jeudi 21 mars 2013

Faire du handicap un atout managérial

LE MONDE ECONOMIE | 
Yann Orpin dépasse l'obligation légale. Chez Cleaning, la société de nettoyage qu'il gère, il recense 8 % de salariés handicapés (le seuil légal est à 6 %). Et ce taux a déjà dépassé 14 %.
Car pour lui, leur présence dynamise l'entreprise : "J'ai par exemple embauché un ancien maçon pour la comptabilité. Il avait dû arrêter son métier à la suite d'un handicap. Motivé par la difficulté, il a atteint le niveau de compétence qu'on lui avait fixé en six mois au lieu de deux ans. Cette réussite a boosté les collaborateurs."
Il a remarqué un autre effet positif : la baisse de l'absentéisme et duturn-over. "Le travailleur qui souffre d'un rhume relativise ses maux lorsqu'il voit que la personne handicapée vient et qu'elle dégage une énergie positive malgré tout."
"C'EST UN ATOUT "
L'enjeu de diversité peut devenir un axe stratégique. "Le handicap n'est pas qu'une obligation, c'est un atout car il permet d'interroger et d'améliorer l'organisation du travail", assure Séverine Reboullet, directrice du Pôle handicap du groupe Casino.
Des formations à la communication non orale dans le cadre de l'intégration de personnes malentendantes ont amélioré les relations entre tous les salariés : "Ils ont appris à parler plus distinctement, à bien expliquer et à écrire si c'est nécessaire", dit-elle.
Un management plus humain qui intègre les failles de chacun, autrefois rejetées en dehors de l'entreprise. "Tout le monde peut ressentir une gêne au travail du fait d'un divorce ou d'un décès. Lorsque le manager intègre un salarié handicapé, il développe des stratégies sur mesure. Il peut ensuite les appliquer aux autres pour que tous travaillent de manière optimale quelle que soit la situation vécue", assure Claire Hatala, docteure en sociologie des organisations.
UN "CANARI DE LA MINE"
Le salarié handicapé joue aussi un rôle de "canari de la mine". "Les salariés qui souffrent de handicaps psychiques [schizophrénie, bipolarité, angoisse] sont plus sensibles au stress. Ils peuvent agir comme révélateurs d'une mauvaise organisation du travail qui pèse sur les équipes", note-t-elle.
Mais cela peut aussi déstabiliser l'entreprise. Pour Maria Giuseppina Bruna, chargée d'enseignement et rattachée à la chaire management et diversité de l'université Paris-Dauphine, le handicap n'est source de performance que sous conditions : "L'entreprise doit s'impliquer activement dans cette politique et former les collaborateurs pour valoriser la compétence objective de la personne handicapée."
Un impératif difficile alors que la crise renforce les crispations. Même si, dans certaines entreprises où les recrutements ont été gelés, les embauches de handicapés ont été maintenues.

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