lundi 20 avril 2015

Léthargie coupable

EDITORIAL
A l’Ouest, les premières brasses de l’Hermione célébraient la liberté dont la France et les Etats-Unis sont «mutuellement redevables», «les champs de bataille de la guerre d’Indépendance» et les «plages du Débarquement». Les mots sont de Barack Obama. Ils datent de vendredi. Au même moment, un autre navire, au Sud. Celui-ci pouvait sans doute à peine flotter quand il a embarqué 700 personnes prêtes à tout et jetées là par des passeurs sans scrupule. Quand les secours arrivent, il n’y a plus que 28 survivants. La «pire hécatombe jamais vue en Méditerranée». Les mots sont de Carlotta Sami, porte-parole du HCR en Italie. Ils datent de dimanche matin. Pourquoi rapprocher ces deux événements qui ont fait la une des JT samedi et dimanche ? En célébrant l’Hermione, Hollande et Obama rappellent qu’une idée de la liberté a permis à l’Europe de trouver stabilité et paix. L’autre bateau, sans nom, comme les 1 650 personnes - au moins - qui seraient mortes noyées en Méditerranée depuis le début de l’année, risque bien, lui, d’enterrer ces rêves. Il faut une Europe protectrice, pas une Europe forteresse, paralysée par une politique économique d’austérité et la montée des populismes, passive devant des milliers de vies brisées. En montrant la voie d’un règlement international de ce problème majeur, l’Europe peut se grandir politiquement. Mais pour mettre face à leurs responsabilités ceux qui ont initié les guerres du Moyen-Orient, les Etats-Unis au premier chef, les gouvernements européens doivent sortir de leur léthargie coupable. Sinon «nous risquons de perdre notre humanité». Ces mots sont de Sergio Mattarella, chef de l’Etat italien. Ils datent de samedi matin. Depuis dimanche, les mots ne suffisent plus.

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