jeudi 1 octobre 2009







SOCIÉTÉ

Le meurtre de l'Essonne relance la polémique sur la récidive


AP | 01.10.2009 | 20:09


La polémique a agité jeudi le monde politique et judiciaire, au lendemain du meurtre de la joggeuse de l'Essonne qui a relancé le débat sur la récidive. A Brice Hortefeux, qui a critiqué la remise en liberté du meurtrier présumé, la ministre de la Justice Michèle Alliot-Marie a répondu qu'il n'y avait eu "aucun dysfonctionnement". Le porte-parole de l'UMP s'est, lui, attiré les foudres des magistrats en plaidant pour la castration chimique des récidivistes.


Le suspect, Manuel Da Cruz, 47 ans, qui a avoué mercredi le meurtre de Marie-Christine Hodeau, avait été condamné en 2002 à 11 ans de réclusion pour l'enlèvement et le viol d'une adolescente de 13 ans deux ans plus tôt dans le Loiret. Il avait bénéficié d'une libération conditionnelle le 5 mars 2007, la surveillance judiciaire s'achevant en novembre dernier, a expliqué jeudi le procureur d'Evry Jean-François Pascal. Pour lui, "rien ne laissait penser, objectivement, dans son comportement, qu'il pouvait recommencer".


Jeudi, le ministre de l'Intérieur Brice Hortefeux a critiqué la décision de remise en liberté prise par les juges d'applications des peines, et estimé que ce meurtre aurait pu être évité. Des propos qui ont suscité une vive réaction de la magistrature, et un recadrage de Michèle Alliot-Marie.


"Il n'y a pas eu de dysfonctionnement de la justice, mais il y a eu une insuffisance des mesures de suivi. Je pense que les juges ont effectivement besoin d'être soutenus parce qu'ils font un métier difficile", a déclaré la garde des Sceaux lors d'un point presse au ministère de la Justice. "La chaîne de la sécurité implique qu'il y ait le respect à la fois des compétences des uns et des autres, mais qu'il y ait également une bonne entente entre le ministère de l'Intérieur et le ministère de la Justice", a-t-elle ajouté sèchement.


"Il raconte n'importe quoi, Brice Hortefeux", a de son côté estimé Christophe Régnard, président de l'Union syndicale des magistrats (USM, majoritaire), qui a également réagi à l'idée de castration chimique évoquée par Frédéric Lefebvre.


Dans un communiqué, le porte-parole de l'UMP a en effet jugé nécessaire de "tirer les conséquences immédiates en termes de responsabilité et de modification de la loi" du drame de l'Essonne. "Ne doit-on pas enfin décider la mise en oeuvre de la castration chimique pour ce type d'individu?", s'est-il interrogé.


"C'est un grand classique, la modification de la loi", a jugé Christophe Régnard sur Europe-1. "En France, dès qu'il y a un problème de faits divers, on fait une loi (...) Je suis à peu près certain que l'année prochaine, avec un nouveau drame, on aura à nouveau le même discours et on nous vendra à nouveau une nouvelle loi".


"On continue à faire des lois et à faire croire à l'opinion publique que les choses vont s'améliorer. Elles ne s'amélioreront pas", car "on n'a jamais voulu, en France, se poser la question du suivi psychiatrique, psychologique et social des détenus" dès le début de la détention, a poursuivi le président de l'USM.


Pour Mathieu Bonduelle, du Syndicat de la magistrature, la solution de la castration chimique n'est pas applicable. "Il faut bien comprendre que sur 100 personnes qui sont libérées, y compris en matière sexuelle, vous avez peut-être une ou deux personnes éventuellement qui récidivent", a-t-il expliqué sur France-Info. "Si on doit castrer chimiquement 100 personnes pour en empêcher deux de récidiver, ça pose des questions vraiment fondamentales".


Nicolas Sarkozy a pour sa part reçu jeudi la famille de la victime. Selon un communiqué de l'Elysée, le chef de l'Etat a demandé à M. Hortefeux "de veiller, au besoin par une modification de notre législation, à une implication plus forte" des forces de l'ordre dans la surveillance des condamnés ayant achevé leur peine.


Souhaitant "une véritable réforme de la psychiatrie criminelle", il a également indiqué que le prochain projet de loi sur la "récidive criminelle" sera "examiné en priorité par le Parlement avant la fin du mois d'octobre".


Dans le cadre de sa libération conditionnelle, le suspect Manuel Da Cruz avait été soumis à des obligations, avec un suivi médical en raison de son addiction à l'alcool, ainsi qu'à des interdictions, notamment de se rendre à Echilleuses (Loiret) où vivait son ancienne victime. Il était revenu vivre dans ce village après la fin de sa surveillance judiciaire en novembre 2008, selon le procureur.
AP

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