jeudi 24 octobre 2019

L’allergie alimentaire chez l’enfant est-elle liée au stress maternel au cours de la grossesse ?

Publié le 11/10/2019




L’allergie alimentaire affecterait entre 3 % et 6 % des enfants et son incidence serait en augmentation. De nombreux travaux sont consacrés à la compréhension de leur survenue. Parmi l’une des causes possibles, le stress maternel, fréquent pendant la grossesse. En zone urbaine, le stress prénatal affecterait plus de 75 % des femmes. Il a été associé à l’atopie, à travers l’activation de l’axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien maternel, avec l’augmentation de la sécrétion de glucocorticoïdes. Le cortisol traverse en effet la barrière placentaire ce qui peut produire des changements à long terme dans l’axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien du nouveau-né.Des altérations de l’expression des gènes peuvent survenir, perturbant le développement d’un microbiome néonatal équilibré.
On sait déjà que le stress maternel pendant la grossesse est associé à une augmentation de plus de 50 % du risque de respiration sifflante et d’asthme. Il existe, en revanche, peu de données concernant un possible lien avec l’allergie alimentaire. Cette lacune pourrait être en partie comblée : les résultats d’une étude pilote viennent en effet d’être publiés par une équipe anglaise.

Une tendance rapportée dans une étude pilote

Au total, 32 mères dont les enfants avaient une allergie alimentaire et 40 mères d’enfants sans allergie ont été recrutées dans des consultations de pédiatrie et ont accepté de répondre à un questionnaire. Les enfants étaient tous âgés de moins de 6 ans. Le questionnaire consistait en trois volets, l’un explorant les événements stressants ayant pu se produire, l’autre le niveau de stress en général et, enfin, le troisième étudiait les craintes spécifiques à la grossesse.

D’entrée, les auteurs notent une différence significative entre les deux cohortes d’enfants, qui va dans le sens du lien connu entre césarienne, microbiote et allergie alimentaire. L’incidence des césariennes en urgence était de 25 % chez les mères des enfants ayant une allergie alimentaire versus 7,5 % dans l’autre groupe. Sans trop de surprise non plus, il est apparu que les enfants ayant une allergie alimentaire avaient aussi plus souvent de l’eczéma et des antécédents familiaux d’allergie.

Les mères des enfants allergiques ont rapporté un plus grand nombre d’événements stressants pendant leur grossesse (1,94 versus 1,58), mais ce chiffre n’était pas statistiquement significatif. Il s’agit notamment d’événements concernant leur santé :elles étaient près de deux fois plus nombreuses à avoir connu au moins une semaine de maladie pendant leur grossesse (32 % versus 18 %), plus nombreuses aussi à avoir été gardées en observation pendant au moins 24 heures (13 % versus 8 %) et elles ont plus souvent connu le stress d’un déménagement (32 % versus 23 %). En analyse multivariée, tenant compte des facteurs confondants possibles (antécédents d’eczéma, césarienne, antibiothérapies post-natales), le lien entre les facteurs de stress prénatal et l’allergie alimentaire persistait (OR =2,59, IC95 % : 0,72 à 9,34), bien que statistiquement non significatif.

Il n’est pas apparu non plus de différence significative dans le score moyen d’anxiété généralisée ni concernant l’anxiété relative à la grossesse, ce que les auteurs jugent non surprenant, les questionnaires ayant été utilisés rétrospectivement et leur validité déclinant après 8 semaines.

Le lien entre les événements stressants au cours de la grossesse (notamment sur des questions de santé) et le risque d’allergie alimentaire semble mériter que l’on s’y intéresse de plus près. Il n’atteignait pas ici de significativité statistique, mais il faut rappeler qu’il s’agissait d’une étude pilote, non prévue au départ pour atteindre la puissance statistique nécessaire. Gageons que d’autres travaux viendront bientôt explorer ce domaine.

Dr Roseline Péluchon
RÉFÉRENCE
Alviani C et coll. : Antenatal stress and illness in mothers of children with food allergy. Pediatr Allergy Immunol., 2019, 30(6):665-668. doi: 10.1111/pai.13068.

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