jeudi 23 février 2012


L’Etat reconnaît son erreur sur les médiateurs de santé (ou pairs-aidants) en psychiatrie

23 Février 2012 Par guy Baillon
L’Etat reconnaît son erreur sur les médiateurs de  santé (ou pairs-aidants) en psychiatrie
Félicitons les syndicats infirmiers d'avoir démasqué ce projet pervers
Comme nous l’apprend le communiqué du syndicat d’agents de la fonction publique hospitalière, de ce jour. Espérons qu’ils n’en resteront pas là. Nous ne pouvons que féliciter les syndicats infirmiers de s'être ainsi révoltés contre ce projet pervers et d'avoir obtenu sa suspension. il faut absolument faire disparaître définitivement ce projet de pairs-aidants, cachés sous le terme de ‘médiateurs de santé’.
J'avais dénoncé ce projet dès sa naissance en 2008 dans 2 livres : "Les usagers au secours de la psychiatrie", Erès, 2009 (p 258 et 388) et "Quel accueil pour la folie" Champs social 2011, (p 277 à 288) ensuite dans des articles de Médiapart (conte de la folie)
Nous savions précisément que la FNAPSY avait été entrainée dans la démarche d'évaluation de ce projet contre son gré, et que les promoteurs du projet voulaient en fait se servir d'elle comme caution !!!
Enfin elle est libérée ! Bravo
Le point hard de la perversion des psychiatres promoteurs était de faire croire à quelques usagers que leur expérience "vécue" de la maladie était un "plus" qui les élevait à un niveau de savoir meilleur que celui des soignants, ceci en s'appuyant sur la théorie conçue aux USA de « l'empowerment, » le fameux 'rétablissement' venant prendre la place de la guérison et les plaçant soit disant à un niveau supérieur aux autres malades et aux soignants ; si les canadiens se sont sentis un moment satisfaits d’une telle idéologie pseudo philosophique, c’est parce que leur culture est en fait loin de la nôtre, mais très proche de celle des USA, eux dramatiquement bouleversés par la fermeture du jour au lendemain en 1965 de 500.000 lits de psychiatrie sans compensation en ville, d’où la révolte des usagers soutenus par leurs proches ; laissons nos amis canadiens en paix ; d’ailleurs ils sont devenus très critiques sur ce projet, prêts à l’annuler car eux savent annuler les mauvais projets.
Les promoteurs français ont eu la prétention d’affirmer que ces super-pairs-aidants étant rémunérés (par les hôpitaux ) allaient 'faire le ménage' des 'mauvais services de psychiatrie' et remettre sur les rails les 'soignants de mauvaise qualité'. Incroyable mais vrai ! Pour cela ils seraient recrutés, formés, suivis, rémunérés, félicités !
Devant de telles promesses les usagers se trouvaient ainsi pris dans des filets dont ils ne pouvaient se sortir eux –mêmes.
Ils étaient d’autant plus ‘pris’ dans ces filets que les promoteurs du projet recrutaient eux-mêmes parmi la foule des malades, les heureux élus, les bons pairs, les bons malades ! « qu’est ce qu’être un bon malade » ? fruit d’un recrutement totalement arbitraire, fait du prince.
D'ailleurs les promoteurs étaient assez ‘bien introduits’ eux-mêmes pour convaincre l'HAS et obtenir d’elle une subvention considérable pour mener à bien la formation actuelle !
Pourtant ce projet est très grave, car il touche d’abord les quelques usagers 'enrôlés' qui vont se trouver coincés comme les malheureux "bons malades" de si triste mémoire que nous avons connus dans l'asile ; ensuite il va entrainer un discrédit sur la profession de soignants, ceux-ci ne pouvant plus être évalués que par des ex-malades à qui on donne un pouvoir et une responsabilité du type des RG ou de l’inquisition.
Confusion des rôles stupéfiante !
N’y a-t-il pas là une grave faute sur le plan éthique, qui devrait être poursuivie !
La plus grande diffusion doit être faite à ce combat et à sa réussite, car n’oublions pas que ce projet fait partie intégrante du Plan de Santé Mentale de janvier, qui comme la loi du 5-7-2011 méprise 50 ans de pratique psychiatrie de secteur, méprisait les équipes et d'abord des générations d’infirmiers, et traite comme de futurs délinquants les malades-usagers, sans respect de l'homme.
Il faudra aller plus loin même si les infirmiers ne se sentent pas encore directement concernés : il faut combattre aussi le projet " d'aidants- familiaux" en psychiatrie demandé par quelques dirigeants de l'UNAFAM (autre projet soutenu aussi dans le Plan de santé mentale de janvier), mais pas par la majorité des familles. L'Etat veut ainsi remplacer les soignants par les familles et les rémunérer selon les mêmes idées et avec les mêmes moyens que les médiateurs de santé !!!
Mais attention, le communiqué des ministères précise qu’il ne s’agit là que d’une « suspension » de l’expérience et que la formation des 30 pairs-aidants recrutés se continue ! En fait ces ministères sont très contents de l’approche des élections, espérant que l’expérimentation sera oubliée dans le vacarme de leur défaite électorale ! Leur responsabilité est lourde : comment l’Etat va-t-il en quelques semaines trouver des mesures faisant oublier leurs engagements auprès de ces 30 personnes ainsi dupées, entrainées dans un statut qui n’existera jamais ?
De toute façon si cette erreur commence à être reconnue, cela veut dire que les ministères commencent à s’inquiéter de l’outrance des mesures qu’ils ont prises à l’égard de la psychiatrie, et surtout des malades usagers : les traiter par la loi comme des délinquants auxquels sont promis comme seuls traitements des lavages de cerveau (réduisant le traitement psychiatrique à la chimie sans consentement) et des menaces avec le comportementalisme (l’enfermement comme mesure d’intimidation est bien l’extrême exemple de mesure comportementaliste).
Cela veut dire aussi que l’Etat commence à s’inquiéter de son propre mépris à l’égard des professions soignantes.
Cela fait beaucoup de mécontents à l’approche des élections.
Ceci étant soyons prudents, car la gauche n’a pas tenu toujours ses promesses en psychiatrie : n’oublions pas que le Bureau de la psychiatrie qui était attentif à l’application de la politique de secteur, ainsi que la Commission des Maladies Mentales qui élaborait avec des ‘sages’ de toutes les professions l’évolution de cette politique, ont été fermées sous un gouvernement socialiste en 1990. La politique de secteur a été abandonnée dès cette année-là. Pire, nous avons vu il y a peu des députés de gauche soutenir un laboratoire anti psychiatrique comme Fondamental ne jurant que par les gênes dans le soin et voulant écarter la psychanalyse, et d’autres députés de gauche acceptant de soutenir le projet de loi interdisant la même psychanalyse !
Donc à tous les candidats, futurs élus, demandons l’abrogation de la loi du 5-7-2011 ; l’annulation du Plan de Santé Mentale de janvier qui soutient ces deux projets de pairs-, et mères-aidants (les familles), et la promesse d’un débat national autour de la folie, la non condamnation de celle-ci, le respect et la dignité de l’homme, grâce à un grand projet de psychiatrie reprenant l’application de la politique de secteur et des mesures soutenant le handicap psychique, complémentaires l’un à l’autre. Enfin un projet respectueux de l’homme.
Alors à l’approche des élections nous retrouvons l’espoir !

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