samedi 4 novembre 2023

Les études supérieures sont-elles à risque pour la santé mentale ?

Publié le 03/11/2023

La dépression et le trouble anxieux sont les deux problèmes de santé mentale les plus courants. L'incidence augmente fortement à l'adolescence (vers 12-13 ans pour les filles et 16 ans pour les garçons) et continue d'augmenter jusqu'à la vingtaine. Il est prouvé que ces troubles mentaux courants sont en augmentation et leur prévention est une priorité de santé publique. Le nombre de jeunes fréquentant l’enseignement supérieur a considérablement augmenté au Royaume-Uni et la proportion d’étudiants présentant des troubles de santé mentale a été multipliée par six.

Ainsi, la question sous-tendant une recherche britannique, présentée dans le Lancet était : les jeunes adultes fréquentant un établissement d’enseignement supérieur ont-ils un risque accru de troubles mentaux courants (common mental disorders), comme des troubles anxieux ou dépressifs, comparativement à ceux qui ne poursuivent aucune formation universitaire ?

Pour éclaircir cette question, les auteurs ont réalisé une étude de cohorte comparant les taux de troubles mentaux avant (14 à 17 ans), pendant (18 ans et plus) et après (25 ans et plus) leur scolarité, chez des jeunes engagés ou non dans des études supérieures. Cette recherche s’appuie sur les données de deux études longitudinales (Longitudinal Studies of Young People in England 1 et 2)[1], commencées respectivement en 2004 et en 2013 et conçues pour être représentatives à l’échelle de l’Angleterre (n=4 832 dont 55,8 % d’étudiants, et n=6 128 dont 50,7 % d’étudiants). Les symptômes des troubles mentaux courants sont évalués à l’aide du questionnaire de santé général (GHQ-12)[2] et les différences dans ces scores GHQ-12 sont appréciées par une régression linéaire, avec ajustement pour des facteurs de confusion.

Davantage de symptômes entre 16 et 19 ans

Une augmentation des symptômes des troubles mentaux courants est observée chez les étudiants pendant leurs années d’enseignement supérieur. Aux âges de 18 à 19 ans, les scores moyens au GHQ-12 sont de 12,0 chez les étudiants et de 11,6 chez les non-étudiants (différence moyenne ajustée de 0,36, IC à 95 % [0,05 à 0,68] ; p = 0,024). Les jeunes ayant fréquenté l’enseignement supérieur entre 18 et 20 ans présentaient plus de symptômes de troubles mentaux courants entre 16 et 17 ans que ceux sans parcours universitaire. Cependant, aucune preuve n’est trouvée d’une différence à plus long terme dans la fréquence de ces troubles à l’âge de 25 ans. 

En définitive, bien que cette étude suggère l’existence d’une faible augmentation des troubles anxieux et dépressifs pendant l’enseignement supérieur, alors qu’une meilleure santé mentale de ces étudiants provenant de milieux plus favorisés aurait pu être envisagée, elle n’indique cependant pas la persistance d’une telle augmentation après 25 ans. Des études supplémentaires sont nécessaires pour clarifier les risques pour leur santé mentale auxquels sont confrontés les étudiants.

[1] https://www.herc.ox.ac.uk/downloads/health_datasets/browse-data-sets/longitudinal-survey-of-young-people-in-england-lsype

[2] https://www.dac92centre.fr/general-health-questionary/

Dr Alain Cohen

RÉFÉRENCE
McCloud T, et al. The association between higher education attendance and common mental health problems among young people in England: evidence from two population-based cohorts. Lancet Public Health. 2023 Oct;8(10):e811-e819. doi: 10.1016/S2468-2667(23)00188-3.

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