jeudi 21 mars 2013

Expulsions des étrangers malades : les associations accusent... l’administration de la Santé

Les associations de défense de l’accès aux soins des étrangers, regroupées au sein de l’observatoire du droit à la santé des étrangers (ODSE), dénoncent l’importance grandissante du déni du droit au séjour pour raison médicale.
Elles s’étaient déjà mobilisées lorsque la loi Besson sur l’immigration du 16 juin 2011 avait modifié le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA). La carte de séjour est désormais délivrée à l’étranger résidant en France dont l’état de santé nécessite une prise en charge médicale (...), sous réserve de l’absence (et non plus de l’accessibilité) d’un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle. L’effectivité de l’accès aux soins, garantie par la loi du 11 mai 1998 sur l’asile sanitaire, n’est plus prise en compte.

Davantage d’expulsions, moins de délivrance de titres de séjour

L’ODSE attendait beaucoup du changement de majorité en mai dernier. Sa colère est à la mesure de sa déception. « Depuis l’arrivée de la gauche, on observe une multiplication des expulsions, qui sont autant de condamnations à mort », déclare Caroline Izambertd’Act Up Paris.
Selon les données produites par le COMEDE (1), avec la CIMADE (1), médecins du monde, et Arcat, sur 16 préfectures, les taux d’accord pour les premières délivrances et les demandes de renouvellements de titres de séjour « étrangers malades » sont en diminution de 11 points en 2012.
En outre, selon les chiffres issus des centres de rétentions, remontés à la CIMADE, entre juillet 2012 et février 2013, 7 étrangers ont été expulsés : 5 souffraient d’hépatites, 1 du VIH/SIDA, le dernier de diabète.« Et ce n’est que la partie émergée de l’iceberg : ces chiffres n’ont jamais été atteints depuis des années. Depuis 1998, on n’en compte même pas 10 ! », précise Adeline Toullier, responsable du Soutien juridique et social à AIDES.
Clémence Richard, de la CIMADE, relate d’autres faits : « des personnes sont amenées vers les avions, alors que le médecin de l’agence régionale de santé (ARS) attend des éléments pour se prononcer. Plusieurs dizaines d’étrangers malades, y compris du VIH, restent dans les centres de rétention, jusqu’à 45 jours, et nouveauté, des vols spéciaux sont affrétés pour renvoyer les étrangers ».

Médecins des ARS et ministère de la Santé

Les associations de l’ODSE s’interrogent sur la volonté du gouvernement, alors que François Hollande avait, lors de la campagne présidentielle, jugé « hypocrite » la loi Besson sur l’immigration et s’était engagé à revenir sur le CESEDA.
Surtout, elles dénoncent un « vrai décrochage de la santé », selon les mots de Bruno Spire, président d’AIDES. Les médecins des ARS sont visés : « Les critères médicaux fondent la régularisation, car c’est sur la base de l’avis médical des médecins des ARS, établi d’après le dossier médical transmis par un médecin soignant, que le préfet statue »,rappelle le Dr Arnaud Veisse, directeur général du COMEDE.
« Or on observe la diminution du taux d’accord. Celui-ci devrait augmenter mécaniquement. D’autre part, une instruction du ministère de la Santé du 10 novembre 2011 rappelle qu’il n’est pas possible d’estimer accessibles les traitements contre le VIH-SIDA dans les pays en voie de développement. Les médecins des ARS n’appliquent pas les critères », poursuit le Dr Veisse.
Selon l’ODSE, le ministère de la Santé se désengage du sujet. « Le ministère de l’Intérieur est le pilote dans l’avion. La politique migratoire prime sur la santé et la santé ne se bat pas. Autocensure, paresse ou volonté délibéré de laisser mourir les étrangers malades ? » s’interroge Bruno Spire.
Plus d’informations dans l’édition papier du « Quotidien » du 21 mars 2013.
› COLINE GARRÉ
(1) COMEDE : Comité médical pour les exilés ; CIMADE : Comité Inter-Mouvements Auprès Des Evacués
 19/03/2013

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