans le monde professionnel classique.

Très vite, pour lui, tout s'enchaîne, puisqu'après avoir décroché un stage de quelques semaines chez Cyrillus à Tourcoing, il se voit proposer un contrat par cette entreprise : « une mise à disposition » jusqu'en avril qui pourrait évoluer sur une embauche définitive. Son quotidien, il le passe désormais dans le showroom de la société dont il est le gestionnaire. Parfois, tout n'est pas toujours facile, surtout à cause de la fatigue due au traitement. Mais Quentin s'efforce d'aller au-devant de son handicap. Dans cette tâche, il peut compter sur le soutien de l'équipe qui l'entoure et de Nathalie, sa tutrice et référente dans l'entreprise. Une oreille attentive qui le guide, le conseille, lui permet de réussir cette intégration. Ce retour à l'emploi, Quentin le vit comme une bénédiction : « Ça permet d'avoir un lien social. Pour moi, c'est comme une thérapie, ça aide à ne pas cogiter. C'est une vraie reconnaissance. » Une autonomie professionnelle longtemps espérée qui lui permet aujourd'hui de réaliser ses projets. Prochaine étape ? « Prendre un appartement, pour être vraiment autonome. »

Schizophrénie : la plupart des patients ne prendraient pas leur traitement
29.11.2010

Les psychiatres estiment que plus de la moitié de leurs patients atteints de schizophrénie (53%), une maladie mentale, ne prennent pas ou seulement partiellement leur traitement. Présentée au Congrès de l'International Early Psychosis Association (IEPA) qui s'est déroulé lundi 29 novembre à Amsterdam (Pays-Bas), cette étude met en relief la dangerosité de ce manque d'adhérence au traitement, précisant que ces patients sont 5 fois plus enclins à rechuter que les patients traités.

Réalisée auprès de plus de 4.500 psychiatres originaires de 36 pays de la zone Europe, Moyen-Orient et Afrique, cette étude met en avant le fait que les médicaments antipsychotiques représentent le traitement le plus efficace pour lutter contre la schizophrénie.
Toutefois, plus de la moitié des patients atteints de schizophrénie ne prendraient pas leur traitement. Les chercheurs estiment ainsi que les patients concernés seraient sujets à des cas de rechutes et d'hospitalisation fréquentes.
"Dans les cas de rechutes fréquentes et d'hospitalisation, les malades peuvent se retrouver de plus en plus isolés et rencontrer plus de difficultés à trouver et conserver un emploi. Cela peut aussi entraîner une tendance accrue envers les actes de violence comme les suicides et les homicides", concluent les principaux auteurs de l'étude.

Schizophrénie et maniaco-dépression
4 décembre 2010

Quand ton cerveau t’emprisonne


Tous les midis, Jan s’installe avec ses collègues de travail pour partager son repas. La pause permise est d’une heure mais il ne reste jamais plus de 10 minutes. Calmement, il quitte la table pour passer au dessert : une cigarette qu’il fume seul, à l’extérieur.

Annie Mathieu
Âgé de 37 ans, Jan apparaît timide, voire un peu renfermé. Quand on le côtoie régulièrement, on se dit qu’il est tout simplement solitaire. Le diagnostic des psychiatres est plus tranché: il est schizophrène et maniacodépressif. Il tient à discuter chez lui, dans son appartement de la Petite Italie à Montréal. Une fois la porte de son 4 et demi franchie, son univers s’ouvre, comme s’il lui était plus facile, entre ses quatre murs, de tenter d’expliquer l’inexplicable: les caprices d’un cerveau qui ne roule pas comme celui de tout le monde.

Santé mentale, des signes peu visibles

Il ne ménage pas les détails, prêt à démystifier la maladie avec laquelle il cohabite depuis 19 ans. Les préjugés, le manque d’infrastructures dans les hôpitaux et l’image véhiculée dans les médias l’agacent. Chez Jan (nom fictif), les signes sont peu visibles, si ce n’est, comme il l’affirme moqueur, qu’il ne socialise pas à la vitesse de l’éclair. Il tremble aussi un peu des mains, effet secondaire d’un des six médicaments qu’il doit prendre quotidiennement. On est loin du malade mental qu’on imagine et pourtant le cas de Jan est grave. «Je suis diagnostiqué schizo-affectif», affirme-t-il sur le ton de celui qui annonce qu’il a attrapé un rhume. L’effet est voulu. «Pour beaucoup de gens, cette étiquette est honteuse. Ils n’ont pas réalisé que cette maladie en est une comme les autres, comme le diabète. Un point c’est tout.»

Schizophrène et maniaco-dépressif

«Je suis schizophrène et bipolaire», élabore-t-il. Patiemment, il poursuit son explication : «Il existe plus de 250 variantes de la schizophrénie selon le Diagnostic and Statistical Manual (DSM)», le livre de référence pour les troubles mentaux. Il précise : «Mon cas est très grave». Surtout que sa maladie est jumelée avec des troubles bipolaires, ou maniacodépressifs, d’après l’ancienne terminologie.Les schizophrènes sont généralement isolés et vivent des périodes hors de la réalité, qui à leur apogée, sont appelées psychoses. La solitude extrême est aussi un mal commun chez les schizophrènes. Deux chats adorables, Pouêt et Rigatoni, comblent une partie de la solitude de Jan. Mais les félins ne sortent pas au cinéma ni ne partagent sa vie comme une amoureuse. «Physiquement, il y a aussi des différences, poursuit Jan. Par exemple, mes yeux ont parfois un comportement anarchique. Je ressens aussi moins les différences de température. C’est pourquoi il y a beaucoup d’itinérants malades qui semblent bien supporter le froid», explique-t-il.

Désinstitutionalisation et santé mentale


Parenthèse qui le laisse sceptique quant à la désinstitutionalisation des gens atteints de maladie mentale. «Beaucoup se sont retrouvés dans la rue. Ils n’avaient pas, comme moi, de famille pour les soutenir. Ces derniers ne prennent pas la médication requise, ce qui les rend instables. Ceci ne contribue évidemment pas à enrayer les tabous vis-à-vis ces maladies», explique-t-il.Quant à la bipolarité, cette maladie est caractérisée par des sautes d’humeur, de longues périodes de «down», de déprimes intenses suivies de longues périodes de «high» où on se sent invincible. «On peut même penser avoir énormément d’argent et dépenser de grosses sommes au-dessus de nos moyens réels», illustre-t-il. Pour Jan, tout a commencé à l’âge de 17 ans. Une grève étudiante au cégep l’oblige à rattraper le retard accumulé. Le stress monte pour le jeune homme qui étudie en sciences pures. Plutôt que sur les bancs d’école, il termine sa session dans un lit d’hôpital. Il y restera six mois, le temps de se remettre de sa première psychose majeure. «J’ai pété un câble, explique calmement Jan. Je croyais avoir des pouvoirs paranormaux … Quand je marchais à l’extérieur de l’hôpital, je pensais que j’étais radioactif!», se rappelle-t-il, entre deux bouffées de cigarette.Mentalement, l’expérience est épuisante, comme si le cerveau venait de courir un très long marathon. «En sortant de l’hôpital, je n’étais même pas capable de me faire cuire un œuf », poursuit-il. Il est maintenant contraint à prendre quotidiennement des médicaments pour stabiliser son état. «Tu vois ton avenir qui passe tout droit devant toi», explique-t-il, toujours impassible. « Les psychiatres ne te le disent pas directement mais te font comprendre que tu pourras pas faire n’importe quel métier», se rappelle-t-il. L’université est exclue. C’est cette nouvelle réalité qui est la pilule la plus dure à avaler.

Vivre comme tout le monde


Au salon, son diplôme de technicien en informatique sert de décoration sur des murs peu garnis. Il a fallu 8 ans à Jan pour terminer sa scolarité; son rythme de croisière a été ralenti par 4 hospitalisations, 2 psychoses et 3 cours par session. Ses professeurs n’ont jamais été mis au courant et Jan n’aura eu droit à aucun service spécialisé : la maladie mentale n’est pas considérée comme un handicap au même titre que la cécité. Son diplôme, il en est fier. Il fait partie des 40% de gens atteints de maladie mentale qui ont la capacité de travailler. Pourtant, il n’exerce pas un métier au mieux de ses compétences et de ses capacités intellectuelles. Sa technique en informatique n’est d’aucune utilité dans l’exécution de ses tâches quotidiennes. «L’informatique, ce n’était pas pour moi», explique-t-il, résigné à n’être bon qu’en théorie. Son travail actuel –il est commis de bureau– est routinier et exempt de tout stress. Cela lui convient mieux et correspond aux limites qu’il a appris à se fixer. Difficile de croire en discutant avec Jan qu’il éprouve des problèmes qui l’empêchent de fonctionner normalement. Il explique avoir du mal à garder son appartement en ordre. Une femme de ménage payée en partie par le gouvernement l’aide à le garder propre. Après hésitations, il tente une explication peu convaincante : «Si tu es mélangé dans ta tête, c’est dur de faire du ménage.» Puis, voyant la réaction de son interlocuteur, il réessaie : «N’oublie pas que c’est le cerveau qui est affecté». L’argument est de taille, à la hauteur d’un homme qui a consacré beaucoup d’énergie à apprivoiser son handicap.


Washington enquête sur la santé mentale de la présidente argentine

Selon une note confidentielle révélée par WikiLeaks, le département d'État a interrogé son ambassade pour savoir si Cristina Kirchner "prend des médicaments" pour "contrôler son stress".

Le département d'État américain a cherché à savoir auprès de son ambassade à Buenos Aires si la présidente Cristina Kirchner prenait des médicaments pour soigner ses "nerfs et son stress", selon un document confidentiel du 31 décembre 2009 révélé par le site WikiLeaks et publié lundi 29 novembre par El Pais.


"Comment Cristina Fernandez de Kirchner affronte-t-elle ses nerfs et son anxiété ? Comment son stress affecte-t-il sa conduite envers ses conseillers et ses prises de décision ?", demandait le bureau de renseignements du département d'Etat dans un message à l'ambassade des Etats-Unis.

"Quelles mesures prennent Cristina Fernandez de Kirchner ou ses conseillers pour l'aider à faire face à son stress ? Prend-elle des médicaments ? Dans quelles circonstances est-elle le mieux à même de contrôler son stress ? Comment les émotions l'affectent-elles dans la prise de décisions et comment diminue-t-elle la tension quand elle est angoissée ?", s'inquiétait encore la note diplomatique.
 
La "fureur de Nestor Kirchner"


Le document se préoccupait aussi aussi de la santé de l'ex-président et époux de la présidente, Nestor Kirchner, décédé le 27 octobre dernier, et de sa maladie gastro-intestinale et demandait s'il prenait des médicaments.

"Bien connu pour son fort tempérament, Nestor Kirchner a-t-il montré une tendance plus grande à osciller entre des émotions extrêmes ? Quelles sont les cibles les plus communes de la fureur de Nestor Kirchner", interrogeait le document.

Le bureau de renseignements du département d'Etat s'intéressait également aux relations de travail entre les deux époux, demandant si Cristina Kirchner partageait "la vision politique de confrontation" de son mari ou si elle tentait de modérer son "style politique très dur".


mardi 7 décembre 2010

Le DSM, bientôt détrôné ?
Publié le 16/11/2010

En matière de diagnostics et de recherches, la notoriété du DSM et de la Classification Internationale des Maladies (CIM) n’est plus à démontrer. Toutefois, quelques problèmes persistent. En particulier, le recours à des catégories basées sur un consensus de signes et de symptômes ne corrobore pas encore l’apport des neurosciences cliniques et de la génétique. Et les limites de ces catégories ne présentent pas de caractère prédictif pour la réponse au traitement. Enfin, point le plus important, ces catégories nosographiques ne parviennent pas à saisir les mécanismes fondamentaux, à l’origine d’une dysfonction. L’une des conséquences fut le retard porté au développement de nouveaux traitements ciblés sur la base des mécanismes physiopathologiques. On attend donc toujours « une identification des syndromes basée sur la physiopathologie, et susceptible d’apporter des progrès thérapeutiques. »

Cette attente n’est pas nouvelle, rappelle The American Journal of Psychiatry, car elle animait déjà les précurseurs du DSM-III, avec le débat sur l’élaboration de critères diagnostiques (Research Diagnostic Criteria). Et désormais, la difficulté consiste à proposer un cadre nosographique en forme de compromis : à la fois suffisamment rigoureux pour répondre sans ambiguïté aux observations cliniques, mais assez souple pour intégrer les découvertes des neurosciences et de la génétique. Avec l’objectif supplémentaire d’utiliser ce cadre comme un instrument pour « améliorer les perspectives thérapeutiques. » À titre d’organisme de financement majeur de la recherche en santé mentale aux États-Unis, The National Institute of Mental Health (NIMH) estime que « le moment est venu d’orienter les travaux dans cette direction » et lance un projet d’élaboration de critères (RdoC : Research Domain Criteria) pour développer la trame d’une recherche axée sur la physiopathologie, et intégrant en particulier les données des neurosciences et de la génétique. Avec l’ambition d’utiliser les apports de ce projet comme sources d’informations pour les contours d’une future nosographie intégrant davantage certaines données trop délaissées par les classifications actuelles.
Dr Alain Cohen

Insel Th et Cuthbert B : Research Domain Criteria (RDoC) : toward a new classification framework for research on mental disorders. Am J Psychiatry 2010 ; 167: 748-751.


dimanche 5 décembre 2010

Des militantes féministes derrière une banderole, pour les 40 ans du mouvement féministe, à Paris, le 26 août 2010.
AFP/THOMAS COEX


Elles sont quelques centaines à se réunir depuis vendredi 4 décembre et pendant trois jours pour un "congrès international féministe" au "Palais de la femme" – cela ne s'invente pas – à Paris, à l'initiative de "40 ans de mouvement", une association créée en 2009 par quelques "historiques" du Mouvement de Libération des Femmes (MLF) dont la chercheuse en sciences politiques Françoise Picq, l'ancienne journaliste Martine Storti ou encore la sociologue Liliane Kandel.

Placé sous le signe "des mutations géopolitiques", ce congrès fait la part belle à la thématique internationale, avec les interventions de nombreuses chercheuses et militantes américaine, malienne, indiennes, maghrébines, etc.

Entre cheveux grisonnants et trentenaires de l'association "Osez le féminisme" prêtes à assurer la relève, l'objectif n'est pas de se raconter des histoires d'anciennes combattantes mais de tenter de confronter les mots d'ordre, les analyses, les revendications des années 1970 à la réalité des années 2010.

"Notre volonté n'est pas d'entamer un grand lamento ou de présenter un quelconque livre noir de la condition des femmes, résumait Martine Storti en ouverture des travaux du Congrès, vendredi, mais d'examiner les effets pour les femmes du monde tel qu'il est devenu". Rien de tel pour cela que de tirer le fil des combats des féministes d'hier et de les confronter à aux réalités du monde d'aujourd'hui.

"NOTRE CORPS NOUS APPARTIENT"


Les militantes de "40 ans de mouvement" ont choisi pour cela de centrer leurs débats sur les deux "fondamentaux du féminisme que sont le travail et la maîtrise du corps", a indiqué Mme Storti. Que reste-t-il du slogan "notre corps nous appartient" à l'heure du retour du religieux et de la "marchandisation" des corps, lisible à travers les mères porteuses par exemple ? Que reste-t-il des revendications féministes exigeant d'être libérées du travail domestique quand celui-ci est effectué par des migrantes ?

L'émancipation des femmes du nord est-elle en train de se réaliser sur le dos des femmes du "sud" ? Comment analyser le fait que les institutions internationales placent comme jamais la question des femmes au premier plan ? S'agit-il d'une avancée ou d'une instrumentalisation ?

Ces questions seront au cœur des débats de ce congrès qui veut relancer la discussion entre les militantes à un moment où le féminisme, "après le creux de vague des années 1980 semble saisi d'un renouveau à la faveur de la prise de conscience que tout n'est pas gagné", estime Mme Picq.

FÉMINISTES LAÏQUES ET FÉMINISTES MUSULMANES


Très présente, la question de l'islam promettait, dès vendredi matin, d'occuper une large part des discussions. Sana Ben Ashour, qui préside l'association tunisienne des femmes démocrates, a mis les pieds dans le plat en évoquant les divergences de fond qui opposent, dans tous les pays où l'islam est religion d'état, "les féministes laïques et universalistes" et "les féministes musulmanes".

Une militante féministe a été arrêtée le 15 octobre 2008 à Téhéran. Ici, des femmes assistent à un match de football dans la capitale iranienne le 10 octobre.
AFP/BEHROUZ MEHRI


Les premières sont accusées par les secondes, d'une part d'importer une vision occidentale, d'autre part de s'être alliées avec des pouvoirs autoritaires et enfin d'être élitistes. Un mauvais procès, infondé de surcroît, que cette juriste s'est appliqué à réfuter.

En France même, la loi sur le voile a mis les féministes à rude épreuve. Les divergences entre deux figures du mouvement féministe, Christine Delpy qui défend un féminisme aux côtés de l'islam et Anne Zelensky qui collabore à Riposte laïque, une association aux positions contestées, planent sur les débats.

Le Congrès international féministe ne s'en plaindra pas, au contraire, ses organisatrices estimant nécessaire de comprendre, comme le soulignait Mme Storti, "ce qui est arrivé au féminisme français".
Brigitte Perucca

Le programme du congrès est accessible sur http://re-belles.over-blog.com/article-40-ans-du-mlf-congres-international-feministe-60015276.html


« Surveiller, ce n’est pas soigner»

À Toulouse, l’hôpital psychiatrique Marchant développe des pratiques sécuritaires alors que les syndicats revendiquent du personnel supplémentaire pour mieux soigner. Toulouse, correspondance.

Depuis un mois et demi, une grande tente est dressée devant l’entrée de l’hôpital psychiatrique Marchant. Des salariés de l’établissement y passent leurs jours et leurs nuits. Pour lutter contre le froid, des palettes en bois alimentent un brasero.

Quand le conflit social a débuté à l’hôpital Marchant, début octobre, il avait pour objet, comme partout, la loi sur les retraites et des situations plus locales : pour pallier les nombreuses absences au service gériatrie, la direction décidait de ponctionner les effectifs d’infirmiers en psychiatrie. « C’est ce qui a mis le feu aux poudres, raconte Marie Rajablat, de SUD. En psychiatrie, nous travaillons déjà à flux tendus. Et les soins ne sont pas les mêmes en gériatrie, où les malades souffrent d’Alzheimer, certains reçoivent des soins palliatifs. C’est un travail technique. » « La psychiatrie, enchaîne Cyril Moulin, lui aussi syndiqué SUD, repose sur un relationnel avec un patient. »

Or, « au fil des années, le niveau des soins psychiatriques s’est dégradé », estime Marie Rajablat, qui met en cause, bien sûr, le manque d’effectifs  : « Actuellement, 29 agents de psychiatrie ou gériatrie sont absents et non remplacés. » Pour Isabelle Morère, de la CGT, « il n’est pas normal que des infirmiers de psychiatrie aillent renforcer la gériatrie, même si ce n’est pas incohérent en situation d’urgence. Il faut revoir l’organisation pour que ça ne se reproduise pas ».

Le 18 octobre, il est décidé de planter la tente, « pour que les salariés puissent s’exprimer », ajoute Isabelle Morère. Et les syndicats élaborent une plate-forme de revendications. Il est demandé, bien sûr, l’embauche d’infirmiers pour pourvoir les postes vacants. Les syndicats veulent aussi avoir leur mot à dire dans l’audit décidé par la direction. Cet audit a pour première étape d’établir un diagnostic de la situation.

« La direction ne parle que de gestion ! »

Et les conséquences des sous-effectifs inquiètent Alexandre Boiron, non syndiqué : « Le patient en psychiatrie a besoin de repères. Par manque de disponibilité, nous ne travaillons plus sur la rencontre, la relation. Il manque ce quart d’heure d’attention envers le patient. Celui-ci devient plus angoissé, potentialise des passages à l’acte. » Marie Rajablat confirme : « On ne s’occupe que des situations les plus aiguës. » Selon Cyril Moulin, « on pare au plus pressé, on gère le symptôme. Nous sommes là pour diminuer les angoisses et la direction ne parle que de gestion ! Allons-nous devenir des porte-clés, des distributeurs de médicaments ? »

Bientôt, « l’hopital prison »

Si l’hôpital Marchant manque de personnel, il développe en revanche l’utilisation des matériels de surveillance. Les nouveaux bips, que chaque personnel peut déclencher en cas de situation violente, coûtent 800 à 900 euros pièce, selon le syndicat SUD, et il y en aurait environ cent vingt. La dépense pour ces seuls appareils, sans compter le système qui les relie, dépasserait les 100 00 euros. Ces bips peuvent être utiles mais, pour les infirmiers psychiatriques, il serait plus judicieux de renforcer les équipes soignantes. De même, des caméras ont été installées au service des urgences : « Ce n’est pas en surveillant le patient qu’on le soigne », soupire un infirmier qui confie que les espaces verts de l’hôpital sont maintenant éclairés en permanence la nuit. Marchant, illustration de cette tendance sécuritaire, accueillera d’ailleurs bientôt une unité hospitalière spécialement aménagée (USHA), que ses détracteurs appellent « l’hôpital prison ».

La CGT considère que le mouvement a permis des avancées (le CHSCT participe à l’audit) et n’occupe plus la tente. Aujourd’hui à 9 h 30, SUD et des non-syndiqués appellent toutefois à un rassemblement devant l’agence régionale de santé (ARS) à Toulouse.
Bruno Vincens

Tarbes. Il entre en résistance


Philippe Sarlat est infirmier libéral. Après avoir travaillé en psychiatrie à Lannemezan, aux urgences psychiatriques à Tarbes, dans le cadre des sapeurs-pompiers, il a choisi de se consacrer aux malades psychiques. C'est à ce titre qu'il a constaté que ceux qui ont opté [et c'est « un droit »] pour le secteur privé « se voient refuser les soins infirmiers et les soins spécifiques de réadaptation ou de réinsertion », n'ayant « pas droit », pour ces derniers, « à des structures de réadaptation et de resocialisation tels que les CATTP [Centre d'accueil thérapeutique à temps partiel] , CMP[Centre médico-psychologique] , et hôpital de jour », résume-t-il. Pour le refus de soins infirmiers, il explique : « Avec des infirmiers et des gens issus du milieu psychiatrique, nous avions mis en place un dispositif d'intervention. Pour certains dossiers, on appliquait l'article 11 de la Nomenclature générale des actes professionnels (NGAP), un acte rémunéré à 8,10 € brut la demi-heure et qui englobe des soins infirmiers, la prise en charge thérapeutique, la prévention, la surveillance clinique avec observation du comportement, mais aussi la stimulation par une activité sociale extérieure, l'orientation vers une association, notamment le GEM, ou un travail en commun avec l'Anpaa dans le cas de sevrages à domicile… » Lors d'un contrôle de Sécurité sociale, il lui a été signifié qu'il ne devait pas appliquer l'article 11 de la NGAP, mais l'article 10, qui consiste seulement « en l'administration et la surveillance d'une thérapeutique orale au domicile des patients présentant des troubles psychiatriques, avec l'établissement d'une fiche de surveillance », un acte rémunéré à 3,15 € brut. Si, devant l'obligation qui leur a été faite, la plupart des infirmiers composant le dispositif a préféré le quitter, Philippe Sarlat a choisi d'entrer en résistance. Et continue d'assurer dans son intégralité l'acte 11. « Si je m'en tiens à l'article 10, je ne dois pas faire la toilette à un patient autiste. Un patient qui ne voulait pas se laver et qui s'en prenait à sa mère. Avec le temps, j'y suis arrivé. Aujourd'hui, sa maman est soulagée », insiste-t-il. Il évoque le travail qu'il mène auprès des patients qui souffrent de troubles graves de la personnalité avec troubles du comportement, de patients psychotiques, d'autres sous tutelle vivant seul… Un travail sur le long terme réalisé en collaboration avec les familles. « J'ai des patients sur les bras. Qu'est-ce que je fais ? Je ne peux les abandonner ! », lance-t-il. Soutenu par des familles (1), des médecins, le SNIIL, Philippe Sarlat a décidé de poursuivre les soins et la mission d'infirmier telle qu'elle est spécifiée dans le décret n° 2004-802 du 29 juillet 2004 : « La profession d'infirmier ou d'infirmière comporte l'analyse, l'organisation, la réalisation de soins infirmiers et leur évaluation, la contribution au recueil de données cliniques et la participation à des actes de prévention, de dépistage, de formation et d'éducation à la santé ». Il a même saisi la Halde pour discrimination sur la distinction qui est faite « de leur état de santé, de leur handicap ». Nous avons contacté le docteur Jean Contie, médecin-conseil chef de service à la CPAM, pour apporter un éclairage sur cette affaire. Le docteur Contie s'est dit dans l'impossibilité de s'exprimer en raison « du respect du secret professionnel ».
 
(1) Une délégation départementale de l'Unafam est en pourparlers sur ce sujet avec la CPAM. Une réunion est prévue à cet effet début décembre.
Infirmier libéral œuvrant dans la prise en charge des malades psychiques, Philippe Sarlat dénonce « la politique visant à leur refuser les soins infirmiers ».



Exposition Travelling les 17 et 18 décembre
30/11/2010
 
Le pôle psychiatrie de l'hôpital de Gonesse et le collectif 100 transitions présentent "Travelling", une exposition sonore réalisée ensemble par la comédienne Elsa Hourcade, le musicien Bertrand Larrieu, les patients et les soignants du pôle de psychiatrie adulte.

Cette exposition sonore restitue un an de travail en résidence de la comédienne Elsa Hourcade et du Musicien Bertrand Larrieu avec les patients et les soignants du pôle de psychiatrie adulte. L'exposition sera accessible les vendredi 17 et samedi 18 décembre 2010, à l'unité de psychothérapie institutionnelle Winnicott du pôle de pychiatrie adulte du Centre Hospitalier de Gonesse. Ce projet a été monté dans le cadre du dispositif Culture à l'Hôpital, il a bénéficié du soutien de la DRAC Ile de France, de l'ARS, du Conseil Général du Val d'Oise et de la Ville de Gonesse.

Depuis 2002, le collectif 100 transitions, implanté à Gonesse, mène des projets de création partagée avec différents publics. Depuis 2005, il développe notamment une production sonore, plastique et cinématographique (http://onoffpause.free.fr) avec les patients et soignants de l'Hôpital de jour de psychiatrie adulte Hôtel Dieu de l'Hôpital, puis dernièrement ceux du pôle entier.

Pendant cette résidence, les deux artistes ont mené des ateliers auprès des patients et soignants du pôle, questionnant chacun dans sa relation au son, au bruit, à la musique et à sa propre voix. Durant ces ateliers, ils ont recueilli des matériaux à partir desquels ils ont réalisé différentes pièces sonores composant l'installation sonore "Travelling", dans un couloir et des chambres d'une aile disponible de l'hôpital.

Des patients en psychiatrie exposent dans un hôpital à Villejuif

VILLEJUIF (Val-de-Marne) - Des patients en psychiatrie exposent jusqu'au 8 décembre peintures, sculptures et dessins à l'hôpital Paul-Guiraud de Vilejuif (Val-de-Marne), qui abrite la plus ancienne unité dédiée aux "malades difficiles" en France, a constaté un journaliste de l'AFP.

Gouaches aux couleurs saturées ou peintures naïves, une trentaine d'oeuvres singulières parsèment l'exposition "De la force aux soins" qui retrace également l'histoire du traitement de la santé mentale dans cet hôpital psychiatrique, l'un des trois plus importants en France.

Pièce maîtresse : trois sculptures faites de bric et de broc directement inspirées des "Ménines", un des plus célèbres tableaux de Velasquez.

"On veut montrer une autre image de la santé mentale, qui continue d'être taboue et de faire peur", résume Céline Delysse, directrice de la communication de Paul-Guiraud.

Selon elle, les oeuvres exposées à Villejuif ne s'apparentent pas à "l'art brut" popularisé par Jean Dubuffet dans les années 40 et qui désigne les créations de pensionnaires d'asiles psychiatriques.

"L'art brut n'existe plus depuis que les patients sont traités aux neuroleptiques", précise Mme Delysse, ajoutant que la création à l'hôpital s'inscrivait désormais dans "l'art-thérapie".

Cette exposition coïncide avec le centenaire de l'Unité pour malades difficiles (UMD) de Villejuif, la plus ancienne de France.

Ces structures sécurisées accueillent des patients issus du milieu carcéral ou du milieu hospitalier classique, qui ne peut plus les garder du fait de leur violence.

Elles prennent également en charge des malades ayant eu affaire au système judiciaire mais déclarés pénalement irresponsables.

Il existe cinq UMD en France.
(©AFP / 03 décembre 201



Des anxiolytiques sur ordonnance, et après ?
Publié le 13/11/2010 

Ces dernières années, les prescriptions d’anxiolytiques ont augmenté considérablement dans le monde. Si le débat sur la « médicalisation » voire la « psychiatrisation » d’une certaine angoisse « physiologique » ou « existentielle » est récurrent (faut-il considérer toute anxiété comme pathologique et lui apporter systématiquement une réponse pharmacologique ?), le problème le plus grave concerne l’usage détourné (abuse) de ces produits, lequel peut aller de la surconsommation ponctuelle à l’addiction médicamenteuse.

Émanant du département de psychiatrie de l’université américaine de Columbia, une étude analyse ce phénomène et confirme l’intérêt d’une pharmacovigilance constante. Portant sur près de 35 000 personnes, cette enquête retrouve en effet un mésusage de ces médicaments dans près de 2 % des cas (quand celui-ci concerne l’année écoulée) et dans 7,4 % des cas (en l’intégrant sur toute la vie des intéressés). Selon la durée retenue (une année ou toute l’existence), on constate que 1,5 % à 6,3 % des sujets usent (et abusent) de ces médicaments sans même jamais avoir reçu la moindre ordonnance à cet effet. Et parmi ceux disposant d’une ordonnance en bonne et due forme, elle se trouve détournée dans une finalité non médicale, le plus souvent, chez des hommes « jeunes, de race blanche, ayant des antécédents de toxicomanie ou de mésusage d’autres substances, ou un parcours émaillé de comportements illégaux. »

Ces résultats éloquents montrent que le praticien ne maîtrise pas toujours, en pratique, le devenir de son ordonnance et qu’une prescription de bonne foi portant sur des médicaments contre l’anxiété aboutit parfois à un usage non médical de ces produits. Bien que les anxiolytiques présentent une évidente utilité clinique, une plus grande attention devrait donc être accordée à cette possibilité d’une utilisation détournée des médicaments contre l’anxiété, notamment chez des patients présentant un risque accru de mésusage (profil connu de toxicomanie, d’addictions ou de délinquance).
Dr Alain Cohen


vendredi 3 décembre 2010

Suicide derrière les barreaux
Publié le 01/12/2010    

Les statistiques révèlent une mortalité par suicide cinq fois plus élevée chez les hommes incarcérés que dans la population générale. Mais la contribution spécifique des troubles psychiatriques à ce phénomène demeure méconnue, et une étude britannique a donc exploré les relations entre une pathologie mentale et des tentatives de suicide « presque réussies » (near-lethal suicide attempts) chez 60 prisonniers âgés d’au moins 18 ans, et comparativement à 60 prisonniers n’ayant pas ces mêmes antécédents suicidaires (groupe témoin).

Sans surprise, des troubles psychiatriques sont « omniprésents » chez les prisonniers ayant commis une tentative de suicide « presque mortelle ». Mais de façon plus inattendue, on retrouve aussi ces troubles chez 62 % des sujets-contrôles. Les pathologies concernées comprennent des antécédents dépressifs (avec parfois d’autres tentatives de suicide), des troubles anxieux, des addictions à des drogues ou /et un contexte psychotique. Sur le long terme, on observe l’association de ces suicides en prison avec une « dépression récurrente » ou une psychose.

Cette étude confirme le dysfonctionnement (probablement mondial) des politiques d’incarcération souffrant sur le terrain d’une confusion entre l’hospitalisation du malade mental et l’incarcération du délinquant, puisqu’une certaine population pénale (et même une surpopulation) se retrouve derrière les barreaux, alors qu’elle n’aurait manifestement rien à y faire, les intéressés relevant davantage des compétences de « blouses blanches » que de celles de « robes noires. » Et comme le disent de façon plus feutrée les auteurs, l’écart entre la proportion des prisonniers souffrant de problèmes psychiatriques et ceux recevant des traitements médicamenteux ou une aide psychothérapeutique suggère qu’en plus d’une meilleure évaluation des risques, « il faudrait réexaminer le traitement et la gestion des troubles psychiatriques communs chez les prisonniers à risque. » Au Royaume-Uni, depuis 2006, la responsabilité des soins pénitentiaires est confiée au National Health Service (NHS), le système étatique de santé public (décrit par un ancien chancelier de l’Échiquier, Nigel Lawson, comme la « religion nationale » du pays). Les auteurs espèrent que cela permettra de revaloriser les recherches sur l’efficacité et le coût des interventions psychiatriques en prison.
Dr Alain Cohen



Vivre avec un smic "demande beaucoup de débrouille"
02.12.10

Le ministère du travail a rendu public, mardi 30 novembre, un rapport d'experts chargé de donner son avis sur l'évolution du salaire minimum. Le document suggère de ne pas augmenter le smic, en dehors de la revalorisation liée à l'inflation. Dans une interview à "Libération", jeudi, la ministre de l'économie, Chrisitine Lagarde, a justifié cette position, arguant que "la stratégie des coups de pouce est inefficace pour la création d'emplois et la lutte contrela pauvreté". A cette occasion, nous avons demandé aux internautes touchant le smic (1 055 euros net par mois, à temps plein) de nous raconter leur trajectoire et expliquer comment ils s'organisent pour faire face aux dépenses de la vie quotidienne.

   * Un arbitrage inlassable, par Sandrine G.

Il y a longtemps que je ne regarde plus ma fiche de paie. Je la laisse dans son enveloppe et la range avec les autres. Elles s'accumulent dans un tiroir de la cuisine. Inévitablement, je sais qu'elle affichera le même salaire que le mois précédent : 1 055 euros.

Je déteste par avance la commisération et l'exotisme social dans lesquels vont se vautrer ceux qui liront tous ces témoignages. Mais il faut bien parler ; il faut dire cette expérience. Pour les journalistes, ce n'est qu'un marronnier qui annonce l'hiver. Pour moi, c'est une forme de vie. Et c'est la mienne.

Je suis caissière dans un hypermarché de province. J'ai 35 ans. Mon hypermarché fait en moyenne plus d'un million de chiffre d'affaires par jour. Dès le 7 du mois, je suis à découvert. Une fois que j'ai payé l'assurance de la voiture, l'essence, une petite complémentaire santé, le loyer de mon 25 m², l'assurance de ce logement, l'électricité et l'abonnement portable-Internet, je n'ai quasiment plus rien. Il faut manger aussi.

Seuls ceux qui connaissent cette forme de vie peuvent comprendre l'expérience de l'arbitrage inlassable et du calcul permanent. Je ne connais plus (mais les ai-je déjà connus ?) les petits excès – un livre, un cinoche, un restau, une fringue de marque – que l'on s'offre de temps en temps, en souriant, "parce qu'il faut bien se faire plaisir et qu'on n'a qu'une vie". J'accepte cette vie ordonnée et triste. Je crois que je ne crois plus en la justice.

   * Nous sommes heureux car nous sommes ensemble
, par Audrey C.

Je suis maman solo de deux enfants. Je vis au smic depuis cinq ans. J'ai privilégié le confort de l'habitation. Je vis dans une maison avec trois chambres et un jardin, en location. Avec un loyer élevé et des charges qui le sont aussi, les loisirs sont restreints. On sort très peu les week-ends. Je n 'ai pas le droit aux aides sociales car il faut toucher moins que le smic. Dès qu'il y a des problèmes de voiture ou des grosses factures qui arrivent, c'est dur. J'ai un prêt de consommation et je puise trop souvent dedans. Pour les courses, j'arrive à dépenser moins grâce au hard discount mais pour le reste (mutuelle, assurances, électricité, essence...), c'est dur de pouvoir tout payer avec si peu.

Pour vêtir mes enfants, j'achète des vêtements d'occasion grâce aux vide-greniers ou sur Internet, via des petites annonces. Pareil pour les meubles, l'électroménager. Des amis nous font des dons. Pour Noël, j'ai pris des jouets d'occasion. Les vacances, mes enfants ne connaissent pas. Malgré toutes ces difficultés financières, ils sont heureux car nous sommes ensemble, nous avons chacun une bonne santé et il y a beaucoup d'amour qui fait que l'on se sent plus riche humainement. Mais quand je me retrouve seule dans ma chambre, je me mets à pleurer en pensant à notre vie de misère et comment s'en sortir afin que leur avenir soit meilleur.

   * Je ne vis pas, je survis
, par Jean-Jacques B.

Je galère. Mon loyer représente presque la moitié de mon salaire, tous les 20 de chaque mois je n'ai plus d'argent. J'ai droit à quelques aides, notamment de la banque alimentaire et des aides personnalisées au logement, mais je ne vis pas, je survis.  Je ne fais aucune dépense, donc aucun plaisir. Je ne sors plus depuis que j'ai un loyer à payer. Le pire est que mes dépenses augmentent chaque année de façon continue, alors que mon salaire stagne au raz des pâquerettes. La vie est dure, presque sans intérêt.

   * La solidarité, la force du smicard, par Quentin M.

Vivre avec le smic, c'est éviter le gaspillage de gasoil, de nourriture, d'énergies. Manger LIDL, glaner sur les marchés quelques produits frais. Passer un peu de temps à relancer les institutions comme la Caisse d'allocations familiales pour qu'elles vous aident. Chercher les bonnes affaires quand il est question de vêtements, de matériels divers. Pour faire simple, vivre avec le smic c'est ménager ses envies, limiter ses déplacements (opter pour le vélo), ne pas sortir souvent, faire la fête chez soi, vivre en colocation, découvrir des réseaux d'entraide... C'est la solidarité du smicard qui fait sa force ! Etre smicard, c'est au final connaître la vraie valeur des choses, rester modeste, sans jalousie, et comprendre que la vie ne tourne pas autour de simples jouets à la mode et hors de prix (un iPhone, c'est déjà un tiers du salaire mensuel). Etre smicard demande beaucoup plus de culture, d'audace, de débrouille que d'être né riche et célèbre.

   * On ne vit pas avec le smic sans aides, par NC

Pour avoir une location décente pour quatre personnes dans le Sud, non située en zone inondable ou non insalubre, il faut déjà quasiment compter le smic. Donc en rajoutant téléphone, électricité, gaz et eau, c'est limite ou impossible de se payer la mutuelle, qui reste ainsi réservée aux enfants.

Calculez : 1 100 € de salaire + 700 € toutes allocations confondues + 200 € de pension alimentaire, lorsque le père veut bien = 2 000 €, pas mal. - 900 € de loyer, - 50 € d'électricité, - 150 € de gaz (sans avoir bien chaud), - 50 € de mutuelle pour les enfants, - 10 € d'eau en comptant bien et en se limitant, - 40 € de téléphone et Internet, - 50 € d'assurance pour le véhicule, - 320 € de cantine pour les enfants, - 150 € de centre aéré, moins ce qui reste pour manger, s'habiller, les frais (anniversaires où sont invités les enfants, réparation de véhicule ou tout simplement le gasoil pour aller au travail...).

   * Rigueur et débrouille, par Thomas

Je suis étudiant en alternance et je perçois 60 % du smic, ma copine 70 %. On paie un peu plus de 600 euros de loyer, et pour le reste, on se débrouille comme on peut. Dès qu'on a besoin de quelque chose (un meuble à remplacer, électroménager cassé), on regarde les sites d'annonces, on va chez Emmaüs, ou sur les sites de dons, qui sont encore trop peu courants... Pour les courses alimentaires, on scrute chaque semaine les promotions dans toutes les grandes surfaces, et on fait la tournée des magasins en fonction des offres. Parfois, on va aussi dans les déstockages alimentaires, où les produits ont une date limite de consommation proche, mais qui sont encore consommables. Pour la sécurité sociale, on bénéficie de la CMU (couverture-maladie universelle) complémentaire, ce qui nous limite les frais médicaux.

Nous n'osons pas aller voir les services sociaux, ni les associations humanitaires, non pas par honte ou amour-propre, mais car nous sommes conscients que nous ne sommes, hélas, pas les plus nécessiteux. A coté de notre alternance, nous faisons des petits boulots (plonge dans un restaurant, billetterie lors des spectacles, etc.), mais les places sont aussi rares que précaires...

   * La course à l'argent n'est pas une fatalité, par Alexandre D.

Nous avons deux enfants et vivons avec 1 200 euros net par mois. Pour quatre personnes, c'est donc en dessous du "seuil de pauvreté". La seule combine que nous avons est un coup de chance : nous avons un loyer de seulement 400 euros pour une chouette petite maison entre Aix et Marseille. Il semble que le coût du logement soit le plus gros problème pour vivre avec de petits revenus. Une fois le loyer payé, nous vivons bien. Même très bien. Est-il nécessaire d'avoir de quoi se payer un nouvel iPad tous les mois pour avoir le sentiment de vivre "décemment" ? La France est vaste et le coût de la vie n'est pas le même partout. Le smic n'est donc pas un revenu misérable pour tout le monde. Il est certain qu'à Paris, on doit quelque peu galérer, mais pour beaucoup d'autres, il s'agit simplement d'une vie normale, avec du temps pour faire ce qu'on aime, sortir quand on en a envie et se payer des vacances "décentes" de temps à autre. La course à l'argent n'est pas une fatalité. Sans aucune combine particulière, rien dans notre vie ne me paraît indigne.

   * Plutôt heureuse…
, par Charlotte C.

C'est dur, mais on se fait à tout, l'important étant de pas être trop ambitieux. Je mange peu de viande, j'achète peu de produits alimentaires transformés, j'ai vendu ma voiture, je circule à vélo (j'habite Limoges), je n'achète plus de livres ni de magazines, donc je passe beaucoup de temps dans la bibliothèque de mon quartier, j'emprunte ce qui m'intéresse. Je pars en vacances mais jamais loin, je squatte dans les maisons de vacances de mes amis avec mes filles. Pour les vêtements, je rafistole ou je vais dans les friperies, où je dégote des pièces tendance pour trois fois rien ! Bon, c'est pas toujours facile, j'ai souvent recours au système D mais je n'ai pas l'impression d'être moins heureuse qu'une autre. Je vis de façon très écolo par la force des choses, c'est pas si mal aujourd'hui !

   * Je vis depuis toujours avec le smic, voire moins..., par Anthony R.

Aujourd'hui âgé de 32 ans, je travaille depuis l'âge de 18 ans pour un smic ou à peine plus ; j'ai toujours occupé des postes qui impliquaient de travailler les jours fériés et les week-ends sans autres compensations que celles légales (dans la restauration rapide ou dans la jardinerie, c'est 25 % de plus les week-ends et jours fériés). Le smic m'a tout juste permis de subvenir à mes besoins fondamentaux, vitaux. Heureusement, la famille était là et la caisse d'allocation familiale, entre autres organismes sociaux et aidant.

Seulement, la vie, du moins la mienne, ne se résume pas à "manger, travailler, se loger". La culture et tous les "à-côtés" sont aussi indispensables. J'ai dû alors jongler entre légalité et illégalité. J'ai longtemps vécu en colocation pour minimiser les frais, ai usé de petits jobs "au black", voire même parfois de petits trafics. Rien de tout cela ne m'a permis de me payer de grosses berlines, des vacances dans les îles, juste de vivre ma vie simple, manger, me loger, m'habiller, sortir, découvrir, créer aussi.

   * Un smic, dès lors qu'il faut le partager, c'est maigre, par Océane R.

Personnellement, je suis au chômage (malgré un bac+8), alors je dois vivre en partageant le smic de mon compagnon. Pas d'enfants donc aucune aide. Nous ne pouvons pas en vivre : nous sommes hébergés tous deux chez une tierce personne (c'est-à-dire pas d'intimité de couple, pas d'autonomie, pas d'indépendance financière). Le smic pour une personne seule, ça suffit, mais dès lors qu'il faut le partager, c'est maigre : ça signifie pas de vacances, pas de loisirs, pas de sorties, pas de déplacements (y compris ceux qui me permettraient de trouver du travail), pas de quoi se faire plaisir... Des astuces ? Mon compagnon s'est mis en auto-entrepreneur, mais pour l'instant, aucun chiffre d'affaires, car travailler en plus d'un autre emploi salarié à temps plein, c'est épuisant et certains jours impossible.

Audition publique - Dangerosité psychiatrique : Étude et évaluation des facteurs de risque de violence hétéro-agressive chez les personnes ayant une schizophrénie ou des troubles de l'humeur - Paris - 10 décembre 2010

L'inscription en ligne est disponible ici

Cette Audition publique est organisée par la Haute Autorité de Santé en association avec l’Association France-Dépression, le Collège de la Médecine Générale (CMG), le Collège Français de Médecine d'Urgence (CFMU), le Collège National pour la Qualité des Soins en Psychiatrie (CNQSP), la Direction Générale de la Santé (DGS), la Fédération Française de Psychiatrie (FFP), la Fédération Nationale des Associations d'usagers en Psychiatrie (FNAPSY), la Société Française de Médecine d'Urgence (SFMU) et l'Union Nationale des Amis et Familles des Malades psychiques (UNAFAM).

Du 10/12/10 09:00 au 10/12/10 18:00

Les Livres de la Psychanalyse

Savoirs et clinique N° 12, octobre 2010 :
Freud et l'image
Franz Kaltenbeck  (dir.), Collectif
"Freud et l'image", issu d'un colloque interdisciplinaire, cerne la tension entre l'image dont le sens se laisse dévoiler et une autre fonction de l'image, qui excède le discours, porteuse d'effets esthétiques ou productrice de symptômes.

La psychanalyse tient compte des effets structurants de l'image, lisibles dans sa clinique (l'image du corps propre est le support précoce du moi, un cauchemar peut pousser au suicide). Mais des axes différents traversent sa théorie de l'image. Ainsi, dans La Science des rêves, Freud dévoile un sujet divisé qui, dans son sommeil, est soumis à une véritable passion des images. L'image semble être ici serve du logos, Freud comparant le rébus du rêve aux hiéroglyphes.

En revanche, Lacan met l'accent sur la puissance de l'image à travers la fixité du fantasme et traite l'imaginaire comme une donnée irréductible de l'expérience humaine. Les images, enracinées dans le désir de l'Autre, sont le vecteur de toutes sortes de volontés idéologiques, religieuses ou politiques. Des auteurs ont étudié le surgissement de l'image dans la littérature. D'autres, inspirés par le regard de Freud sur l'art, ont questionné l'art contemporain (peinture, photo, vidéo, cinéma) afin d'en tirer des conséquences novatrices pour la psychanalyse.

Ce numéro a été publié avec l'aide du CRIMIC, Centre de recherche interdisciplinaire sur les mondes ibériques contemporains, de Paris-Sorbonne.

mercredi 1 décembre 2010

Communiqué du NPA. Législation en psychiatrie : une avancée qui en appelle d'autres...
mercredi 1 décembre 2010

Statuant à la demande d’une personne qui estimait avoir été victime d’un internement arbitraire, le conseil constitutionnel vient d’abroger une disposition importante de la loi de 1990 sur l’hospitalisation psychiatrique.

A partir de juin 2011, il ne sera plus possible, au delà de 15 jours, de maintenir une personne hospitalisée à la demande d’un proche, contre son gré, en psychiatrie, sans l’avis d’un juge.

Cette décision relevait jusqu’à présent du seul avis du médecin.

La position du Conseil Constitutionnel remet, de fait, en cause pour les mêmes raisons « l’hospitalisation d’office », décidée par le préfet.

C’est enfin la reconnaissance qu’une personne souffrant de troubles psychiatriques est d’abord un citoyen comme un autre qui ne saurait être privé de sa liberté sans que la justice ait été saisie, même si le délai de 15 jours reste inacceptable.

Cette avancée, vient percuter le projet de loi sécuritaire sur l’hospitalisation psychiatrique, qui devait être soumis au Parlement dans quelques semaines Celui-ci prévoit la généralisation des soins sous contrainte…y compris hors du milieu hospitalier.

Le gouvernement va donc être obligé de revoir sa copie.

C’est l’occasion d’amplifier la campagne autour de l’appel « Mais c’est un Homme » contre la psychiatrie sécuritaire, et pour la reconnaissance de la personne soignée en psychiatrie, comme un être humain, ayant le même droits que tout citoyen !
Le Conseil Constitutionnel a mis en question la loi de 1990, source d’abus. ENFIN !
30 Novembre 2010
Par guy Baillon, Psychiatre des Hôpitaux     

Cet avis du 26 novembre est un progrès, mais surtout nous ne devons pas en rester là !
Certains professionnels de la psychiatrie s’en prennent aussitôt avec maladresse au Conseil Constitutionnel comme s’il s’agissait d’un méfait du Président Sarkozy, Cette réaction se croit juste parce qu’elle est violente alors qu’elle ne fait pas la moindre analyse, elle se croit juste parce qu’elle s’oppose à l’Etat.
Nos amis ne comprennent pas que leur mode de réaction, comme leurs arguments ne font que renfermer encore la psychiatrie dans un ghetto ! Tout en maintenant les psychiatres et leur pouvoir sur un piédestal ; ils en appellent à Foucault, mais c’est cette attitude de pouvoir que Michel Foucault critiquait chez les psychiatres ! C’est ce ghetto qui doit être aboli.

En fait nous devons remarquer que le Conseil reste très timoré et modeste dans sa contestation, sa critique ne concerne que la prolongation au-delà de 15 jours de l’hospitalisation à la demande d’un tiers ! Alors que la loi italienne est beaucoup plus exigeante, elle ne permet que 10 jours d’hospitalisation sous contrainte. La critique du Conseil est très partielle. C’est bien peu. De façon stupéfiante, il ne met pas en cause la prolongation des hospitalisations d’office, c’est cela qui est incohérent !

Reprenons nos esprits. Cet avis au lieu de provoquer la colère doit être au contraire l’occasion de remettre en cause la totalité de notre législation, et en cela on ne peut qu’être content de ce premier pas fait par le Conseil Constitutionnel, il faut non seulement le suivre mais l’entrainer pour remettre en cause l’atteinte à la liberté qu’installent dans notre pays de liberté la loi de 1838, et la loi de 1990 -qui n’en est que la confirmation hypocrite, elle est en réalité plus grave, car elle est appliquée avec beaucoup plus de facilité et de laxisme que ne l’était la loi de 1838 : -ainsi entre 1970 et 1990, pendant toute cette période, les hospitalisations sous contrainte ont diminué considérablement de 80 à 20%. Mais depuis la loi de 1990, qui a commencé à faire refluer les soignants sur l’hôpital et diminué les soins de secteur, les hospitalisations sous contrainte n’ont fait que croitre chaque année !
Dans le débat actuel les psychiatres ne se souviennent plus du propos très dur de Bonnafé, Daumezon et leurs amis: « l’internement cette conduite ‘primitive’ » (Information Psychiatrique, novembre 1948) ou ils ne l’ont pas compris. De plus nos anciens n’ont cessé de nous mettre en garde : toute ‘révision’ de la loi de 1838 (a fortiori celle de 1990) ne peut aboutir, justement parce que l’on veut accroitre les garanties, qu’à un résultat plus inquiétant car restreignant de façon plus perverse la liberté des patients. La seule attitude, à leurs yeux, était de promouvoir l’application de la politique de secteur qui, plutôt que des pierres et plutôt que des lois, mettait des hommes à la disposition de la population. La seule loi souhaitable était selon eux une loi avec un seul article : « La loi de 1838 est abolie ». Le Conseil devrait continuer sa critique et demander d’abolir la loi de 1990.
Le reste devait être réalisé concrètement par le déploiement des soignants dans les espaces de vie de la ville pour que la psychiatrie soit ‘accessible’, se montre vraiment au service des hommes de la Cité, les soigne là en s’appuyant si besoin sur les lois de droit commun.
Les troubles psychiques graves se déploient toujours sur de longues durées ; la présence dans le tissu social d’une équipe de secteur (enfin sortie de son ghetto hospitalier), et sa disponibilité permettent à la fois de répondre à la survenue progressive des troubles et d’enrayer leur évolution vers des manifestations violentes (celles-ci ne surviennent que parce que les premiers troubles n’ont pas été remarqués, et en particulier parce que les soignants refusent de recevoir et d’écouter la famille ; les familles sont les premiers témoins de ces souffrances, mais depuis deux siècles la psychiatrie méprise et écarte la famille).
Ceci n’est pas un propos abstrait : c’est ce que la pratique de la politique de secteur, dans les secteurs qui n’ont pas été déchirés ou laminés par l’administration, a montré progressivement pendant 40 ans ! C’est un constat clair. Il n’est pas besoin de loi pour soigner. Une loi ne soigne pas. Il faut en témoigner tant que la psychiatrie de secteur existe encore.
La psychiatrie ne peut évoluer que si elle prend conscience de son ghetto et de son pouvoir démesuré dénoncés par Michel Foucault comme par Bonnafé et Daumezon. C’est dans cette démarche seulement de critique de sa ghettoïsation que la stigmatisation et la discrimination, les pires fléaux de notre époque, seront écartées. Il est très regrettable de constater que les psychiatres de gauche comme de droite ne rêvent que d’obligation de soins et veulent l’appliquer eux-mêmes, ne percevant pas qu’ainsi ils se mettent au-dessus des lois. Puisqu’ils s’occupent de la folie seraient-ils ‘sacrés’ d’une valeur supérieure aux autres citoyens, ils seraient seuls à être capables de rencontrer les malades et à savoir comment diriger leur vie ! Il suffit de descendre de notre piédestal et d’aller voir l’équipe de secteur voisine et de regarder concrètement comment ces hommes que nous sommes agissons dans le quotidien avec les patients (auxquels nous refusons le terme d’usagers en dehors des soins) et avec leur famille : le constat est accablant, montrant notre naïveté et notre désarroi, mais aussi notre violence quand nous sommes démunis. Il faut seulement du temps et une attitude humaine, et pas une loi, pour commencer à soigner : l’attention à l’autre.

Avec cet arrêt du Conseil Constitutionnel la voie de la critique des lois spécifiques, ségrégatives et limitatives de liberté est enfin ouverte (on se sent assez mal à l’aise aujourd’hui de comprendre que cette démarche aurait pu commencer il y a longtemps).
Rien ne justifie une loi spéciale pour les troubles psychiques : la ségrégation et le racisme commencent là.
Ne parlons plus dans l’abstrait, concrètement il n’y a aucune amélioration possible de la loi de 1990, copie de la loi de 1838, parce que justement elle est basée sur une donnée ségrégative. Un pas considérable avait été fait avec la loi sur les biens en janvier 1968 : en effet la loi de 1838 concernait la personne ‘et’ ses biens, elle enfermait et en même temps elle gardait sous son contrôle tous les biens des malades (en fait elle les laissait dépérir). La loi de 1968 est une loi de droit commun s’adressant à toute personne limitée dans la gestion de ses biens quelle qu’en soit la cause (physique, psychique ou contextuelle). Cela a été une amélioration considérable. Mais le pire reste là : la restriction de liberté de la personne a persisté.

Il est essentiel de comprendre que toute limitation de la liberté est une atteinte aux droits constitutionnels de l’homme. Cette limitation ne saurait être mieux sauvegardée par un corps professionnel autre que la justice dont c’est la fonction. Sinon on crée une autre catégorie dans l’espèce humaine et l’on donne à la population un argument et des armes pour mettre à part cette catégorie, la traiter d’une autre manière et lui imposer un joug qui va l’inférioriser.
Cette question est aussi importante que l’était la peine de mort. Elle doit provoquer des débats aussi vastes. La persistance de la situation actuelle, qui a commencé en 1838, constitue une porte ouverte à toutes les dérives totalitaires.
Nous pouvons nous réjouir de voir le Conseil Constitutionnel nous ouvrir la route.
Mais ne nous cachons pas la réalité : la vraie question, celle qui prime tout et qui est occultée par ce débat, est l’élaboration d’un plan de santé sur la psychiatrie permettant de former suffisamment des hommes et de les mettre à disposition de la population dans les espaces banaux de la Cité, pour qu’ils soient « au service de tous » et apaisent ensemble, avec leur entourage, leurs souffrances psychiques. C’est une cause commune faite de solidarité.

Des sans-papiers exclus des centres d'hébergement d'urgence
29.11.10
AFP/PASCAL GUYOT



En octobre 2007, le président Nicolas Sarkozy avait rappelé le principe de l'accueil inconditionnel des SDF dans les centres d'hébergement d'urgence.

Refuser d'héberger des familles à la rue parce qu'elles ont été déboutées du droit d'asile, faire un tri entre les sans-abri selon leur "statut administratif"... C'est illégal et contraire aux promesses du président de la République d'offrir un "accueil inconditionnel" dans les centres d'hébergement d'urgence. Mais ces pratiques se multiplient en France selon le journal Libération qui publie, lundi 29 novembre, une série de documents confidentiels révélant des directives données par certaines préfectures pour exclure les sans-papiers des centres d'accueil pour sans-abri.

Le quotidien publie ainsi l'extrait d'un courriel adressé aux associations chargée de l'accueil des SDF par la direction départementale de la cohésion sociale (DDCS) du Calvados : "Il a été rapporté à la DDCS que les ménages déboutés de la demande d'asile étaient présents en structure d'hébergement d'urgence (...). Lors de la réunion qui s'est tenue en préfecture le 16 juillet, la DDCS avait clairement annoncé que les déboutés ne seraient plus pris en charge dans le dispositif d'hébergement" et ce afin de résoudre un problème chronique de manque de place dans les structures d'accueil. "Actuellement, de trop nombreuses personnes restent quotidiennement sans solution de mise à l'abri, certaines places d'hébergement d'urgence étant embolisées [sic] par des personnes déboutées [du droit d'asile]."

La préfecture a, depuis, dû reconnaître que "le contenu de cet e-mail n'était pas légal" et que les mesures préconisées n'ont pas été mises en œuvre.

Dans le Haut-Rhin, il a été demandé aux responsables du 115 (chargés d'orienter les sans-abri qui les contactent vers les places d'hébergement disponibles), d'opérer un tri, selon la situation familiale du demandeur (célibataire, famille...), de sa vulnérabilité, et de son "statut administratif". Libération explique que le cahier des charges distingue les sans-abri de " (destiné à aider les personnes à la rue ou logées dans des conditions précaires) malgré l'annulation de la mesure de reconduite à la frontière prise à leur encontre
droit commun" et "les demandeurs d'asile ou les déboutés du droit d'asile". "En cas de saturation des places d'hébergement d'urgence, la nécessité d'assurer une fluidité au dispositif impose de prioriser le public de droit commun", stipule le document que s'est procuré le journal.

Un troisième cas est encore cité dans l'Yonne où une famille sans papiers a perdu son logement ALT

UNE "VARIABLE D'AJUSTEMENT"


Devant le manque de place dans les centres d'hébergement d'urgence, "les étrangers sans papiers deviennent une variable d'ajustement", déplore Nicole Maestracci, présidente de la Fédération nationale des associations d'accueil et de réinsertion sociale (FNARS) qui rappelle qu'en 2007, "le président avait remis les choses au clair et réaffirmé ce principe de l'inconditionnalité".

En octobre 2007, lors de la journée mondiale du refus de la misère, Nicolas Sarkozy avait en effet clairement affirmé que l'accueil des personnes à la rue devait être "inconditionnel". "Quand quelqu'un est à la rue, qu'il est dans une situation d'urgence et de détresse, on ne va tout de même pas lui demander ses papiers. (...) Dans les centres d'urgence, on doit accueillir tout le monde", dit-il dans ce discours qu'il avait prononcé au Conseil économique et social, et que le site de l'Elysée a mis en ligne.

Lundi, après les révélations de Libération, le secrétaire d'Etat au logement, Benoist Apparu, a indiqué qu'une circulaire "hiver" serait envoyée "en fin de semaine" à toutes les préfectures, rappelant notamment ce principe de "l'accueil inconditionnel" dans les centres d'hébergement d'urgence, qui est inscrit dans le Code de l'action sociale et des familles. "J'ai fait appeler les trois préfectures [Calvados, Haut-Rhin, Yonne], c'est réglé", a-t-il assuré, faisant état "soit de zèle soit d'une mauvaise application" des directives.

Le secrétaire d'État, qui a rappelé la semaine dernière lors d'une visite au SAMU social l'objectif de "zéro demande non pourvue", a insisté sur l'existence d'une "mise à l'abri humanitaire quelle que soit la situation individuelle des personnes. Quand il y a un risque de passer la nuit dehors lors d'une période de grand froid, on ne se pose pas la question de savoir si la personne est française ou non, si elle a des papiers ou non."

Les informations de Libération ont suscité l'indignation de la gauche. "La responsabilité de la République c'est d'héberger tout le monde et ne pas faire le tri entre les SDF avec papiers et les SDF sans papiers", a tenu à rappeler le porte-parole du parti socialiste, Benoît Hamon. "Après la remise en cause de l'aide médicale d'État, la droite continue son offensive de destruction du principe de dignité de la personne humaine, inscrite depuis peu dans le préambule de notre Constitution", ont dénoncé les sénateurs du groupe PCF-Parti de gauche qui évoquent, dans un communiqué, une forme de "xénophobie d'État".

La FNARS, elle, appelle les pouvoirs publics à "adopter une attitude plus pragmatique et à regarder la réalité telle qu'elle est". "La politique consistant à rendre plus difficile l'accès à l'hébergement ou aux soins crée davantage d'insécurité pour les gens visés, mais aussi pour toute la société, rappelle, dans Libération, Nicole Maestracci. "Une société n'a jamais intérêt à laisser des gens dans une situation de dénuement total."

Douleur chez l'enfant : la contention bien présente

Daniel Annequin continue son petit bonhomme de chemin. Farouche combattant de la lutte contre la douleur chez l’enfant, ce médecin anesthésiste à l’Hôpital d’enfants Armand Trousseau à Paris a présenté, vendredi, un travail sur l’utilisation de la contention dans le soin chez l’enfant.

Eh oui, cela arrive. Et beaucoup plus souvent qu’on ne le croit. On dit même qu’en France les pratiques ont du mal à évoluer. Une infirmière en formation racontait récemment: «J’ai assisté à des scènes insupportables pour moi : des enfants que l’on maintient pendant plus de trois quarts d’heure pour poser une voie veineuse, des hurlements dont ces enfants se souviendront toute leur vie, des réflexions désobligeantes de la part de l’équipe soignante.»

Pour y voir plus clair, Daniel Annequin a réalisé, dans son hôpital qui est donc plutôt en avance sur ces questions, une étude. Les soignants ont réalisé une cotation de la contention selon une échelle de 5 niveaux. Niveau 0, pas de contention: l’enfant est calme et détendu. Le niveau 1 correspond à une «contention douce», c’est à dire une partie du corps de l’enfant est juste maintenue par une personne, sans réaction de retrait de l’enfant. Le niveau 2 renvoie à une «contention moyenne»: une ou plusieurs parties du corps de l’enfant sont maintenues avec réaction de retrait de l’enfant. Le niveau 3 correspond à une «contention forte»: une ou plusieurs parties du corps de l’enfant sont maintenues fermement, par plusieurs personnes. L’enfant proteste, crie et pleure. Le niveau 4 équivaut à une «contention très forte» : une ou plusieurs parties du corps de l’enfant sont maintenues (par plusieurs personnes) avec réaction de retrait, agitation importante de l’enfant qui se débat fortement malgré la contention.

Les résultats ? Huit unités de soins de Trousseau ont participé à cet audit qui a concerné 296 gestes chez 212 enfants. 42% des soins étaient des ponctions veineuses ou pose de cathéter, 17% de prélèvements superficiels, 10% de pansements, 6% d’aspirations rhino-pharyngées et 5% de ponction lombaire. Et bien, 28 % de ces gestes ont un niveau entre «2» et «4», 9% des gestes ont même nécessité une contention forte ou très forte. Ce qui est beaucoup. Dans plus de deux cas sur trois, les enfants qui ont subi une contention forte n’avaient pas reçu une analgésie suffisante. Et ce constat, peu encourageant: «Le soin qui se déroule mal n’est quasiment jamais arrêté et ce, même dans un hôpital très soucieux de la douleur» , note Daniel Annequin qui ajoute. «Il faut en finir avec l’omerta sur ce sujet.
Éric Favereau
Infirmières et âge de la retraite: ce qu'elles pensent.

En apparence la réforme en cours des études d’infirmières à vocation à renforcer la reconnaissance professionnelle du métier. Cette réforme s’inscrit dans celle, plus globale de la réforme en cours « Licence, Master Doctorat ».

La réforme LMD fixe les règles d’accessibilité à des niveaux universitaires de diplômes au bout d’au moins 3, 5 et 7 ans. A la clé, pour les infirmières, un passage en catégorie A (celui des cadres notamment) et une bien légitime revalorisation salariale. Oui mais voila ! Selon un sondage IPSOS établi à l’occasion du très prochain salon infirmier, 45% des infirmières concernées par la réforme préfèrent rester en catégorie B. La raison : Le maintien de leur droit de départ à la retraite à 55 ans. 39% des infirmières interrogées acceptent le passage en catégorie A avec un report de l’âge de la retraite à 60 ans majorée selon la réforme Woerth Sarkozy.

Les infirmiers et infirmières ont aussi été interrogés sur « l’âge maximum auquel ils pensent  pouvoir exercer leur métier dans de bonnes conditions » A cette question 48% % déclarent un âge inférieur ou égal à 55 ans et 45% un âge supérieur. Mais ces chiffres s’accompagnent de fortes disparités dans la mesure ou les infirmiers libéraux placent majoritairement la barre à 60 ans ou plus à l’inverse de celles et ceux travaillant à l’hôpital public.
François Aubart
Seuls, reclus chez eux : est-ce grave docteur ?

Seul, chez soi, à l’abandon : est-ce pour autant une maladie? Des «personnes âgées en perdition dans leur domicile», tout le monde en connaît : ces vieux qui ne sortent plus de chez eux, qui ouvrent peu la porte, ont peur de tout. Souvent, quand le voisinage intervient, c’est trop tard, la personne a basculé dans un autre univers.

La semaine dernière, à l’hôpital Georges-Pompidou à Paris, s’est tenu, à l’initiative de la Fédération des réseaux de santé gérontologie d’Ile de- France, le colloque «Gériatres et psychiatres : quelles collaborations au domicile du patient ?» Une étude a été présentée sur ces vieux en perdition chez eux. Ce sont des gériatres d’une association de l’est parisien qui ont travaillé sur cette population.

Ils disent avoir vite senti qu’il s’agit «d’une population particulière, pour la plupart en manque de soins». Et ont décidé d’analyser les dossiers des 225 premiers patients visités. Leur âge moyen est de  81 ans, 62% sont des femmes, 75%vivent seuls.«Près d’une personne sur deux a un entourage défaillant, lointain, voire inexistant», a décrit le Dr Stephan Pau-Montero. «35%, au départ, refusent les soins ou les aides en tout genre. 49% n’ont pas de médecin traitant.» L’étude montre que «31% de ces personnes âgées vivent dans des domiciles insalubres, 32%s ont dénutris. Par exemple, 14% d’entre eux ont des frigidaires vides, ou éteints, ou encore mal utilisés.» Que faire ? Intervenir alors qu’apparemment la plupart de ces personnes n’expriment pas de demandes ? Ne rien faire, ne serait-ce pas de la non-assistance à personne en danger ? Les gériatres américains ont défini un syndrome gériatrique dit «d’autonégligence», à l’instar des chutes, de la dénutrition, voire des incontinences.

Ce syndrome se définit «par une absence de recours aux besoins primaires», que ce soit l’hygiène, la santé, la sécurité, l’eau ou la nourriture. Dans le cas de l’étude de l’est parisien, près des deux tiers des personnes âgées en seraient atteintes. Et le Dr Stephan Pau-Montero de conclure : «La reconnaissance de ce syndrome doit permettre une meilleure prise en charge de ces personnes jusque-là exclues du parcours de soins traditionnels.» Est-ce si sûr ?

Médicaliser des comportements peut certes avoir des effets positifs. Mais sont-ils malades ?
Qu’en disent les intéressés ? Comme souvent dans ce genre d'études, leur parole manque fortement....
Eric Favereau


ABANDONNÉS - Un pays sans parents (Lens)

A la frontière de l’Europe, la Moldavie ne parvient pas à profiter de sa croissance. Une très large partie de sa population est poussée à l’émigration économique. Chaque famille a son lot d’adultes partis à l’Ouest pour travailler. En se rendant dans une école primaire dans une petite ville du pays, la photographe Andrea Diefenbach s’est rendu compte que les deux tiers des enfants connaissaient cette situation… au point que certains vivent seuls, gardés par leurs sœurs ou leurs frères aînés, parfois par leurs grands-parents.

Dans certains villages, la situation est tellement désespérée qu’une très grande majorité des adultes sont partis. Les enfants sont livrés à eux-mêmes. Les photos d’Andrea Diefenbach les montrent qui s’occupent seuls les uns des autres, où qui mangent avec leurs grands-parents, le regard un peu perdu. Tous vivent collés au téléphone, parfois à Skype, outils qui leur permettent de garder le contact avec leur mère ou leur père, qui leur envoient des cartons remplis de nourriture pour rendre l’éloignement moins dur à vivre.

Mais les enfants perdent la notion de famille, de nationalité ainsi que leur mode de vie. En réalité, ils sont privés de leur enfance”, écrit le blog Lens du New York Times.