jeudi 2 janvier 2020

Quand le père boit, l’enfant trinque

Publié le 24/12/2019




Si les conséquences fâcheuses de l’alcoolisme maternel pour l’enfant sont désormais bien documentées (en particulier depuis la description du tristement célèbre syndrome de l’alcoolisme fœtal), les répercussions de l’alcoolisation du père sur sa progéniture sont encore moins connues. Pour éclaircir cette question, plus particulièrement sur l’association possible entre alcoolisme paternel et risque accru de suicide chez ses enfants, une étude réalisée en Suède examine l’incidence de l’alcoolisme du père sur le risque ultérieur de comportement suicidaire de ses enfants, depuis l’âge de 12 ans à l’approche de la quarantaine.

S’appuyant sur une cohorte de 68 910 Suédois nés entre 1970 et 1985 dont le père avait participé au service militaire obligatoire (en 1969–1970), les auteurs ont évalué le degré d’alcoolisme paternel, d’après les propos de leurs enfants et les données recueillies à ce sujet, à l’époque de la conscription des futurs pères. Ces indications sur le niveau présumé d’alcoolisation du père ont été confrontées aux informations disponibles pour la génération suivante, obtenues dans les registres des statistiques de Suède relatives aux tentatives de suicide ou aux suicides accomplis.

Après ajustement des données pour des facteurs confondants, les auteurs constatent une association significative entre un risque accru de comportement suicidaire à la génération n et un « lourd alcoolisme paternel » (heavy drinker father) à la génération n-1 : HR (Hazard Ratio) = 1,4 (intervalle de confiance à 95 % [IC95] de 1,02 à 1,93). Ce risque de comportement suicidaire se révèle le plus marqué pour les enfants dont le père a déjà été arrêté, au moins à deux reprises pour un état d’ivresse (HR = 2,1 [IC95 de 1,4 à 3,14]), ou a été « hospitalisé pour un motif imputable à l’alcool » (HR = 1,9 [IC95 de 1,27 à 2,85]). Et, même quand le niveau d’alcoolisation paternelle ne s’accompagne pas de troubles directement liés à l’alcool chez le père, cette étude confirme l’existence d’une « augmentation du risque suicidaire » chez ses enfants. D’où cette transposition possible du dicton « à père avare, fils prodigue » : à père buveur, enfant fragile...

Dr Alain Cohen
RÉFÉRENCE
Landberg J et coll.: Father’s alcohol use and suicidal behavior in offspring during youth and young adulthood. Acta Psychiatrica Scandinavica 2019 : 140 ; 563–573.

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