mardi 20 mai 2014

Le projet européen Duque identifie 7 manières d'améliorer la qualité et la sécurité des soins

La plus value des stratégies d'amélioration de la qualité et de la sécurité des soins mises en place dans les établissements de santé a été scrutée dans le cadre du projet européen Duque. En substance, ce projet a abouti à un guide opérationnel fournissant 7 façons d'améliorer la qualité et la sécurité des soins dans les établissements de santé.
Sept pays européens parmi lesquels la France viennent de clore un projet de recherche baptisé Duque (pour Deepening our understanding of quality improvement in Europe, soit en français, mieux comprendre la qualité des soins en Europe). Son objectif : explorer les impacts des stratégies d'amélioration de la qualité et de la sécurité des soins mis en place dans les établissements de santé en Europe depuis une dizaine d'années. Pour cela, un protocole approfondi a été établi pour prendre en considération toutes les composantes des systèmes. 

Deux types de résultats découlent de cette recherche : scientifique d'une part et opérationnel d'autre part, indique Anne Depaigne-Loth, coordinatrice du projet Duque pour la Haute Autorité de santé (HAS), co-pilote de l'étude en France avec la Fédération des organismes régionaux et territoriaux pour l'amélioration des pratiques et des organisations (Forap). Les résultats scientifiques ont été publiés dans un supplémentde l'International Journal for quality in health care. Ils mettent en exergue un "écart important dans certains domaines entre les bonnes pratiques cliniques et organisationnelles recommandées et la réalité". Certaines pratiques de sécurité ne sont en effet pas mises en place en France ou dans les autres pays. Anne Depaigne-Loth cite par exemple le stockage au sein-même des services des solutions concentrées de chlorure de potassium alors qu'elles ne devraient pas l'être, ou encore l'absence d'affichage sur les gestes d'urgences. Il existe aussi un constat "de nature plus clinique" sur la prise en charge de certains patients puisque des marges de progrès émergent sur certains parcours (par exemple la fracture de la hanche) par rapport à d'autres (AVC notamment). En outre, l'étude Duque fait apparaître une association positive entre le développement de la qualité au niveau des secteurs d'activité et les résultats cliniques. Et si elle n'établit pas de lien direct entre la certification, le système de management de la qualité et les résultats de soins, elle constate que les incitations externes et la gouvernance de la qualité favorisent le développement de démarches et d'organisations adaptées au niveau des secteurs d'activité. 

Un e-book de synthèse

D'un point de vue opérationnel, pour tirer les leçons pratiques de cette étude, les promoteurs européens ont synthétisé les résultats dans un guide e-book (pour le moment en anglais, il sera traduit en Français pour la rentrée prochaine) intitulé "7 manières d'améliorer la qualité et la sécurité des soins dans les établissements de santé", précise Thomas Le Ludec, directeur de l'amélioration et de la qualité des soins à la HAS. Un guide fondé sur les preuves, à destination de tous les publics et à forte valeur pour se repérer dans sa démarche qualité, insiste-t-il. Mais il y a aussi des résultats focalisés sur des sujets précis, permettant d'identifier ce qui fonctionne plus ou moins bien dans ces stratégies. Par exemple, illustre-t-il : une check-list pour voir le degré d'appropriation des outils qualité dans les secteurs d'activité. Mais cette étude ne constitue pas un outil comparatif entre les pays participants, tempère-t-il, étant donné la variabilité des modes de collecte. 

Répercussion sur la certification

Les principaux résultats de Duque confirment les récentes orientations institutionnelles que sont : le développement de démarche d'amélioration au plus près des équipes de soins, la promotion d'une organisation en parcours, y compris de parcours intra-hospitaliers, une meilleure intégration de l'expérience patients aux démarches d'amélioration. Selon Thomas Le Ludec, les résultats de l'étude seront donc "intégrés dans les discussions sur les stratégies de visite en certification". Il ajoute que "tous les enseignements sur l'animation des équipes et le leadership dans des structures d'activités vont être pris en compte dans la démarche programme d'amélioration du travail en équipe" (Pacte). À plus long terme, déclare-t-il aussi, "c'est une étude de fond qui sera source d'inspiration lors de la mise en chantier du prochain manuel de certification. Il y aura aussi une réflexion sur la place des objectifs de sécurité du patient sur des pratiques à haut niveau de preuve, bon traceur du niveau d'appropriation des outils".

Cette étude montre que les systèmes qualité et sécurité des soins des établissements de santé en sont "à un premier stade de maturité", conclut Thomas Le Ludec. Selon lui, "Les établissements qui réussissent le mieux à avoir un bon système immunitaire contre le risque hospitalier sont ceux qui ont : une gouvernance qui évalue systématiquement les résultats des actions qualité, et des équipes disposant des outils qui permettent de renforcer leurs défenses en profondeur face aux risques". Ainsi, pour monter en gamme, il convient d'agir sur le management de la gouvernance et sur le management des systèmes "microcliniques" en contact direct avec le patient.

Pia Hémery 

Un recueil de données multiples riche en sources
En France, 25 établissements de santé ont participé (échantillon aléatoire par tirage au sort) en répondant à un recueil simple par questionnaire et 11 d'entre eux ont réalisé un recueil approfondi allant jusqu'aux indicateurs cliniques. La richesse de ce projet réside dans la multiplicité des sources (professionnels de santé, patient, indicateurs cliniques, audit organisationnel) permettant un recueil des données à tous les niveaux (incitations externes, gouvernance de l'établissement, système d'amélioration au niveau transversal de l'établissement) et, de manière approfondie, pour quatre prises en charges ciblées : infarctus, AVC, accouchement et "fracture de la hanche". Et ce, sur l'organisation du parcours intra-hospitalier, la culture de sécurité, le positionnement et l'engagement des professionnels, la place des usagers... Ces établissements ont alors fourni 1 344 questionnaires professionnels, 1 059 questionnaires patients, 1 446 dossiers patients et 11 audits organisationnels.
P.H.

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