mardi 9 février 2016

Un pas vers la prédiction génétique de la réponse au lithium

01/02/2016

Le lithium est le traitement régulateur de l’humeur de première intention dans le trouble bipolaire. Cependant son efficacité est variable d’un patient à l’autre. Prédire la réponse thérapeutique permettrait entre autre d’éviter aux « mauvais répondeurs » (environ 30 %) la prescription d’un traitement aux effets indésirables inacceptables sans la contrepartie d’une amélioration clinique. Les études d’agrégation familiale et de jumeaux suggèrent une origine familiale à la réponse au lithium. A ce jour, aucun résultat n’a permis de préciser l’origine de ce lien génétique. Le Lancet publie en janvier l’étude d’association pangénomique (GWAS pour Genome Wide Association Study) de loin la plus large ayant été menée pour la recherche de liens entre des polymorphismes (SNP pour Single Nucleotide Polymorphisms) et la réponse au lithium.

Quatre SNPs associés à la réponse au lithium

Liping Hou, et plus d’une centaine d’auteurs présentent les résultats issus de l’analyse des génotypes et phénotypes de 2 563 patients atteints de troubles bipolaires et traités par lithium durant au moins 6 mois entre 2008 et 2013, dans 22 centres du International Consortium for Lithium Genetics (ConLiGen). Deux études GWAS ont étés menées : GWAS 1 (1 162 patients) et GWAS 2 (1 401 patients). La réponse au lithium était évaluée de façon rétrospective par l’échelle d’Alda (0 à 10). L’analyse des deux GWAS prises séparément ne permettait pas de dégager des données statistiquement significatives. Dans une méta-analyse des deux GWAS, les auteurs ont pu mettre en évidence 4 SNPs significativement associés à une mauvaise réponse au lithium (p < 5x10-8) situés dans une même région du chromosome 21. Il n’y avait pas d’association entre ces polymorphismes et le risque familial de trouble bipolaire.
Dans une analyse prospective portant sur 73 patients atteints de troubles bipolaires à San Diego suivis durant 2 ans, les porteurs des allèles associés à une mauvaise réponse au lithium avaient un taux de rechute supérieur aux autres patients (Hazard Ratio HR 3,8 ; intervalle de confiance à 95 % IC95 : 1,1-13,0).

Vers un traitement « à la carte »

Cette étude de grande envergure permet d’apporter des arguments supplémentaires à l’existence d’une origine génétique de la réponse au lithium. Elle pourrait également contribuer à améliorer la compréhension de son mécanisme d’action, largement inconnu. Les 4 SNPs retrouvés sont situés dans des régions codant pour 2 ARN non codant pour des protéines. Ce type d’ARN semble être impliqué dans un nombre important de fonctions biologiques.
L’utilisation clinique de ces données est encore lointaine, étant donné la rareté des polymorphismes considérés. Cependant, il s’agit d’une première étape, qui doit passer par des études fonctionnelles et des GWAS de plus grandes envergures, qui pourrait mener à terme à un score utilisant des paramètres cliniques et génétiques pour prédire la réponse thérapeutique.
Dr Alexandre Haroche
RÉFÉRENCES
Hou Let coll. : Genetic variants associated with response to lithium treatment in bipolar disorder: a genome-wide association study. Lancet, 2016 ; publication avancée en ligne le 21 janvier. doi.org/10.1016/S0140-6736(16)00143-4

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