mardi 14 avril 2020

L'engagement des patients, une deuxième vague pour bientôt ? (partie 2/3)

Publié le 10/04/20

Partie 2/3
Une terminologie de l'engagement des patients se dessine

Afin d'enclencher le changement, une terminologie de l'engagement des patients est proposée. En espérant contribuer à l'essor d'un nouveau modèle de soins et du management du système de santé, associant savoirs scientifiques et expérientiels.
En décembre dernier, une approche terminologique de l'engagement des patients a été publiée* dans la Revue d'épidémiologie et de santé publique. Il s'agit d'une première étape de structuration des démarches en la matière en établissement de santé, résument les auteurs. Ceux-ci ont mené une revue exploratoire de la littérature internationale dans les bases de données PubMed et Cairn.info, afin d'identifier les principaux cadres conceptuels et terminologiques. Ils ont ensuite recensé les concepts et pratiques dans les organisations leader des pays où cette démarche était implantée. Et des échanges ont été menés avec l'équipe qui a développé le modèle de Montréal (lire l'encadré). "Les termes patients, interaction, expérience patient, savoirs expérientiels, engagement des patients, patient-partenaire et ses déclinaisons en patient-ressource, pair-aidant, formateur, chercheur et coach, ont été définis", informent les auteurs. In fine, ce travail propose "une simplification et une stabilisation du vocabulaire avec une approche pragmatique", écrivent les auteurs, qui espèrent qu'il contribuera à l'essor d'un nouveau modèle de soins et plus largement de management du système de santé, associant les savoirs scientifiques et expérientiels.

Le modèle de Montréal, quèsaco ?

Les modèles qui accordent une voix aux patients sont en plein essor à l'image du modèle relationnel proposé par l'université de Montréal. Comme l'explique Marie-Pascale Pomey, l'une des fondatrices du Montreal model dans une publication en 2015, celui-ci "illustre comment l'expertise de la vie avec la maladie des patients peut être intégrée au niveau des soins grâce à des patients-ressources qui contribuent à l'amélioration de la qualité des soins et de la qualité de vie tant des patients que des professionnels ; au niveau de l'enseignement des professionnels de santé et du psychosocial avec les patients-formateurs et au niveau de la recherche par l'implication de patients-chercheurs".

La coconstruction, le degré d'engagement le plus élevé

D'après les auteurs, l'engagement patient représente la contribution du patient ou de ses proches au système de santé, en se fondant notamment sur la reconnaissance de leurs savoirs expérientiels. Ils précisent que "le patient peut contribuer à différents degrés et en différents lieux, pour sa propre santé ou au sein d'une équipe au niveau collectif (pour celle d'autrui, organisation de soins, gouvernance et politique de santé), selon une implication allant de la simple diffusion à la véritable coconstruction et la participation à la prise de décision et à son autonomisation". Et d'ajouter que la coconstruction constitue "le degré d'engagement le plus élevé". Car "il s'agit d'un processus coopératif d'élaboration d'un projet ou d'une action au cours duquel l'interaction des différents acteurs concernés permet le partage des points de vue pour aboutir à une réalité commune".

Les principaux concepts et définitions autour de l'engagement patient prennent une orientation individuelle ou collective.
Les principaux concepts et définitions autour de l'engagement patient prennent une orientation individuelle ou collective.

Philippe Michel, professeur des universités-praticien hospitalier en épidémiologie, santé publique et économie de la santé, premier auteur de cette publication, explique à Hospimedia que ce travail "propose un vocabulaire recentré autour de l'engagement patient avec cinq catégories de mission que l'on peut leur attribuer au niveau des établissements de santé et des communautés professionnelles territoriales de santé".

Un accompagnement nécessaire à la transformation

Sans vouloir imposer une normalisation des définitions, c'est bien un cadre partagé et cohérent que ce travail souhaite diffuser. Sur ces bases pourra naître une nouvelle relation de soins dans laquelle "le patient devient un partenaire indispensable et à part entière de l'équipe soignante". En discussion, les chercheurs estiment que cette transformation nécessite pour chacun de trouver sa place et un nouvel équilibre des savoirs et des pouvoirs. Ce qui requiert un accompagnement des uns et des autres, une anticipation des règles juridiques, éthiques et de confidentialité, la reconnaissance des contributions de chaque partie, la formation des acteurs, etc. Devra aussi être associée à cette évolution, une évaluation de l'impact de l'engagement des patients, des données probantes étant indispensables pour appuyer les bénéfices attendus, expriment les auteurs. Ces derniers tempèrent enfin leur réflexion par le caractère exploratoire de leur travail, justifié par l'émergence de ce domaine.

* Approche terminologique de l'engagement des patients : point de vue d'un établissement de santé français, Philippe Michel et al., Revue d'épidémiologie et de santé publique. Décembre 2019

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