mardi 30 août 2022

La Défenseure des droits estime que « c’est à l’école de s’adapter » aux enfants handicapés

Le Monde avec AFP   Publié le 28 août 2022 

Claire Hédon souligne, dans un rapport qui sera publié lundi, le décalage persistant « entre l’augmentation des moyens humains et financiers » et « le nombre grandissant d’enfants dont les besoins sont très largement non ou mal couverts ».

Des enfants handicapés déscolarisés faute d’accueil approprié, des accompagnants d’élèves précaires, peu formés, parfois absents… La Défenseure des droits, Claire Hédon, appelle à mieux adapter l’école aux besoins des élèves en situation de handicap, dans un rapport qui sera publié lundi 29 août et que l’Agence France-Presse (AFP) a pu consulter.

Entre des parents qui espèrent depuis des mois une aide pour que leur enfant handicapé soit scolarisé et d’autres qui sont « épuisés par des appels quasi hebdomadaires de l’école » parce qu’il « serait préférable qu’ils gardent [leur enfant] à la maison », ces réclamations représentaient en 2021 près de 20 % des saisines adressées à la Défenseure des droits dans le domaine des droits de l’enfant.

Compte tenu de l’impulsion donnée ces dernières années à l’école inclusive, quatre cent mille enfants en situation de handicap étaient scolarisés en milieu ordinaire en 2021 – un nombre en hausse de 19 % sur cinq ans –, selon ce rapport. Pour les aider, les accompagnants d’élèves en situation de handicap (AESH) recrutés par l’éducation nationale, cent vingt-cinq mille en 2021, ont vu leur nombre augmenter de 35 % sur cinq ans.

Manque de moyens financiers et humains

La Défenseure des droits souligne malgré tout dans son rapport le décalage persistant « entre l’augmentation des moyens humains et financiers » et « le nombre grandissant d’enfants dont les besoins sont très largement non ou mal couverts ».

Dans un entretien à l’AFP, Mme Hédon relève :

« Ce qui nous a frappés dans les réclamations reçues ces derniers mois et qui sont en augmentation, ce sont les attributions d’AESH qui ne sont pas appliquées faute de moyens financiers et humains. Or, les conséquences sont dramatiques pour l’enfant : non-scolarisation, déscolarisation ou très peu d’heures de cours. »

Mme Hédon réclame ainsi des « statistiques plus fines sur le temps de scolarisation effective » de ces élèves aux besoins spécifiques. La Défenseure des droits recommande également d’« inscrire dans les budgets de chaque année scolaire une enveloppe prévisionnelle pour les demandes d’AESH en cours d’année », dont beaucoup sont refusées par les établissements scolaires faute de budget.

Elle recommande aussi que les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH), qui notifient le besoin d’une AESH, se fondent exclusivement sur les besoins de l’enfant, et pas sur le manque de moyens de l’académie.

Des situations remontées à la Défenseure des droits font apparaître que certains pôles inclusifs d’accompagnement localisé (PIAL), qui coordonnent les aides humaines, « font primer la gestion des ressources humaines sur la réponse aux besoins de l’enfant ».

Les AESH, dans leur grande majorité des femmes, ne sont pas assez formés, parfois peu intégrés aux équipes pédagogiques, ont des missions insuffisamment définies et parfois peu de relations avec les parents. En particulier, « elles ont besoin d’être formées aux différentes formes de handicap, car on ne prend pas en charge de la même manière un enfant autiste et un élève “dys” [dyslexie, dysorthographie, dyspraxie…] », relève Mme Hédon. Le statut des AESH, rémunérés par l’éducation nationale, a été amélioré ces dernières années, mais ils ont toujours des temps partiels (vingt-quatre heures par semaine), pour des salaires avoisinant 800 euros.

Difficultés du temps périscolaire

Le rapport pointe en particulier les difficultés rencontrées lors du temps périscolaire, comme la cantine, où les intervenants sont rémunérés par les collectivités locales.

« Des AESH seraient partantes pour couvrir le temps périscolaire, mais on affecte quelqu’un d’autre, car cela ne dépend pas du même budget et des mêmes acteurs », au détriment de « l’intérêt supérieur de l’enfant », qui a besoin de stabilité, relève Mme Hédon.

Plus généralement, la Défenseure des droits souligne que le système éducatif doit s’adapter aux élèves en situation de handicap et, pour cela, mieux former les enseignants à les prendre en charge, au lieu de compter uniquement sur les AESH. L’attribution d’un AESH n’est « ni un préalable ni une condition à la scolarisation de l’élève », rappelle-t-elle.

Le rapport cite l’exemple d’un enseignant qui se trouvait face à un enfant ne parvenant pas à comprendre les consignes. Il a décidé d’adapter son enseignement à cet enfant et s’est aperçu que cela bénéficiait à l’ensemble des élèves. « C’est à l’école de s’adapter… et ce que l’on voit, c’est qu’on demande à l’enfant de s’adapter à l’école », conclut Mme Hédon.


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