lundi 30 janvier 2017

A l’origine, un grand rebond plutôt qu’un grand boum ?

A la théorie du big bang, certains opposent celle du grand rebond, moment où l’Univers serait entré en expansion après une phase de contraction. Des super satellites pourraient valider cette hypothèse à l’horizon 2025. « Le Monde » y consacre un volume dans sa série de livres « Voyage dans le cosmos » pour percer les secrets de l’Univers.

LE MONDE SCIENCE ET TECHNO | 30.01.2017

Remontez le plus loin possible à l’origine du cosmos. Avant la création de la matière, avant même la phase d’inflation catastrophique que notre Univers a probablement subi quand il n’était âgé que d’un milliardième de milliardième de milliardième de milliardième de seconde. Vous tomberez sur ce que les physiciens appellent une singularité, c’est-à-dire un point de taille infinitésimale contenant toute l’énergie de l’Univers en devenir. Cette étrange singularité, c’est la première « chose » qui a existé dans notre Univers. Mais qu’y avait-il avant ? Dans le cadre de la théorie de la relativité ­générale d’Einstein, la question est sans objet : le temps et l’espace ont été créés au moment du Big Bang. Il n’y avait donc pas d’« avant ».


Mais oublions un instant la relativité générale et utilisons seulement la physique quantique. Cet ensemble de théories qui décrit à merveille le monde de l’infiniment petit devrait pouvoir appréhender cette chose infinitésimale, montrer comment elle surgit, et donc ce qu’il y avait avant. Or elle échoue : devant elle, les équations n’ont plus aucun sens. « En physique quantique, la singularité est ce que l’on appelle une pathologie mathématique, explique Aurélien Barrau, astrophysicien au laboratoire de physique subatomique et de cosmologie de l’université de Grenoble. Ce qui nous fait dire non pas qu’il n’y a rien à chercher avant le Big Bang, mais qu’il y a peut-être quelque chose qui ne marche pas dans nos calculs. »

Modèles alternatifs

Les physiciens ont donc cherché des modèles alternatifs. En élaborant des théories ­dites de gravité quantique, qui permettent de décrire la force de gravité dans le monde des quantas – chose impossible avec la relativité –, ils se sont aperçus que la singularité pouvait disparaître. Et avec elle le Big Bang. « Selon la théorie des cordes par exemple, l’Univers a toujours existé, mais dans un état latent, inactif. C’est une transition de phase qui l’a fait gonfler. Dans une autre théorie, la gravité quantique à boucles, le Big Bang est remplacé par un Big Bounce, un grand ­rebond, dit Aurélien Barrau. Ce qui signifie qu’après une phase de contraction, l’Univers a rebondi pour entrer en expansion. Ce que nous prenons pour l’origine de l’Univers serait donc le moment d’inflexion entre la phase de contraction et la phase d’expansion, une sorte de goulet d’étranglement. »

Même s’il ne fait pas l’unanimité, le Grand Rebond marche plutôt bien… sur le papier. Reste à le valider par l’observation. Mais ­laquelle ? « Il se pourrait que le rebond ait laissé une empreinte sur le fond diffus cosmologique, c’est-à-dire la première lumière émise par l’Univers et dont nous voyons la trace sous la forme d’un rayonnement micro-ondes, ­explique Aurélien Barrau. Cette signature particulière pourrait être détectable sous la forme d’une certaine polarisation de la lumière. »


Trop subtile pour être captée par le satellite Planck qui scrute actuellement le fond diffus cosmologique, elle pourrait être à la portée d’un « super Planck », beaucoup plus sensible que son prédécesseur. Cela pourrait être le cas de CORE (Cosmic Origins ­Explorer), une mission qu’étudie l’Agence spatiale européenne et dont la sensibilité ­atteindrait 30 fois celle de Planck. Autre candidat : Pixie (Primordial Inflation Explorer), une mission du même type sur laquelle planche actuellement la NASA. Dans les rangs également, le japonais LiteBird, déjà présélectionné par l’agence spatiale nippone. Lancement de ces explorateurs des origines : pas avant 2025.

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