vendredi 17 avril 2020

MA FATIGUE « COVIDIENNE »

Anna, infirmière, est épuisé par ses journées de travail au CMP, marquées par les contraintes liées au confinement. Mais il s’agit d’une « bonne fatigue », celle liée au devoir accompli, « le prix d’une journée d’efforts et de luttes. Non pas le prix qu’on paie, mais celui qu’on reçoit ». Une fatigue toute « covidienne »...

Je suis crevée… Non d’avoir pris un vilain clou dans le pneu de mon bolide, mais parce que depuis quatre semaines, je rentre du CMP éreintée. J’ai presque honte de le dire quand je pense aux collègues qui travaillent en réanimation et assurent les soins de patients touchés par le Covid-19, engoncés dans des tenues de cosmonautes. Dans ma pratique actuelle, pas de mise en décubitus ventral de patient intubés-ventilés en surpoids, fragiles et en grande détresse respiratoire. Il n’empêche, je suis vidée.

Le Lancet Journal a publié le 26 février 2020 une étude sur les effets psychologiques du confinement (1). Il en ressort que l’impact psychologique est vaste et que la privation de liberté qui en découle n’est pas anodine. L’information éclairée et la possibilité de se projeter vers une fin de confinement apparaissent comme une aide. Reste que le Président de la République a annoncé ce lundi une fin de confinement pour le 11 mai seulement si les conditions sont favorables (on croise les doigts...). Par ailleurs, l’étude du Lancet évoque aussi un impact sur le système de soins. Rien de spécifique toutefois concernant les personnes touchées par la maladie mentale. Côté soignants, travailler dans des CMP remaniés « façon Covid » mobilise pourtant une énergie importante nécessaire à la permanence des soins.

La bonne et la mauvaise fatigue

Eric Fiat dans son ode à la fatigue nous expliquait, bien avant le confinement, qu’une fatigue lancinante gangrénait le monde hospitalier (2). Pas de l’ordre de la « pleurnicherie hospitalière permanente » comme l’a évoqué récemment un journaliste maladroit. Le philosophe distingue la bonne et la mauvaise fatigue. D’un côté, la mauvaise fatigue touche le travailleur las qui a perdu le sens de son métier et risque le burn out. De l’autre, la bonne fatigue caractérise celui qui a le sens du devoir accompli, le sportif harassé mais vainqueur ou encore les amants ivres de fatigue après une nuit d’amour.



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