mardi 5 novembre 2013

Combattre la stigmatisation des malades mentaux…au sein du « monde médical »

31/10/2013

Réduire la stigmatisation associée à la maladie mentale est un impératif, vu la persistance du rejet latent des patients dans la société. Bien qu’il existe encore peu de recherches à ce sujet, il semble que la perception de la nature des affections mentales conditionne en partie la tolérance ou le rejet à l’égard des malades.
Si les recherches suggèrent que la discrimination ne diminue pas dans le grand public avec les progrès dans la compréhension des mécanismes biologiques des maladies mentales, il ne devrait pas en être de même pour les professionnels de santé. Instruire ces derniers sur la composante physiopathologique des maladies mentales pourrait alors constituer une stratégie efficace de lutte contre le rejet des personnes affectées par une pathologie psychiatrique, du moins auprès des professionnels de santé.

Remontant apparemment à Descartes, le problème philosophique de la dualité corps-esprit se réfère à la division entre le corps (physique) et l’esprit (non physique), et on pense que cette question entre implicitement en jeu dans « la façon dont les médecins considèrent la maladie. » En effet, confrontés à des troubles, les praticiens s’interrogent systématiquement sur leur caractère « organique ou fonctionnel. » Même si nous savons que cette dichotomie s’avère illusoire ou approximative, car la plupart des maladies relèvent de causes multiples et complémentaires (biologiques, psychologiques, sociologiques...), cette scission corps-esprit « continue néanmoins à structurer notre pensée. » Elle « imprègne notre langue », rappellent les auteurs, et conditionne les modèles, les conceptions des maladies, et jusqu’aux « prestations de soins, aux attitudes et aux comportements » des professionnels.
 Par exemple, des troubles classés « organiques » passent (inconsciemment) pour plus « légitimes » ou « vrais » que des phénomènes « fonctionnels » (présumés « immatériels » ou « faux ») car, du point de vue du médecin, il existe en cas d’organicité « quelque chose » d’objectif pouvant être observé, étudié et traité. Inversement, des troubles étiquetés « fonctionnels » passent pour des problèmes de l’esprit, sans substrat physiologique, et les patients sont alors « plus susceptibles d’être stigmatisés et discriminés. » La compréhension des difficultés étant ainsi différente chez les médecins et dans le grand public, les auteurs estiment donc que la lutte contre le rejet des malades mentaux ne saurait se résumer à une stratégie unique pour ces deux types de population, et que des recherches complémentaires doivent nécessairement être entreprises sur ce thème.    

Dr Alain Cohen

Ungar T et Knaak S : The hidden medical logic of mental health stigma. Aust N Z J Psychiatry, 2013; 47: 611–612.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire