lundi 16 juin 2014

La très surveillée cérébrothèque de la Pitié-Salpêtrière

LE MONDE SCIENCE ET TECHNO | Par 
L'hôpital de la Pitié-Salpêtrière, à Paris.

Hôpital de la Pitié-Salpêtrière (Paris), plate-forme de ressources biologiques. Dans une vaste salle s’alignent quatorze grands congélateurs. Des centaines d’échantillons biologiques destinés à la recherche y sont stockés, conservés à très basse température (– 80 °C) et surveillés comme le lait sur le feu. « Une alarme se déclenche si la température dépasse – 65 °C, il y a aussi un climatiseur pour refroidir la pièce. Par sécurité, les deux systèmes sont doublés », explique Sabrina Leclère, gestionnaire technique et scientifique du GIE Neuro-CEB, la biobanque de cerveaux. Elle ouvre l’un des six congélateurs consacrés à cette activité, laissant apparaître un empilement de boîtes en plastique transparent, d’apparence banale. Chacune correspond à un patient, identifiable par un numéro d'anonymat, et contient des dizaines de fragments de cerveau congelé, enfermés dans de petits sacs plastiques.
On repère facilement des tranches de cortex, d’autres morceaux restent plus mystérieux. « Nous prélevons des échantillons des différentes parties du cerveau (cortex, noyaux gris centraux, hippocampe...), mais aussi du cervelet, du tronc cérébral et de la moelle épinière. Ils sont conservés sous forme de coupes épaisses ou de prélèvements dans des cassettes », poursuit Sabrina Leclère.
Financée en partie par quatre associations (France Alzheimer, France Parkinson, Fondation pour l’aide à la recherche sur la sclérose en plaques, Connaître les syndromes cérébelleux), la cérébrothèque a pour principal objectif d’étudier ces maladies neurologiques et leurs affections apparentées.
 
VOLONTARIAT
En pratique, les malades volontaires signent un consentement pour un prélèvement post mortem. La biobanque collecte aussi des cerveaux d’individus « témoins », non atteints par ces pathologies cérébrales. Le prélèvement doit être effectué dans les quarante-huit heures suivant le décès, dans l’un des 14 centres français agréés, précise Marie-Claire Artaud, coordinatrice de cette biobanque. La moitié du cerveau est envoyée à la Pitié-Salpêtrière pour être mise en banque. Le reste est analysé sur place par un neuropathologiste, qui adresse ses conclusions à la cérébrothèque et au médecin traitant.

Depuis sa création, en 2006, la banque de cerveaux a enregistré 2 100 consentements, dont 430 ont déjà abouti à des prélèvements. Plus de 2 625 échantillons ont été cédés à des chercheurs, dans le cadre de 50 projets. « Quelle que soit la piste explorée, la recherche bute aujourd’hui sur un obstacle majeur : la pénurie de cerveaux à étudier, induite par la disparition programmée de l’autopsie scientifique en France », déplorait l'Académie de médecine en janvier, lors d'une réunion sur le thème du vieillissement et des maladies neurodégénératives. Ses membres recommandent que « l’autorisation du don d’organe post mortem en vue d'une greffe soit élargie au don de cerveau pour aider la recherche ».


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