samedi 18 septembre 2010






Société
08/09/2010

Le bracelet électronique en débat

Mesure phare de la loi sur la sécurité intérieure, son port serait obligatoire aux récidivistes.

Par THOMAS HOFNUNG

Un télescopage en bonne et due forme. L’annonce, hier, de la découverte du corps de la joggeuse disparue dans une forêt du Nord est intervenue alors que le Sénat entamait l’examen de la loi de programmation sur la sécurité intérieure (dite «Loppsi 2»). Celle-ci inclut, comme le souhaitait Nicolas Sarkozy, l’instauration du port du bracelet électronique pour les récidivistes après la fin de leur peine.

Contrôle. L’homme qui a reconnu avoir violé et tué la jeune femme avait été placé en préventive en mai 2004, avant d’être condamné en 2006 à dix ans de prison pour un viol sous la menace d’une arme dans les Hauts-de-Seine (lire ci-contre). Libérable dès 2012 par le jeu de réduction des peines, il a par ailleurs bénéficié d’une libération conditionnelle, possible à mi-peine.

Ce fait divers ressemble à s’y méprendre à celui qui s’était produit il y a un an près de Milly-la-Forêt. Marie-Christine Hodeau, une joggeuse de 42 ans, avait été retrouvée morte dans une forêt. Son meurtrier, condamné en 2002 à onze ans de réclusion criminelle pour le viol et l’enlèvement d’une adolescente de 13 ans, avait bénéficié en 2007 d’une libération conditionnelle assortie de strictes mesures de contrôle. Il s’était pourtant réinstallé dans la commune des parents de sa première victime.

Aussitôt, la polémique avait enflé sur le prétendu «laxisme» des juges, mais aussi sur la nécessité de renforcer l’application de la «castration chimique». Nicolas Sarkozy avait reçu la famille de la victime et promis de renforcer la lutte contre la récidive - une loi sur le sujet était d’ailleurs discutée au même moment au Parlement.

Hier, lors d’un petit-déjeuner à l’Elysée avec des responsables de la majorité, Sarkozy a indiqué qu’il «ne reculera pas» et qu’il mettra en œuvre les mesures annoncées le 30 juillet à Grenoble. Le Président avait souhaité que «les magistrats puissent condamner automatiquement les multirécidivistes au port du bracelet électronique pendant quelques années après l’exécution de leur peine».

«Escalade». Cette mesure pourrait-elle éviter les drames causés par des récidivistes ? La loi sur la surveillance et la rétention de sûreté, votée en 2008, permet déjà de contraindre à porter le bracelet au terme de la peine dans des cas exceptionnels, comme le rappelle Laurent Bedouet, de l’Union syndicale des magistrats. «C’est une telle escalade législative que des textes ne sont jamais appliqués : au moment où ils le devraient, d’autres plus sévères sont en fait votés…» La Loppsi 2 étendra sans doute la possibilité d’imposer le bracelet après la fin de la peine. «Mais il ne faut pas laisser croire que le bracelet est la panacée, poursuit Laurent Bedouet. Les psychiatres expliquent bien que, s’il convient à certains détenus, il n’est pas adapté à d’autres qui, s’ils sont saisis d’une pulsion irrépressible, tueront malgré tout. Le bracelet permettra seulement de les localiser et de les arrêter plus vite.»

La Loppsi inclut par ailleurs deux amendements : l’extension des peines plancher pour les violences aggravées et l’instauration d’une peine de prison incompressible de trente ans pour les assassins de policiers ou de gendarmes. Hier, devant les députés, Brice Hortefeux a assuré que la Loppsi 2 serait le seul texte sur la sécurité présenté aux parlementaires durant le quinquennat.

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