vendredi 29 janvier 2016

Les sénateurs repoussent à 2020 l'intégration des contractuels dans la fonction publique

 - HOSPIMEDIA
Examiné au Sénat, le projet de loi relatif à la déontologie des fonctionnaires a été quelque peu remanié ces jours-ci : la résorption de l'emploi précaire est prorogée de quatre ans et le recrutement sur titres d'agents territoriaux médico-sociaux poussé de l'avant. Sans compter une énième tentative d'introduire les trois jours de carence...
Un peu plus de trois mois après les députés, les sénateurs ont adopté dans la nuit du 27 au 28 janvier le projet de loi relatif à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires (lire ci-contre). Ils ont prorogé jusqu'au 12 mars 2020 le plan de titularisation des contractuels mis en place par la loi du 12 mars 2012 (nouvel article 15 bis A, qui supprime le 18 quinquies). Soit deux ans de plus que la rallonge déjà accordée cet automne par l'Assemblée nationale, en sachant qu'actuellement le dispositif est censé s'achever le 12 mars prochain. Mauvaise élève de la classe en matière de résorption de l'emploi précaire, la fonction publique hospitalière (FPH) a été rappelée à l'ordre en mars 2015. Initialement, la DGOS tablait en effet sur 45 000 agents éligibles au dispositif, 50 000 à 60 000 pour les syndicats. Mais ceux-ci n'ont dénombré au 31 mai que 3 606 mises en stage et 1 413 titularisations. À mille lieues donc des prévisions ministérielles. Et comme l'ont noté les syndicats l'été dernier, à un moment où la prolongation du dispositif n'était encore qu'une hypothèse, les rappels des pouvoirs publics ont beau être de plus en plus comminatoires, aucun résultat probant n'en ressort. De quoi douter qu'une rallonge ne vienne changer la donne. Plaidant pour ne pas aller au-delà du 12 mars 2018, le sénateur socialiste René Vandierendonck (Nord) estime également qu'"élargir de manière plus significative l'accès à l'emploi public en doublant la durée de la prolongation pour la porter à 2020 aurait pour conséquence une libéralisation des possibilités de recours aux contractuels, remettant ainsi en cause le principe essentiel de l'égal accès aux emplois publics, garanti par l'organisation de concours". Son amendement (n° 139) a été rejeté.

Les trois jours de carence refont encore surface

En outre, comme ils s'y étaient déjà essayés les années passées via des projets de loi de finances et loi de financement de la sécurité sociale, les sénateurs ont une nouvelle fois décidé d'instaurer trois jours de carence dans la fonction publique en cas de congé maladie. L'article 24 AA ici créé (amendement n° 20 rectifié ter) soutient ainsi, dans son exposé des motifs, que "le jour de carence est une mesure qui a fait la preuve de son efficacité", qu'il "a permis de réduire l'absentéisme", qu'il a rapporté, sur une année, 63,5 millions d'euros hors charge pour la FPH, qu'il répond à "un impératif d'équité" entre fonctionnaires et salariés, etc. Toutefois, examiné en procédure accélérée, le projet de loi va désormais faire l'objet d'une commission mixte paritaire chargée de trouver un compromis entre les deux chambres. Et dans ce cadre, nul doute que la gauche majoritaire à l'Assemblée nationale supprimera cet article additionnel.

Épauler les filières médico-sociales "sous tension"

Autre modification, l'article 25 BA (amendement n° 25 rectifié) développe le recrutement sur titres d'agents de la fonction publique territoriale (FPT) dans trois filières "sous tension" : sociale, médico-sociale et médico-technique (infirmières, auxiliaires de puériculture...). "De nombreuses collectivités présentent des difficultés de recrutement sur ces filières, est-il argumenté dans l'exposé des motifs. Bien que possédant un diplôme d'État, les professionnels correspondants n'obtiennent pas toujours les concours de la fonction publique, ce qui est une source de complexité pour les employeurs publics." Au passage, le Sénat a supprimé l'article 18 bis, par lequel les députés entendaient mettre fin à l'intérim dans la fonction publique d'État (FPE) et la FPT, le calquant ainsi sur la FPH. Sans le rétablir pour la FPE, le Gouvernement a tenté, par amendement, de l'autoriser dans la FPT mais en l'encadrant de conditions cumulatives : une situation d'urgence, un motif tiré de la continuité du service public et l'absence de service de remplacement assuré par le centre de gestion dont relève la collectivité ou l'établissement. Mais il n'a pas reçu l'aval des sénateurs. Par ailleurs, le cumul d'activités (article 6) a été élargi. Il n'est donc plus interdit à un agent public de créer ou reprendre une entreprise s'il occupe un emploi à temps complet et qu'il exerce ses fonctions à temps plein. De même, s'il ne peut pas cumuler un emploi permanent à temps complet avec un ou plusieurs autres emplois permanents à temps complet, l'élargissement de cette interdiction aux autres emplois permanents à temps incomplet est supprimé. Enfin, les sénateurs ont décidé d'intégrer la commission de déontologie de la fonction publique au sein de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (article 8 bis).

Aucune machine arrière sur les trois jours d'exclusion

Le Sénat a décidé de ne pas toucher au régime de sanctions scellé par les députés (article 13), comme le réclamaient pourtant les syndicats de fonctionnaires et l'exécutif par amendement (n° 106). L'exclusion temporaire de fonction pour une durée maximale de trois jours dans le premier groupe de sanctions est donc maintenu pour la Territoriale. Et s'agissant des deux autres versants, elle leur est étendue. Une durée de quatre à quinze jours est inscrite dans le deuxième groupe. Pour la FPE et la FPH, la sanction de trois jours n'est pas en vigueur actuellement, seule existe l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée maximale de quinze jours et qui relève du deuxième groupe. Pour les syndicats, le dispositif remanié ne peut que réduire "de manière significative" le droit à la défense des personnels concernés, sachant que cette exclusion temporaire de trois jours représente "une sanction importante". Elle devrait donc relever a minima du deuxième groupe, entraînant la sollicitation du conseil de discipline.
Thomas Quéguiner 
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