mercredi 13 mars 2019

Le Conseil constitutionnel se penche sur les tests osseux

Elsa Bellanger
| 12.03.2019




  • conseil constitutionnel
Crédit Photo : S. Toubon

Les tests osseux pratiqués sur les jeunes migrants pour évaluer leur âge étaient en question aujourd’hui au Conseil constitutionnel. Ce dernier rendra son avis le 21 mars sur la pertinence de ces tests. Le Conseil a été saisi pour une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) déposée par un jeune Guinéen qui déclarait avoir 15 ans lors de son arrivée en France. Il avait été considéré comme majeur après un refus de l’examen osseux. Contestant cette décision, il avait finalement réalisé le test qui lui avait donné entre 20 et 30 ans.

Un examen encadré, mais contesté
Sa contestation des tests osseux est soutenue par plusieurs associations qui viennent en aide aux migrants, dont Médecins du Monde. Elles dénoncent l’« absence de pertinence scientifique et éthique » et le « caractère attentatoire aux droits de l’enfant » de ces tests. « Ce ne sont pas tant les tests qui sont scandaleux que l’usage et l’interprétation qui en sont faits, notamment par les magistrats », commente le Pr Patrick Chariot, PU-PH, chef du service de médecine légale de l’hôpital Jean-Verdier (AP-HP) à Bondy.
Réalisé dans un institut médico-judiciaire à la demande de l’institution judiciaire après un « recueil de l’accord de l’intéressé », le test osseux consiste en une radio de la main gauche et du poignet qui est ensuite comparée à l’atlas dit de « Greulich et Pyle ». Cet atlas, lui-même contesté, compile des radios prises entre 1931 et 1942 sur des enfants américains de milieux aisés. L’article 388 du Code civil qui encadre ces tests précise que « les conclusions de ces examens, qui doivent préciser la marge d'erreur, ne peuvent à elles seules permettre de déterminer si l'intéressé est mineur. Le doute profite à l'intéressé ».
Des conclusions médicales insatisfaisantes
« Les conclusions rendues par les médecins ne peuvent pas être satisfaisantes : ils n’ont pas les moyens de conclure à la majorité des personnes, souligne le Pr Chariot. La même problématique se retrouve avec les victimes de viol : nous pouvons seulement dire que les données sont compatibles avec les violences rapportées. Dans le cas des tests osseux, nous nous prononçons sur la compatibilité avec l’âge allégué ». En 2007 déjà, l’Académie de médecine estimait que cette méthode « permet d'apprécier avec une bonne approximation l'âge (...) en dessous de 16 ans » mais « ne permet pas de distinction nette entre 16 et 18 ans ».
Reste que les alternatives aux tests osseux ne sont pas dans l’air du temps. « Une évaluation pluridisciplinaire permet de déterminer la maturité psychologique, affective, etc. Mais ce processus, long et coûteux, a peu de chances d’être développé sérieusement dans un contexte de contraintes budgétaires », rappelle le Pr Chariot.

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