mercredi 2 mars 2022

Yannick Jadot, Fabien Roussel et Anne Hidalgo proposent de libérer l’hôpital public des exigences comptables

Publié le 1er mars 2022

Les trois candidats de gauche, mais aussi Valérie Pécresse, ont détaillé leurs propositions pour la santé, mardi 1er mars, lors du « grand oral » organisé par la Mutualité française.

Lutte contre les déserts médicaux, réforme de l’hôpital, efforts de prévention… Quatre candidats à l’Elysée – Valérie Pécresse, Anne Hidalgo, Yannick Jadot et Fabien Roussel – ont eu l’occasion de détailler leurs mesures pour la santé et la protection sociale, mardi 1er mars, lors du grand oral organisé par la Mutualité française à Paris. Les trois candidats de gauche ont tous demandé que l’hôpital public soit soustrait aux ambitions de rentabilité.

Yannick Jadot : d’abord, « ne pas tomber malade »

Yannick Jadot au Palais Brongniart, à Paris, pour le « grand oral » sur la santé organisé par la Mutualité française, le 1er mars 2022.

Parmi les priorités du candidat écologiste, en finir avec la conception de l’hôpital comme « variable d’ajustement de notre système de santé »« Pendant plusieurs quinquennats, l’hôpital public a été considéré comme une entreprise qui devait être rentable : tarification à l’acte, réduction des lits, baisse de budget, Ondam [Objectif national de dépenses d’assurance-maladie] qui réduisait année après année… », dit M. Jadot. Il compte « sortir profondément de cette logique » en provoquant un « sursaut d’attractivité », avec le recrutement de 100 000 infirmiers et l’amélioration des conditions de travail et des salaires.

Au sujet de la « santé environnementale », il s’agit surtout de faire davantage contre les maladies chroniques liées aux pollutions. Le candidat a appelé à « sortir du déni », en évoquant une hausse de 40 % du nombre d’affections de longue durée en dix ans.

« La politique de santé est aujourd’hui d’abord une politique de soin ; dans notre logique, c’est d’abord de ne pas tomber malade », a dit le candidat, déplorant que la prévention ne compte que pour 1,8 % du budget de la santé. Yannick Jadot veut aussi lutter contre la « régression incontestable de la prise en compte de la pénibilité »au travail au cours du quinquennat Macron : « Les cadres partant à la retraite ont dix ans d’espérance de vie de plus que les ouvriers. C’est insupportable », a-t-il fustigé.

Anne Hidalgo : un débat sanitaire au Parlement chaque semestre

La candidate socialiste a pris la parole pendant cinq minutes pour exposer sa vision de la santé en France, mardi matin, avant de répondre aux questions du public rassemblé à la Mutualité française. Anne Hidalgo a considéré que le système de santé français présentait des « signes extrêmement forts de difficultés »avant même la crise du Covid-19. « Les soignants nous disaient déjà : on ne peut pas demander de l’hôpital la rentabilité exigée d’une entreprise privée », selon elle, ajoutant que « le service public n’est pas le service qu’on réserve à ceux qui ne pourraient pas aller se payer le privé ».

Comme Yannick Jadot, la socialiste propose de ne plus financer l’hôpital public à partir d’un Ondam (objectif national de dépenses d’assurance-maladie) et de la tarification à l’acte. Elle veut aussi augmenter les effectifs des soignants. Soucieuse de démocratie sanitaire, Mme Hidalgo compte faire tenir un débat sur la santé au Parlement deux fois par an.

Contre les déserts médicaux, elle propose pour le long terme de parvenir à la formation de 15 000 médecins par an, ainsi que davantage d’infirmiers et de sages-femmes. Mais pour parer à l’urgence, il s’agit d’« utiliser la quatrième année d’internat comme année de professionnalisation », au cours de laquelle des internes seraient envoyés dans les déserts médicaux. Ils seraient pour cela rémunérés 3 500 euros mensuels. Dès 2022, cela permettrait « de déplacer environ 4 000 jeunes internes dans les déserts médicaux », selon elle.

Anne Hidalgo au Palais Brongniart, à Paris, lors du « grand oral » sur la santé organisé par la Mutualité française, le 1er mars 2022.

Fabien Roussel : « Nous ferons cotiser le capital »

Le candidat communiste à l’Elysée, Fabien Roussel, a estimé que « la protection sociale dans notre pays recule, les inégalités sociales de santé se creusent et les déserts médicaux avancent ». Comme les deux autres candidats de gauche présents, il a vilipendé la « vision comptable » de la santé, qui place les personnels soignants « en grande souffrance ». Il a déploré une « santé de plus en plus marchandisée, avec des profits immenses jusqu’aux Ehpad et aux cliniques privées très lucratives ».

Contre la « multiplication des exonérations de cotisations patronales », il a assuré que « nous ferons cotiser le capital au même niveau que le travail ». Il a aussi regretté qu’« en vingt-cinq ans la fiscalité ait été multipliée par quinze sur les mutuelles », et que celles-ci aient été « mises en concurrence avec les assurances privées ». Résultat, selon lui : « L’accès aux soins est remis en cause. »

Le communiste entend par conséquent « reconstruire une grande sécurité sociale du XXIe siècle », avec un « vrai remboursement à 100 % pour tous les soins », y compris les affections de longue durée, et « pas seulement pour les frais d’hospitalisation ». Il a aussi appelé de ses vœux un « grand service public des personnes âgées ».

Fabien Roussel au Palais Brongniart, à Paris, lors du « grand oral » sur la santé organisé par la Mutualité française, le 1er mars 2022.

Valérie Pécresse entend « débureaucratiser » l’hôpital

La candidate des Républicains a d’abord fait le constat d’un système de santé « en grande souffrance », avec 5 millions de Français, d’après elle, qui ne disposent pas de médecin traitant. La candidate a déploré un « recul de l’accès aux soins » et des délais « beaucoup trop longs », ainsi que des déserts médicaux « dans les territoires ruraux, les quartiers populaires et les centres-villes de certaines grandes métropoles ».

En guise de solutions, la candidate de la droite a proposé de décentraliser la gestion de l’offre de santé – il s’agirait notamment de donner la présidence des agences régionales de santé aux régions. Elle veut aussi créer un statut de « docteur junior » pour les généralistes, qui consisterait à envoyer 4 000 jeunes médecins, chaque année, suivre une année d’étude supplémentaire dans les « territoires carencés ». Infirmières, sages-femmes et pharmaciens se verraient confier davantage de responsabilités. L’objectif est de « diviser par deux » le délai pour avoir accès aux soins à moins de trente minutes de chez soi.

Concernant l’hôpital, elle veut recruter 25 000 soignants et former pendant le quinquennat deux fois plus de médecins qu’aujourd’hui. Il serait aussi question de « débureaucratiser »l’hôpital, pour qu’il soit plus « ouvert et transparent ». Elle souhaite qu’une partie de la tarification dépende de l’avis des patients sur la qualité des soins reçus. Une « révolution de la prévention » doit aussi permettre à tous les Français, d’ici à dix ans, de jouir de trois années supplémentaires d’espérance de vie en bonne santé.

Valérie Pécresse au Palais Brongniart, à Paris, lors du « grand oral » sur la santé organisé par la Mutualité française, le 1er mars 2022.


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