lundi 26 octobre 2020

Clofoctol : la mystérieuse molécule anti-Covid de Pasteur Lille ?

Lille, le mercredi 14 octobre 2020 - Fin septembre, la presse (dont le JIM) faisaient ses choux gras de la découverte d’un mystérieux « médicament miracle » à l’Institut Pasteur de Lille (IPL).

Cette molécule « anonyme » avait été identifiée grâce à des recherches de repositionnement menées sur près de 2 000 médicaments testés in vitro sur le SARS-COV2.

« Nous avons démontré in vitro qu’une molécule est active contre le coronavirus. Nous l’avons testée sur des cellules humaines du poumon et les résultats se sont révélés très prometteurs. Pris aux premiers symptômes de la maladie, ce médicament réduit la charge virale du porteur de la maladie, évite la contagion. Pris plus tard, il contrecarre ses formes graves. Son action est bien celle d’un antiviral et non celle d’un anti-inflammatoire » expliquait alors le Pr Benoît Déprez, directeur scientifique de l’IPL.

Bernard Arnault y croit

Si cette annonce laissait sceptiques certains qui déploraient un nouveau "coup de com" dans l’histoire de l’épidémie de Covid, ce ne fut pas le cas du milliardaire Bernard Arnault, originaire de Lille, qui a promis il y a quelques jours un financement à hauteur de 5 millions d’euros pour un essai clinique versus placebo, ni le cas de la région Hauts-de-France qui a débloqué 780 000 € pour un essai chez le macaque.

Il revient à l’agence de presse AEF (dirigée par Raymond Soubie, ancien conseiller de Nicolas Sarkozy) d’avoir donné un nom à cette molécule.

Il s’agirait du clofoctol, un antibiotique bactériostatique actif sur les cocci gram positifs commercialisé sous la marque Octofene de 1978 à 2005 par les laboratoires Fournier. Il était utilisé sous forme de suppositoire en milieu hospitalier dans les infections respiratoires hautes bénignes. En 2005, les autorités sanitaires décidaient de son retrait du marché pour faible service médical rendu.  En revanche, ce produit reste disponible dans certains pays d’Europe.

L’institut Pasteur ne confirme pas, mais presque

Interrogé par AEF, l’Institut Pasteur ne souhaite « ni confirmer ni infirmer » par crainte de « l’hystérie ». « Une pénurie du produit pourrait nous empêcher de faire un essai en bonne et due forme » précise le Pr Déprez.

La Voix du Nord, elle, verse une pièce de plus au dossier en soulignant qu’une source à l’IPL lui a bien indiqué que le médicament à l’étude était un suppositoire antibiotique retiré du marché en 2005…

Bernard Arnault et Xavier Bertrand au secours d’un État défaillant ?

En outre, cette "affaire" met en évidence, une fois encore, les difficultés de la recherche française.

Ainsi, si cette piste a été présentée dès le mois de mai à Frédérique Vidal, ministre de l'Enseignement supérieur, de la Recherche et de l'Innovation, lors d’un déplacement sur le campus de la fondation Pasteur Lille et début août à Jean Castex, lors d’une visite du centre de dépistage de l’institut, les autorités n’ont pas eu « de réactions » déplore Benoît Déprez.

C’est pour cela que fin septembre, l’IPF faisait le choix du "buzz" pour pousser les autorités et d’éventuels mécènes à financer ce projet.

Une opération qui aura donc porté ses fruits…

Notons pour finir que le fait que la molécule de clofoctol soit active in vitro sur le virus ou sur des cultures cellulaires ne préjuge pas de son intérêt in vivo.

Xavier Bataille



Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire