jeudi 20 juillet 2017

Se faire mal parce qu’on a mal : l’automutilation non suicidaire

17/07/2017
L'automutilation non suicidaire consiste en l’autodestruction délibérée d’un tissu de l'organisme, sans intention suicidaire et ne s’expliquant pas par des motifs sociaux (1). A cet égard, une étude a été menée pour déterminer les raisons et le contexte de l’automutilation non suicidaire. Elle a consisté à analyser de façon qualitative les dossiers de jeunes, âgés de 4 à 19 ans, s’étant présentés pour automutilation, un risque ou une tentative de suicide, aux urgences d’un État américain, de janvier 2011 à septembre 2012. Des 1 900 dossiers admissibles, 655 répondaient aux critères requis. Ces données ont été révisées par deux chercheurs indépendants pour s’assurer qu’il y avait bien automutilation sans intention de mourir : le nombre final de dossiers analysés a été de 135. Les données ont été tirées des notes des infirmières et des consultants en psychiatrie (travailleurs sociaux, médecins, etc.). Elles concernaient des informations démographiques, le déroulement de l’hospitalisation, les caractéristiques de l’automutilation et l’histoire socio-sanitaire, etc.

Une tentative de coping ?

Les patients étaient âgés de 14 ans en moyenne ; il s’agissait surtout de filles (71,1 %), majoritairement (63,8 %) pris en charge par Medicaid ou non assurés, et d’origine souvent hispanique (33,6 %).
Selon les auteurs, l’automutilation non suicidaire correspondrait à un mécanisme de coping émotionnel et fonctionnel. Cinq thèmes caractérisent le contexte dans lequel les jeunes s’automutilent : 1) des émotions personnelles reliées à des stresseurs importants, à une forte autocritique ou à une profonde tristesse ; 2) des traumatismes associés à des sévices, des abandons ou le divorce des parents, 3) la pauvre qualité des relations familiales ou avec leurs pairs qui comprennent souvent des conflits et de l’intimidation, 4) le sentiment de perte, perte d’êtres chers, maladie et aussi perte de sa propre valeur et 5) des comportements à risque, comme la consommation de drogues, les fugues et le sexe non protégé.
Les auteurs reconnaissent néanmoins que les principales limites de leur étude sont liées au fait qu’il s’agit d’un travail rétrospectif, que plusieurs dossiers avaient des données manquantes et que la population présentait des caractéristiques ethniques particulières.

Mieux évaluer pour mieux prévenir

Les recommandations suggérées portent sur une pratique clinique orientée vers la prévention et surtout le dépistage des événements qui pourraient mener à un coping dysfonctionnel comme l’automutilation. Pour ce faire, cette équipe conseille aux professionnels de santé de poser, à chaque rencontre avec un adolescent, par exemple à l’occasion d’une vaccination, la question suivante : « Depuis ta dernière visite ici, y a-t-il quelque chose de vraiment dérangeant ou d’effrayant qui t’est arrivé à toi ou à ta famille ? ». Cette question est en effet susceptible d’ouvrir la porte à l’expression de situations traumatiques pour lesquelles des services sociaux pourraient alors fournir les ressources avant que celles-ci ne se compliquent.
Cécile Michaud, inf., PhD
RÉFÉRENCES
Young C C et coll. : Closing in on crisis: Informing clinical practice regarding nonsuicidal self-injury in youth. J Pediatr Health Care 2017; 31 : 334–341. 
(1) International Society for the Study of Self-Injury http://itriples.org/fast-facts/

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