mercredi 17 juillet 2013

Seuls 2 millions de Français sont totalement couverts par une assurance dépendance


Interpellé par "la faible disposition" de la population à anticiper les risques de dépendance, l’Institut de recherche et documentation en économie de la santé (IRDES) s’est penché sur les raisons qui éloignaient les Français de la couverture dépendance. Le dernier numéro de Questions d’économie et de la santé élabore de nouvelles pistes de réflexions.

En 2010, l’effort public en faveur des personnes âgées dépendantes représentait entre 68 et 77% du coût financier global de leur prise en charge : 24 milliards d'euros pour 1,4% du Produit intérieur brut (PIB). Aujourd’hui, on dénombre près de 1,2 million de bénéficiaires de l’Allocation personnalisée d’autonomie (APA). L’effectif devrait augmenter de 35% d’ici à 2030, et de 100% à l’horizon 2060.
Côté famille, "clé de voûte du système de prise en charge de la dépendance", la DREES et l’INSEE observaient une implication "trois fois plus importante que celle des professionnels" dans son enquête Handicap-Santé. Soit 4,3 millions d’aidants auprès des plus de 60 ans sur l’année 2008.
Dans un tel contexte et "compte tenu des contraintes pesant sur les finances publiques", l’IRDES atteste de "possibles difficultés à mobiliser davantage les solidarités publiques et familiales pour répondre à l’augmentation attendue des besoins de prise en charge". Aussi, et alors que le reste à charge est estimé à 10 milliards d'euros au niveau national, l’institut questionne le rôle du troisième financeur du 5ème risque : le marché de l’assurance dépendance.

Des prestations trop onéreuses

Avec en moyenne 800 euros par mois de reste à charge pour un individu vivant à domicile et 1 468 euros en institution (2  300 euros pour les malades d’Alzheimer), le poids de la dépendance se compte en plusieurs dizaines de milliers d’euros au niveau individuel. Paradoxalement, en 2010, seuls "5,5 millions d’individus détenaient une couverture dépendance par le biais d’une société d’assurance, d’une mutuelle ou d’une institution de prévoyance", d’après la Fédération française des sociétés d’assurance (FFSA). Parmi eux, seulement 2 millions étaient considérés comme "réellement couverts à long terme" (avec indemnité suffisante pour couvrir le reste à charge).
Pourquoi un tel détachement face au risque de dépendance ? Première hypothèse avancée par l’IRDES : le manque d'attractivité de l’offre, appuyé par des indemnités forfaitaires "relativement modestes", des couvertures incomplètes (deux tiers des contrats souscrits auprès des assurances ne couvrent que la dépendance lourde), et des tarifs croissant en fonction de l’âge à souscription du contrat.

Déni de la dépendance et "préférence pour le présent"

Pour autant, "les imperfections imputables à l’offre ne sont pas en mesure d’expliquer à elles seules le faible taux de couverture". En cause pour l’IRDES, la méconnaissance des couvertures disponibles et du risque financier associée à l’entrée en dépendance. Enfin, et c’est sûrement le frein le plus important, l’incapacité à accepter la probabilité de devenir un jour dépendant. "Une certaine forme de déni" pour les auteurs, qui altère la perception du risque et déclenche alors une "préférence pour le présent" incompatible avec toute planification de l’avenir. Seul levier positif, l’altruisme familial, qui favoriserait la souscription à une assurance dépendance dans le but de soulager les membres de la famille d’une future prise en charge.
Fort de ces premiers constats, les conclusions de l’IRDES sont claires : "l’instauration d’une assurance obligatoire, sans présager du caractère public ou privé d’une telle assurance, peut paraître comme le meilleur moyen d’assurer une réelle mutualisation des risques". En résulterait par ailleurs des "externalités positives importantes sur le bien-être des aidants". Reste encore à apporter "des connaissances plus précises" afin "d’enrichir les débats sur l’organisation et le financement de la prise en charge des personnes âgées dépendantes". Un travail qui devrait voir le jour une fois les dossiers Enquête santé et protection sociale (ESPS) et Préférence et patrimoine face au risque dépendance (PATED) achevés. 
Agathe Moret

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