vendredi 13 novembre 2020

Élisabeth Badinter : “Être une bonne mère ? C’est se demander ce qu’on a raté”

Élisabeth Badinter, propos recueillis par Martin Legros publié le  

Et si le conflit était le grand ressort de la condition féminine ? Conflit entre la femme, la mère, la citoyenne, conflit entre la puissance d’engendrer et la puissance d’agir dans le monde, conflit avec les hommes et entre femmes, mais conflits intérieurs aussi entre toutes ces dimensions de l’expérience féminine… C’est l’idée que ne cesse d’explorer la philosophe Élisabeth Badinter, en circulant avec autant de facilité que d’intelligence entre le XVIIIe siècle, pour lequel elle nourrit une véritable passion, et la transformation de la place des femmes dans le monde contemporain qui ne cesse de la solliciter. Après Le Conflit. La femme et la mère (Flammarion, 2010), où elle dénonçait la réassignation des femmes à leur corps et à la maternité, et après Le Pouvoir au féminin (Flammarion, 2016), consacré à l’invention par l’impératrice Marie-Thérèse d’Autriche d’une nouvelle souveraineté au féminin, voilà que Badinter poursuit l’enquête sur ce personnage historique sous l’angle de l’invention de la maternité moderne. Avant même que Rousseau n’invite les parents, dans l’Émile (1762), à prendre en charge directement l’éducation sensible de leurs enfants, voilà une femme, la plus puissante d’Europe, qui, la première fois peut-être dans les sphères dominantes de l’époque, fait de l’éducation la grande tâche de sa vie. Et découvre du même coup, comme tous les parents modernes, qu’elle est tiraillée par le sentiment du doute et de l’échec.

Dans un entretien passionnant, Élisabeth Badinter nous explique cette révolution des sensibilités. Mais elle déchiffre également ses répercussions dans le contemporain et les ambivalences du nouveau pouvoir féminin, en notre temps.

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