mercredi 20 octobre 2010


Spirou, ou l’orphelin de la bande dessinée ?
Par Nicolas

Spirou est un personnage de bande dessinée apparu en 1938 sous le trait de Rob-Vel. Il est considéré comme un héros incontournable de la BD franco-belge.

La caractéristique première de ce personnage est de ne pas avoir d’auteurs. Il a biensûr un premier dessinateur: Rob-Vel. Cependant ce dernier ne semble pas en être le créateur étant donné qu’il doit, à la demande des éditions Dupuis, créer un personnage pour le “Journal de Spirou”. Le nom du personnage est donc connu avant son visage. “Spirou” qui en wallon veut dire: écureuil, ou bien encore gamin espiègle. Rob-Vel reprend un personnage qu’il a déjà utilisé dans des publicités, et l’installe dans un rôle de groom (travail que Rob-Vel avait effectué dans sa jeunesse).

Ainsi est né Spirou: de la volonté commerciale d’un éditeur, et des projections de Rob-Vel (en citant le “vocabulaire de la psychanalyse” de Laplanche et Pontalis, la projection se définit comme “une opération par laquelle le sujet expulse de soi et localise dans l’autre, personne ou chose, des qualités, des sentiments, des désirs qu’il méconnait ou refuse en lui”.). La projection, l’identification et l’investissement sont des caractéristiques retrouvées dans une grande partie des personnages de romans, de bandes dessinées ou encore cinématographiques.

Rob-Vel et Jijé s’inscriront dans l’écriture d’histoires courtes, ne permettant pas d’approfondir l’univers de Spirou. Cependant Jijé initie un phénomène qui se retrouvera chez quasiment tous les auteurs: ne pouvant pas utiliser Spirou comme il le souhaite, il crée un nouveau personnage, sur lequel il pourra s’investir: Fantasio.

Franquin, le successeur, expliquera que le personnage de Spirou était un fardeau et qu’il appréciait beaucoup plus ses personnages (Le comte de Champignac, Zorglub, le marsupilami…). Ces personnages permettent également aux auteurs de projeter et de se projeter dans l’univers de Spirou. Il n’est pas possible pour les auteurs de modifier Spirou, alors ils modifient son entourage.

La plupart des auteurs, ayant investi cette bande dessinée, lors du dernier album souhaite tuer le Spirou qu’ils ont crée. Morvan et Munuera remplace Spirou par son double des années 30 en revenant dans le temps. Tome et Janry remplace Spirou par un clone. Quant à Franquin, dans “Panade à Champignac”, il met les protagonistes dans une situation irréversible (tous les personnages étant paralysés par la “zorglonde”. Spirou dira : “Si Champignac est touché, il n’existe plus au monde personne qui sache comment nous rendre le mouvement”. Franquin n’aurait pas pu continuer cette série sans ses personnages. Cette citation pouvant être mis en relation avec l’image jointe dans ce billet: “Spirou et Fantasio […] toujours en mouvement”.

Pourquoi avoir besoin de ce mouvement? D’être toujours en voyage? Pourquoi avoir choisi le reportage? Et surtout que recherche Spirou?

Le monde de Spirou est connu, mais Spirou lui-même ne semble pas l’être. Tome et Janry tenteront de répondre aux questions des origines à travers un album “la jeunesse de Spirou” (ils créeront également une série: le petit Spirou). Il explique que Spirou est un orphelin dont on ne connait pas les parents (comme il n’a pas de réel créateur). Tome présente ses prédecesseurs comme les instituteurs de Spirou : ils l’ont aidé à grandir. Dupuis étant le proviseur (dirigeant les enseignants).

Spirou est un groom, il est au service du client, comme les auteurs sont au service de l’éditeur, bloqués dans un monde figé au fur et à mesure des évolutions appliquées par les précédents scénaristes et dessinateurs.

Toute la richesse de ce personnage vient de ses différents auteurs, et son immortalité ( les décennies passent, mais il ne vieillit pas) lui permet également une  certaine longévité.

Contrairement au comics, la bande dessinée franco-belge se caractérise par le lien entre le scénariste, le dessinateur et le héros. Spirou est une exception.

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