vendredi 10 juillet 2020

Handicap : le Défenseur des droits pointe des lacunes dans l'accès aux soins

PAR 
COLINE GARRÉ -  
PUBLIÉ LE 10/07/2020

Jacques Toubon, Défenseur des droits
Jacques Toubon, Défenseur des droits
Crédit photo : S. Toubon
Dix ans après l'entrée en vigueur de la Convention internationale relative aux droits des personnes handicapées (CIDPH), le Défenseur des droits en tire un bilan « contrasté » dans un rapport étoffé de plus d'une centaine de pages, paru ce 9 juillet, et adressé au président de la République et au Premier ministre Jean Castex.
« Si de nombreux progrès ont été réalisés ces dernières années, d'importantes lacunes subsistent ; la France n'a pas encore pleinement pris en considération le changement de modèle », considère le Défenseur des droits, qui analyse l'application en France d'une trentaine d'articles de la Convention internationale.
« L'actuel gouvernement a été particulièrement actif mais nous sommes encore loin du compte », a déclaré Jacques Toubon à l'occasion d'un chat avec les lecteurs du « Quotidien ». C'est la raison selon lui pour laquelle, en 2019, le handicap était, pour la troisième année consécutive, le premier motif de saisine du DDD en matière de discrimination (22,7 % soit 1 237 saisines).

Des lieux de soins inaccessibles
En matière de santé, les personnes handicapées rencontrent de nombreuses difficultés pour accéder aux soins courants : à commencer par l'accessibilité des lieux de soin, une situation qui s'est aggravée depuis la réforme de 2015, note le DDD. « En effet, contrairement à ce que soutient l’État, la mise aux normes d’accessibilité n’est pas opposable aux établissements recevant du public (ERP) situés dans les copropriétés. Or, de nombreux cabinets médicaux sont implantés dans ces bâtiments », lit-on.
Le DDD déplore, en outre, un non-recours aux soins en raison de la méconnaissance des dispositifs de prise en charge (couverture maladie universelle complémentaire, CMU-C, aide à l’acquisition d’une complémentaire santé, ACS, etc.), de la complexité des démarches administratives, et de restes à charge potentiellement importants.
Le DDD signale aussi que le panier de soins des établissements sociaux n'est pas suffisamment clarifié, si bien que des parents se retrouvent à payer des soins complémentaires, parfois non remboursés par certaines caisses d'Assurance-maladie.
Les droits des enfants pas pleinement effectifs
Les enfants handicapés peinent aussi à accéder pleinement à leurs droits, constate le rapport. La situation des petits souffrant de troubles du spectre autistique est particulièrement préoccupante, puisqu'en 2016-2017, environ 40 % des saisines relatives aux droits des enfants en situation de handicap les concernaient. Les mesures de la dernière stratégie pour les troubles du neuro-développement « vont dans le bon sens, mais elles mettent un certain temps à s’exécuter et il paraît encore trop tôt pour pouvoir en apprécier l’efficacité et savoir si elles seront suffisantes pour répondre aux attentes des familles », considère le DDD.
Plus largement, l'institution regrette l'absence de prise en compte des spécificités du handicap dans les différents plans de lutte contre la maltraitance des enfants.
Le cadre des soins psychiatriques à réformer
Le DDD consacre également plusieurs recommandations (parmi les 120 qu'il émet en conclusion) aux personnes bénéficiant de soins psychiatriques. Il appelle notamment à réformer le dispositif de leur prise en charge afin de garantir le respect de leurs droits fondamentaux, en recherchant de manière effective, le consentement avant toute mesure d’hospitalisation ou de traitements médicamenteux, en garantissant l'accès à l'information sur les droits et les voies de recours, en rendant effectif le contrôle judiciaire des hospitalisations sous contraintes, ou encore en limitant l'isolement…
Le DDD invite enfin à mieux encadrer le statut des Unités pour malades difficiles (10 UMD en France), en précisant les critères d’admission et les modalités de sortie.
La France devait être auditionnée sur son application de la CIDPH en septembre 2020 à l'ONU ; un rendez-vous reporté à cause de la crise sanitaire liée au Covid-19.

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