lundi 8 juin 2015

Les malades, ces autres spécialistes

LE MONDE SCIENCE ET TECHNO |  | Par 

Cancers, diabète, troubles mentaux… Pour s’informer sur une maladie chronique, les lecteurs ont désormais le choix entre des ouvrages rédigés par des médecins spécialistes et des témoignages de patients, qui sont, d’une certaine façon, eux aussi des spécialistes de leur pathologie. Bourrés d’optimisme ou dramatiques, les récits de vie et de soins narrés à la première personne deviennent un genre à part entière de la littérature médicale.

Dans cette veine, Eric Balez va plus loin encore, ajoutant au récit de son lourd CV médical (une maladie inflammatoire chronique de l’intestin puis trois cancers) son expérience de « patient expert », passionnément investi dans l’éducation thérapeutique des patients affectés comme lui par des maladies inflammatoires chroniques de l’intestin (MICI).


Souffrant depuis l’adolescence de terribles crises de douleurs intestinales, l’auteur joue longtemps « au chat et à la souris »« feintant et [s]e cachant continuellement » de ses proches. Un diagnostic de maladie de Crohn est finalement posé par un gastro-entérologue, mais Eric Balez continue de ne pas en parler, ne s’autorisant aucun faux pas tant il craint « d’être surpris en flagrant délit de maladie ».


Apprivoiser la maladie


Ce n’est qu’après un cancer récidivant du côlon qu’il commence à apprivoiser celle-ci. Progressivement, il s’implique dans une association de patients stomisés, puis dans l’Association François-Aupetit, consacrée aux patients souffrant de MICI – maladie de Crohn et rectocolite hémorragique.

Son premier pas « vers l’écoute des malades » prend banalement la forme d’un témoignage pour un quotidien régional, mais c’est le déclic d’une nouvelle vie. « En me dévoilant aux autres dans le détail de tous les maux et sous la lumière d’un photographe, je découvris la force et le pouvoir du témoignage », écrit Eric Balez. Vient ensuite l’organisation de « MICI kawa », réunions informelles en petit comité autour d’un café, puis une formation à l’éducation thérapeutique. A partir de l’automne 2008, il anime des séances d’éducation thérapeutique au CHU de Nice, en binôme avec un psychologue. « Encadré par un représentant du personnel soignant et un patient devenu expert, le malade pouvait, face au premier, s’informer des aspects plus techniques de sa maladie, et dévoiler au second ce qu’il n’aurait jamais osé dire », souligne Eric Balez. L’aventure le mènera même, en juillet 2010, au sommet du mont Blanc, avec une cordée de six malades, deux médecins et un chercheur. Présenté à plusieurs festivals, le film tourné lors de l’ascension, Un mont Blanc pour y croire, est toujours visible sur Internet.
Pour Eric Balez, l’éducation thérapeutique est un chantier ouvert « dont le patient expert constitue la cheville ouvrière, incontournable et essentielle ». A le lire, comment ne pas en être convaincu ?

Patient expert. Mon témoignage face à la maladie chronique,d’Eric Balez, avec Hélène Bloch (Odile Jacob, 128 p.

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