samedi 26 août 2023

La relation soignant-soigné : la politesse

PUBLIÉ LE 22/08/2023

Christine Paillard, documentaliste et lexicographe en sciences infirmières, propose d'analyser un concept et son application dans le champ infirmier, à partir de son Dictionnaire des concepts en soins infirmiers, utile pour les Analyses de pratiques professionnelles et pour le Mémoire de fin d’études et l’exercice de la profession soignante.

La politesse peut revêtir de multiples formes : condescendante, bienveillante, intelligente, stratégique, invisible, pudique, respectueuse, soupçonneuse, instrumentalisée, laconique, mécanique, lâche, surannée…  Christine Paillard nous rappelle que la politesse repose sur un entendement entre les individus dans un contexte soignant/soigné. Le soignant adopte alors un positionnement stratégique sans réduire son intervention à un protocole élémentaire mais en reconnaissance de la singularité du public et de sa culture pour faciliter une approche sociale soignante.

Être poli suppose que l’on dispose de certaines qualités morales et qu’on les exerce. La politesse excède la simple civilité parce qu’elle est bien plus qu’un accommodement prescrit par la vie sociale

La politesse peut être un ensemble de règles sociales favorisant les interactions des uns et des autres. Elle intervient dans des réseaux, des cercles, des classes qui intègrent des codes spécifiques visant à se distinguer en mettant à profit des pratiques linguistiques référentielles. La politesse relève du champ sociologique et s'intéresse à la transmission de la pensée, de la culture, de l’éducation. Pour Pierre Bourdieu 1,les stratégies linguistiques des différents agents dépendent étroitement de leur position dans la structure de la distribution du capital linguistique dont on sait que, par l’intermédiaire de la structure des chances d’accès au système scolaire, elle dépend de la structure des rapports de classe.

Le mot "politesse" vient du latin "politus", lui-même issu du verbe "polire" signifiant, au sens propre, l’action de polir et, au sens figuré, celle d’orner avec élégance.

Attendue ou surprenante, volontaire ou subie, la politesse est aussi un acte individuel qui permet de construire une relation bienséante d'une manière brève ou durable, politique, sociale, familiale... Elle n’attend rien ou exige tout. La politesse interroge la sensibilité de l’autre, elle peut être condescendante, bienveillante, intelligente, stratégique, invisible. Pudique, elle délimite les rapports avec une juste distance qui préserve son intimité, son identité. Respectueuse de soi, des autres, la politesse est plus ou moins bien vécue, selon les âges, les cultures, les opinions. La politesse peut être soupçonneuse, instrumentalisée, laconique, mécanique. L’unique réflexe viable de remercier annule la louange en induisant qu’elle est pure politesse 2. Elle est à double tranchant, hypocrite, fausse, incendiaire.Ca le dérange pas de me sourire alors qu’il ne perd jamais une occasion de me descendre ? Non, cela ne le dérange pas, ça s'appelle la politesse. Ah non, pas d’accord... 3 Forcée, contrainte, absurde, maladroite, théâtrale ou différée.Nous nous saluons avec une politesse outrée d’où suinte un passif que chacun taira afin de ne rien compromettre 4. Lâche, surannée, la politesse peut être encore une vertu courageuse face à une injure. Bien le prendre est poli ou lâche, mal le prendre est impoli ou brave 5.

De nature universelle (le Bonjour” et au revoir par exemple), la politesse est un indicateur marquant dès l’enfance. Obligée, exagérée, ordonnée, l’éducation façonne des règles du savoir-vivre, elle renforce les mécanismes de défense masquant des tensions sous-jacentes entre ce qui semble juste ou injuste. Le mot politesse vient du latin politus, lui-même issu du verbe polire signifiant, au sens propre, l’action de polir et, au sens figuré, celle d’orner avec élégance. Après un passage par l’italien pulitezza (désignant l’élégance et le soin), politus finit par donner le français politesse, attesté dès le XVIe siècle, mais dont le sens actuel date du XVIIe siècle 6.

En 1892, le philosophe Henri Bergson 7 distingue trois formes de politesse. La politesse des manières n’est qu’une simple application des codes et des règles et n’a pas grand-chose à voir avec la civilisation : Les gens les plus civils ne sont pas toujours les plus civilisés. La politesse de l’esprit est un talent : celui de savoir valoriser ses interlocuteurs et leur accorder l’exacte qualité d’attention qu’ils attendent de vous. Mais la seule qui mérite la qualité de vertu, c’est la politesse du cœur qu’il décrit comme la charité s’exerçant dans la région des amours-propres.

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