| 23.03.2019
Dans « l’École des soignantes »*, le généraliste écrivain Martin Winckler décrit un hôpital utopique en 2039 mis en place par une communauté urbaine en France. Les femmes y sont majoritaires et les patients acteurs de leurs soins. S’inspirant de l’univers médical de Montréal où il vit, ce roman d'anticipation est susceptible de donner des idées aux acteurs du système de santé français.
VOISIN/PHANIE
À l’École des soignantes, le corps médical est féminin à 90 %, l’ego du praticien a laissé place à l’empathie et à la coopération avec le patient. Quid du diagnostic et des traitements ?
Dr Martin Winckler : Dans cet hôpital “idéal”, les consultations collectives font partie intégrante du diagnostic, les frontières entre le psychique, le physique et le physiologique n’existent pas… Ce qui devrait s’appliquer dans le monde réel. Quand on fait courir des dépressifs, ils vont mieux. Une « soignée », Camille, se plaint de voir des monstres. On parle de délire hallucinatoire. Puis quelqu’un lui demande quand arrivent ces monstres. Quand j’ai mal au ventre, répond-elle, une fois par mois. Ses hallucinations sont donc liées à ses douleurs menstruelles, pas à une maladie psychique.
Vous décrivez surtout le pôle “psy” de cet hôpital. Les faux diagnostics de maladie mentale sont-ils nombreux ?
Dr M. W. Ils sont légion. Mon livre relate l’expérimentation (réelle) d’un psychologue envoyant à l’HP dix personnes saines. Elles ont prétendu entendre des voix pour y être admises. Elles avaient beau dès le lendemain affirmer qu’elles ne les entendaient plus, ces fausses patientes ont été retenues trois semaines en moyenne avec un diagnostic de psychose hallucinatoire.