jeudi 20 mai 2021

Au rapport Premier confinement : une jeunesse en détresse

par Elsa Maudet  publié le 20 mai 2021

Une enquête menée par Santé publique France auprès de milliers de jeunes montre que ceux ayant les conditions de vie les plus difficiles ont davantage souffert psychologiquement du confinement de mars 2020.

Comment enfants et adolescents ont-ils émotionnellement vécu le premier confinement, au printemps 2020 ? C’est à cette question que s’est attaché à répondre Santé publique France, dans une étude baptisée Confeado, menée auprès de 3 898 jeunes âgés de 9 à 18 ans entre juin et septembre (1) et publiée ce jeudi dans son bulletin épidémiologique hebdomadaire. Premier constat : les adolescents ont plus souffert de l’enfermement et de l’isolement que les enfants.

Le sommeil a notamment été touché puisque 30 % des 13-18 ans disent avoir rencontré des difficultés à s’endormir, 12,5 % avoir fait plus de cauchemars et 18,3 % avoir eu davantage de réveils nocturnes (contre respectivement 27,2 %, 9,5 % et 11,4 % chez les 9-12 ans). Le confinement a également eu des conséquences sur leur moral puisque 7 % se sentaient plus tristes le matin, 10,8 % plus préoccupés, 13,1 % nerveux, 5,2 % avaient très peur (contre respectivement 2,2 %, 4,5 % 5,2 % et 4,6 % chez les enfants).

Sur les différents items étudiés, les filles ont ressenti davantage de détresse psychologique que les garçons. Une différence qui «pourrait s’expliquer par un stress perçu plus important chez les filles que les garçons ou des différences de modalités de réponse entre sexes (les filles étant plus enclines à l’expression des émotions), mais aussi par la répartition genrée des tâches, notamment éducatives et domestiques, au sein de la famille, y compris en période de confinement. Parmi les enfants et les adolescents ayant cité le fait de s’occuper de ses frères et sœurs comme un point négatif du confinement, les filles étaient significativement plus nombreuses que les garçons (5,2 % vs 3,2 %)».

«Maintenir le lien social»

L’étude Confeado porte sur des jeunes aux profils variés, allant du CE2 ordinaire au lycée professionnel, en passant par la classe Ulis (destinée aux enfants handicapés), la Segpa, le CAP et des jeunes pris en charge par la protection de l’enfance. Ses résultats apportent un éclairage socio-économique au sentiment de détresse ressenti par les sondés lors du premier confinement. En effet, a pu constater Santé publique France, les plus touchés psychologiquement «étaient exposés à des conditions de vie plus difficiles». D’abord au niveau du logement, puisqu’ils étaient davantage confinés en zone urbaine, dans un appartement ou une maison sans espace extérieur et leur logement était davantage suroccupé.

Les enfants de familles monoparentales ont ressenti davantage de détresse (25,9 % contre 22,2 % pour les autres enfants), ainsi que ceux dont les parents avaient un niveau d’études inférieur ou égal au bac (52 % contre 45,5 %).

Les enfants et adolescents ayant moins bien vécu le confinement sont également ceux qui avaient le moins d’échappatoires : une mauvaise connexion à Internet, pas de tablette, pas de console de jeux, peu ou pas de sorties, pas de contacts avec les amis. Les enfants pris en charge par la protection de l’enfance ont globalement fait plus d’activités que les autres, car ils étaient entourés «de professionnels dédiés pour s’occuper d’eux».

Recommandations

Enfin, le fait d’avoir eu ou non un proche malade voire hospitalisé à cause du Covid-19 a joué : «36,6 % des enfants et des adolescents qui ont ressenti de la détresse pendant le confinement ont eu un proche infecté par le Covid-19, contre 29,5 % de ceux qui n’avaient pas de détresse, et 40,1 % des enfants et des adolescents qui ont ressenti de la détresse ont eu quelqu’un dans leur entourage hospitalisé des suites du Covid-19, contre 31,9 % des autres», note l’étude.

De ces enseignements, Santé publique France tire des recommandations, visant à mieux accompagner psychologiquement les jeunes en cas de confinement. «Le soutien aux parents par la proposition d’une aide sociale en ciblant les familles monoparentales et les quartiers défavorisés pourrait contribuer à améliorer l’état psychologique et la résilience des enfants et des adolescents, plaide l’institution. Le maintien des activités périscolaires (activités ludiques, aide aux devoirs…), des bibliothèques et ludothèques, ainsi qu’une attention accrue de l’école à ses élèves pourraient diminuer le sentiment d’isolement […] Il est fortement conseillé que les enfants et les adolescents puissent continuer à sortir pendant le confinement, afin de favoriser leur bien-être psychologique et de maintenir le lien social.»

(1) Etude menée entre le 9 juin et le 14 septembre 2020 sur un échantillon non représentatif de jeunes âgés de 9 à 18 ans, à partir d’un questionnaire en ligne et d’un questionnaire papier.


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